Selon l’Insee, en France un mariage sur sept est un mariage mixte. Ce qui fait des Français des champions en la matière. Dans le couple mixte, nous partons à la rencontre de l’autre sans bouger de chez soi et les habitudes du quotidien, culinaires et culturelles, sont constamment questionnées.
Ces différences sont souvent source de richesse mais elles peuvent être également source de quiproquos. Lepetitjournal.com est allé à la rencontre de Patricia, Mexicaine de 28 ans, Vivian, Hongkongaise de 31 ans, Lina, Colombienne de 38 ans et de Hana, Japonaise dans la cinquantaine. Elles nous parlent de leur quotidien aux côtés de leur mari français.
Quelles sont vos principales différences culturelles?
Patricia: Luc est rigoureux et j’ai tendance à m’éparpiller facilement. Il aime être ponctuel quand on a rendez-vous quelque part et moi, je traîne. Il a appris que quand on est invités chez des latinos et qu’on nous dit 19h c’est plutôt 20h voire plus tard.
Vivian: On a des habitudes alimentaires différentes, par exemple, il mange parfois de la nourriture crue. Il aime profiter de la nature et des activités en plein air, tandis qu’à Hong Kong on essaie d’éviter le soleil autant que possible, surtout les filles.
Lina: Edouard est réservé, très calme et préfère être en petit comité. Il est plutôt du genre famille qui aime bien rester tranquille. Je suis extravertie, je parle très fort et adore les nouvelles rencontres et expériences, les voyages, les sorties et tenter l’inconnu.
Hana: Un usage du sarcasme qui ne m’est pas familier. Il a une mentalité plus individualiste. Nous avons des formes de salutations différentes. La fréquence de communication avec nos familles n’est pas la même.
Stéréotypes sur les Français
Quelles idées reçues aviez-vous à propos des Français?
Patricia: J’avais en tête tous les clichés des films : romantiques et attentionnés. Je peux dire qu’avec Luc ça se confirme. Il existe aussi le stéréotype des Français qui puent, ce n’est pas le cas de Luc mais je ne peux pas dire la même chose pour certaines personnes dans les transports.
Vivian: Pour moi les Français sont de bons vivants, ils prennent des heures pour déjeuner, et le fait d’avoir beaucoup plus de vacances que nous à Hong Kong renforce un peu cette idée.
Lina: Le stéréotype des Français bohèmes a été renforcé, ainsi que celui des Français qui ne se lavent pas (mais pas à cause d’Édouard). Le stéréotype du Français froid et pas très accueillant a été déconstruit.
Hana: J’avais une image des Français sensibles, romantiques, passionnés, très bavards et bons vivants. Tout cela a été renforcé à l’exception de la partie romantique.
Le poids de la culture française dans le couple
Y a-t-il quelque chose dans la culture française que tu trouves étrange?
Patricia: Une tradition au boulot qui est complètement différente au Mexique et qui au début me dérangeait pas mal. Quand c’est ton anniversaire c’est bien vu d’apporter à boire et à manger pour tes collègues. Au Mexique ce sont les autres qui organisent tout pour toi, ils amènent un gâteau d’anniversaire et même des cadeaux!
Vivian: La coutume de "faire la bise", je ne suis pas habituée à cette proximité, ça me paraît un peu trop intime. Aussi les adieux peuvent durer jusqu’à une demie heure, à Hong Kong on dit au revoir et on tourne la tête immédiatement.
Lina: Surtout dans le cadre familial, j’ai du mal avec les protocoles et à ne pas parler ouvertement des problèmes personnels. Ils sont très réservés, alors que pour moi la famille est le premier soutien autant pour les choses positives que pour les expériences négatives.
Hana: J’ignorais tout de la petite souris, il a essayé de m’expliquer mais je n’arrive toujours pas à comprendre entièrement. Il y a aussi la difficulté de savoir s’il faut embrasser quelqu’un en le saluant, parfois on le fait et parfois pas. Finalement, les adieux prolongés, ça dure une éternité lorsqu’on prend congé!
Qu’est-ce que tu aimes de la culture française et qu’est-ce que tu n’aimes pas?
Patricia: J’aime la culture de l’apéro ! Je trouve c’est tout un rituel pour passer de super moments autour d’un verre avec les amis et la famille. Ce que je n’aime pas c’est que les Français ont tendance à se plaindre un peu pour tout et pour rien.
Vivian: Ce que j’aime est sans aucune doute la nourriture (surtout le fromage) et la fête de Noël, chaque année on part en France avec sa famille et c’est très festif. Ce que j’aime moins c’est quand on sort avec des Français, ils parlent anglais pendant deux minutes et continuent en français, surtout si ça parle football! et j’ai du mal à suivre la conversation.
Lina: Le fait de profiter des repas à table. Dans ma culture, la place de la nourriture est plus pour satisfaire un besoin. Être à table en France est un plaisir ainsi qu’un moment de partage, de convivialité et d’échange!
Hana: Ce que j’aime chez les Français, c’est qu’ils profitent de la vie sans se soucier de ce que pensent les autres, ce que j’aime moins c’est le côté sarcastique… parfois c’est drôle mais parfois c’est trop.
La gastronomie française dans les couples mixtes
Quel plat français as-tu adopté?
Patricia: Plus qu’un plat c’est LE repas numéro 1: le fromage (tous !), la baguette et le bon vin rouge. Les pâtisseries ont aussi gagné une place dans mon cœur.
