La fin d’année étant arrivée, il est temps de faire un bilan sur la production cinématographique de Hong Kong. 2019 a-t-elle été un bon cru ou la continuation d’un inexorable déclin artistique et commerciale? Paradoxalement, la réponse est oui aux deux propositions.
La nouvelle génération s’impose… en tout cas artistiquement
Grâce à une politique proactive du gouvernement depuis quelques années, les jeunes cinéastes hongkongais ont maintenant des facilités pour produire leurs premiers longs métrages, tant que cela reste dans le cadre de budget restreint. C’est ainsi qu’on avait pu avoir de belles réussites comme "Mad World" ou "Weeds on Fire". C’est dans ce cadre qu’a été produit cette année "Still Human" d’Oliver Chan. Le film est une exploration touchante de la relation qui unit un handicapé grognon (le toujours excellent Anthony Wong) et son aide domestique fraichement arrivée à Hong Kong (Crisel Consunji). Malgré son sujet trop peu discuté dans la société hongkongaise et son star power limité, "Still Human" été un gros succès commercial.
D’autres films locaux ont réussi à tirer leur épingle du jeu même si ils n’ont pas forcément été récompensés aussi bien que "Still Human" d’un point de vue commercial. C’est ainsi le cas de l’intrigant thriller "G Affairs" de Lee Cheuk Pan qui parvient bien à capter les préoccupations actuelles tout en proposant une réalisation inventive, du film sportif "We Are Legends" de Daniel Chan qui trouve une approche originale et inspirante des compétitions martiales, du drame "Fagara" par Heiward Mak qui propose un message positif par rapport au deuil et aux structures familiales atomisées, du faux polar "A Witness Out of the Blue" d’Andrew Fung où un gangster trouve un certain réconfort en se planquant dans une maison de retraite ou encore "Lion Rock" de Nick Leung qui redonne vie à l’esprit combatif et optimiste qui a fait le succès de la ville. Evidemment, les événements actuels n’ont probablement pas joué en faveur de ces petites productions qui peinent déjà à s’imposer face à la concurrence hollywoodienne et régionale en temps normal.
Les anciens et les blockbusters à destination du marché chinois s’écrasent
Si les œuvres des jeunes cinéastes incitent à un certain optimisme envers le futur de l’industrie, on ne peut pas en dire autant des vétérans, que ce soit ceux qui travaillent à l’échelle locale ou, la plupart d’entre eux, ceux qui visent le marché chinois. C’est ainsi le cas de Fruit Chan, connu pour ses films indépendants prisés des festivals, qui a sorti deux longs métrages cette année, le consternant film de kung fu urbain "Invincible Dragon" et le métaphoriquement balourd "Three Husbands". Alan Mak, le co-réalisateur des "Infernal Affairs", ne s’en est pas mieux sorti avec son nouveau polar sorti pour le nouvel an chinois, "Integrity", qui s’il proposait une belle patine visuelle était d’un vide abyssale scénaristiquement parlant.
Daniel Lee, avec son drame himalayen "The Climbers", et Andrew Lau, le film catastrophe "The Captain", ont eux joué la carte du patriotisme forcené. Si cela a bien marché commercialement (les films sont sortis au moment de la fête nationale), la qualité des films s’en ressent. Passons un voile pudique sur le "P Storm" de David Lam, 4e épisode d’une série de médiocres polars. La palme du pire film de l’année ne va toutefois pas à ce dernier mais au blockbuster "Line Walker 2" de Jazz Poon, tentative de film d’action à la John Woo qui est une véritable insulte à l’intelligence et au bon goût.
Au sein de cet océan de médiocrité, quelques vétérans parviennent malgré tout à surnager. C’est le cas du très actif Herman Yau qui a proposé avec "A Home with a View" une comédie noire sur les travers de la société hongkongaise et le meilleur film du nouvel an chinois. Flop commercial, le metteur en scène s’est rattrapé à ce niveau avec son "White Storm 2 - Drug Lords" dont le final apocalyptique dans la station MTR de Central restera dans les mémoires. Yau aurait pu être le responsable de 3 des meilleurs films de l’année s’il ne s’était pas fait éjecté du "New King of Comedy" par Stephen Chow. Avec cette comédie entre cruauté et naïveté, typique du style de l’homme, le comique préféré des Hongkongais prouve une bonne fois pour toute avoir réussi son adaptation au marché chinois.
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