Édition internationale

De Beijing à Kigali, la Francophonie face au défi de l’égalité

Réunie à Kigali en novembre 2025, la Francophonie s’est penchée sur l’héritage de Beijing à l’heure des reculs observés dans de nombreux pays. Trente ans après le texte fondateur de 1995, la question n’est plus celle des principes, mais de leur traduction concrète dans un monde traversé par les crises.

Signature du MoU ONU FEMMES-OIF - Kigali - Photo OIFSignature du MoU ONU FEMMES-OIF - Kigali - Photo OIF
Signature du MoU ONU FEMMES-OIF - Kigali - Photo OIF

 

 

En 1995, au moment où Beijing devient l’épicentre du combat mondial pour l’égalité, la Francophonie n’est pas absente. À l’époque, l’Agence de coopération culturelle et technique (ACCT), ancêtre de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), œuvre en coulisses pour faciliter la participation de nombreux pays francophones, notamment du Sud.

Son rôle est logistique, diplomatique, mais aussi politique. Elle accompagne les délégations, soutient les associations, coordonne la présence francophone aussi bien dans l’enceinte officielle que sur le Forum des ONG de Huairou. Sans occuper le devant de la scène médiatique, la Francophonie s’inscrit déjà dans cette dynamique universelle de reconnaissance des droits des femmes.

 

 

Beijing 1995 : le jour où les femmes ont imposé leur voix au monde

 

La Francophonie et les pays du Sud face à l’égalité

À Beijing, l’enjeu est aussi celui de la voix des pays francophones du Sud. Sous l’impulsion de plusieurs États moteurs — dont le Canada, la France et le Sénégal — la Francophonie défend une approche où la question de l’égalité ne se limite pas aux droits formels, mais s’ancre dans les réalités culturelles, éducatives et linguistiques.

Des actions concrètes émergent : soutien à la formation des déléguées, appui logistique, création de réseaux transnationaux de femmes francophones, premiers jalons de programmes d’autonomisation économique et d’éducation des filles. Peu à peu, la Francophonie intègre les principes de Beijing dans ses propres politiques d’égalité femmes-hommes.


 

Kigali 2025, un écho contemporain de Beijing

Les 19 et 20 novembre derniers, à Kigali, au Rwanda, la 46ᵉ Conférence ministérielle de la Francophonie s’est tenue sur un thème hautement symbolique : « Trente ans après Beijing : la contribution des femmes dans l’espace francophone ». Le choix de cette thématique n’a rien d’anodin. Il marque à la fois un héritage assumé et une inquiétude latente.

Entre ces deux moments, la Francophonie a cherché à structurer cette mobilisation : création d’un Réseau dédié à l’égalité femmes-hommes au sein de l’OIF, organisation d’un Forum mondial des femmes francophones à Kinshasa en 2014, multiplication des initiatives sectorielles. Kigali s’inscrit dans cette continuité, mais aussi dans un temps de questionnement sur leur portée réelle.

Car le monde de 2025 n’est plus celui de 1995. Les crises se cumulent — conflits armés, reculs démocratiques, pressions économiques, fragilisation des droits fondamentaux. Dans de nombreux pays, les droits des femmes sont de nouveau contestés, parfois ouvertement remis en cause. Kigali sonne alors comme un rappel : l’égalité n’est jamais acquise.

 

 

La diplomatie francophone à l’épreuve du réel

À Kigali, la Francophonie interroge sa propre capacité d’influence. Comment transformer les déclarations en actions durables ? Comment soutenir les actrices de terrain dans des contextes politiques parfois hostiles ? Comment concilier diplomatie institutionnelle et pression citoyenne, dans l’esprit même de Beijing ?

Trente ans plus tôt, la force de la Conférence mondiale venait de la rencontre — parfois tendue, mais féconde — entre gouvernements et société civile. Aujourd’hui encore, c’est dans cette articulation fragile que se joue l’avenir de l’égalité femmes-hommes dans l’espace francophone.

 

 

Trente ans après, la vigilance comme horizon

De Beijing à Kigali, la Francophonie avance sur une ligne de crête : entre héritage, responsabilité et incertitude. Reste à savoir si, face aux nouveaux désordres du monde, elle saura redevenir ce trait d’union politique et citoyen capable de faire entendre la voix des femmes au-delà des déclarations.

 

 

46e Conférence Ministérielle de la Francophonie, Kigali novembre 2025

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