Vivian: Tous les types de fromages, à chaque visite en France on revient à Hong Kong chargés de fromage.
Lina: La tarte à la tomate, pour moi c’est un exploit! Nos familles reconnaissent les talents de cuisiner d’Edouard grâce à sa magnifique tarte à la tomate.
Hana : la raclette et la cuisine de Provence.
Comment jonglez-vous entre deux traditions culinaires distinctes?
Patricia: On essaie de manger mexicain de temps en temps. Soit on cuisine à la maison ou sinon on se fait un resto mexicain pour retrouver les saveurs et l’ambiance mexicaine.
Vivian: On mange dehors très souvent et on ne se cantonne pas à deux types de cuisine, on mange très varié, à Hong Kong on trouve tout, maintenant on cuisine plus à la maison à cause du virus et on cuisine des plats faciles, pas forcément français ou hongkongais.
Lina: Nous avons créé notre propre formule, par exemple "l’arepacletta" = mélange de nos deux cultures, l’arepa : galette colombienne à base de farine de maïs avec de la raclette.
Hana: J’essaie de préparer les deux types de cuisines autant que possible, mais on a un penchant pour la cuisine française, j’aime manger du fromage après un repas. Heureusement, mon mari aime la nourriture japonaise, sauf quand je m’essaie à la cuisine d’Okinawa.
Quelles habitudes culinaires de ton compagnon te paraissent étranges et vice-versa?
Patricia: Le petit déjeuner sucré tandis qu’au Mexique c’est salé. Les horaires des repas (15h au Mexique au lieu de 12h). Comme un bon alsacien, Luc cuisinait beaucoup avec de la crème fraîche ! Heureusement on a réussi à corriger tout ça. Lui, il a du mal avec les sauces piquantes parce qu’on en met partout. Il commence à s’y faire et même à prendre du plaisir à en manger.
Vivian: Ils mangent trop de pain, surtout quand on mange avec la famille. La pratique de l’apéritif me paraît étrange mais dans le bon sens. A Hong Kong on mange beaucoup de "street food" et il trouve ça un peu bizarre, ainsi que le fait de manger toute la journée au lieu de trois repas, on aime prendre le thé et même un petit en-cas avant d’aller au lit.
Lina: La cuisine du riz en France me paraît très fade, nous ajoutons des épices et ça change tout! Je suis étonnée de la légèreté du petit déjeuner français et lui de la lourdeur du desayuno colombien. Aujourd’hui, il fait du riz comme un colombien et sait faire des arepas! Moi, je mange du fromage qui pue et de la viande crue.
Hana: Ce que je trouve étrange c’est le fait de manger du boudin, des escargots, des grenouilles et du lapin. Je peux comprendre et accepter ces habitudes culinaires mais je suis moins encline à les goûter.
La langue française dans les couples mixtes
Quelle(s) langue(s) parlez-vous à la maison?
Patricia: On parle français et un peu espagnol, mais quand on s’est rencontrés je ne parlais pas bien le français et on communiquait en anglais. Luc a appris l’espagnol pour communiquer avec ma famille et quand les mots ne viennent pas il les invente et ça marche très bien.
Vivian: Nous parlons en anglais entre nous ainsi qu’avec nos familles, avec son père on communique avec beaucoup de gestuelle.
Lina: On parle français et espagnol. Je parle en espagnol avec notre enfant de 3 ans. Édouard a fait de grands progrès en espagnol principalement depuis que notre enfant est né.
Hana: On parle japonais car je parle un français très basique. Avec ses parents je peux avoir une conversation pas très complexe.
Quel mot ou expression drôle t’a-t-il appris en français?
Patricia: "Tremper son biscuit" …pas au premier rendez-vous!
Vivian: "Bobo" j’entends ça souvent quand il parle avec ses amis.
Lina: "Il vaut mieux l’avoir en photo qu’à table".
Hana: "Et mon cul, c’est du poulet?"
Cite un problème et un avantage issu de la mixité du couple
Patricia: Le principal problème c’est sans doute que je suis loin de mon pays, ma famille, mes amis et des tacos même si on essaie d’y aller chaque été. Comme avantage je trouve que les gens sont plus ouverts et c’est plus facile d’approcher d’autres couples mixtes.
Vivian: Lorsqu’on est avec différents groupes d’amis (les miens et le siens) c’est difficile de mélanger les deux, parfois à cause d’une barrière linguistique ou des différences culturelles. Pour nous deux, ces cultures différentes nous rendent plus tolérants et ouverts.
Lina: Parfois, le problème c’est l’incompréhension. Bien que ma maîtrise de la langue française soit bonne, parfois les mots sont mal placés ou la construction de la phrase n’atteint pas le propos que je souhaite.
Hana: Je ne dirais pas que c’est un problème mais plutôt que c’est dommage de ne pas pouvoir voyager comme nous le voudrions car nos parents sont âgés et nos vacances sont consacrées à leur rendre visite. Même si chaque culture a des expectatives différentes, on arrive à avoir une interaction facile avec les beaux-parents.
Le lecteur français se retrouvera peut-être dans ces récits qui tissent chacun à leur manière une maille qui lie toute une culture, celle qui nous façonne parfois subrepticement, qui pétrit nos habitudes et forge nos coutumes. Un couple mixte est un chassé-croisé incessant où l’on doit trouver un tempo précis pour pouvoir avancer d’un pas cadencé. Le couple mixte nous met face à l’altérité et nous contraint à interroger cet amas de notions indicibles qui constituent la culture française.
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