Une édition du plus célèbre festival de cinéma de Hong Kong en demi-teinte mais avec suffisamment d’œuvres de qualité pour satisfaire cinéphiles et grand public.
Depuis maintenant plus de 40 ans, le Hong Kong International Film Festival est LE festival de cinéma de la ville. Il vise deux objectifs majeurs : mettre en avant l’industrie cinématographique locale et permettre au public hongkongais d’accéder à des œuvres de qualité du monde entier.
L’année dernière, le festival s’était acquitté de ces deux tâches avec brio en présentant des films comme Love Off the Cuff ou Personnal Shopper tout en proposant de multiples rétrospectives d’auteurs majeurs du cinéma comme Edward Yang ou Robert Bresson.
Cette édition 2018 est une année charnière pour le festival. Elle marque la fin d’une époque. L’équipe en charge depuis des années est sur le point de passer le relais à une nouvelle génération de programmateurs.
Une production locale plutôt fragile
Pour le premier objectif du festival, la promotion du cinéma Hong Kong, les choses ne sont pas brillantes. Ainsi, pour la première fois depuis ses débuts, le film d’ouverture ne sera pas une production locale mais le film japonais Omotenashi. Triste! Mais vu l’état faiblard de l’industrie locale, le festival n’est probablement pas à blâmer. Signe supplémentaire de la mauvaise santé du cinéma de Hong Kong, la traditionnelle rétrospective de l’année précédente ne comporte que 8 films. C’est bien peu.
Pour compenser, le HKIFF a réussi à faire sortir Brigitte Lin, une des stars les plus iconiques du cinéma chinois des années 1970, de sa retraite. La rétrospective qui lui est consacré est forcément de qualité. On conseillera tout particulièrement son premier film à Taiwan, Outside the Window, une romance adolescente qui lança toute une vague de films du même genre durant les années 1970 et Peking Opera Blues, rien de moins qu’un des tout meilleur film de Tsui Hark où le cinéaste réinvente la star en la transformant en une androgyne politiquement engagée.
De grands films internationaux… notamment français!
Heureusement, cette édition s’en sort nettement mieux sur le volet découverte du cinéma étranger. Parmi les points d’orgue figurent -cocorico!- les représentants du cinéma français. Celui-ci a toujours été bien représenté au sein du festival, mais cette année, nous sommes gâtés avec 55 œuvres présentées (productions et co-productions).
Des documentaires de grands maîtres (12 Jours de Raymond Depardon sur les hospices, Napalm de Claude Lanzmann sur un amour plus ou moins fantasmé en Corée du Nord) aux œuvres sans concession de la nouvelle génération (le rape and revenge Revenge de Coralie Fargeat) en passant par la spécialité franco-française des drames familiaux intimistes (Jusqu’à la Garde de Xavier Legrand) et les classiques intemporels (Belle de Jour de Luis Bunuel ou La Belle Noiseuse de Jacques Rivette), Il y a de quoi retrouver l’air du pays en attendant le prochain festival du cinéma français à la fin de l’année!
Le 21 mars déjà, une soirée intitulée "French Night" accueillera le réalisateur Xavier Legrand et son film Jusqu'à la Garde.
Un éclairage particulier est donné au cinéma allemand et scandinave. Le premier a pour fer de lance une rétrospective consacrée au cinéaste Werner Herzog, l’occasion de revoir sur grand écran des œuvres majeures comme Fitzcarraldo ou Aguirre, la Colère de Dieu avec un Klaus Kinski halluciné et hallucinant. La jeune génération est représentée par des réalisateurs comme Christian Petzold (Transit, un drame prenant place pendant l’occupation nazie de la France) ou Thomas Stuber (In the Aisles, une comédie romantique sur fond d’hyper consommation). Ce sont également les jeunes réalisateurs qui sont mis en avant pour le focus sur le cinéma scandinave. La sélection proposée est un éventail large et passionnant de ce que cette cinématographie peut proposer, allant du fantastique social (Thelma de Joachim Trier) au film noir sur fond d’immigration (The Charmer de Milad Alami).
Recommandons également le représentant Libanais aux oscars, L’Insulte de Ziad Doueiri, et son alter ego Russe par le trop rare Andrei Zvyagintsev (50 points au scrabble garantis !), Loveless, ainsi que la conclusion de la trilogie de Yakuza de Takeshi Kitano, Outrage Coda.