Lorsque Dan Schwarzfuchs, chef des urgences de l'hôpital Soroka de Beersheva, dans le sud d'Israël, a entendu deux sirènes consécutives d'alerte tôt samedi matin, il s'est précipité à l'hôpital situé à une quarantaine de kilomètres de la bande de Gaza.
"Nous avons très vite compris que c'était la guerre", raconte-t-il lors d'un entretien à l'AFP.
"Très rapidement, tout le personnel de l'hôpital était ici, plus de 1.000 médecins, toutes les infirmières, tous ceux qui devaient être là étaient présents (...) et même ceux qui n'avaient pas besoin d'être là, des infirmières en congé maternité, des médecins qui sont venus de partout".
Le mouvement islamiste Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza, a lancé une offensive meurtrière contre Israël samedi matin, en plein shabbat et au dernier jour des fêtes de Soukkot.
Plusieurs centaines de ses hommes armés se sont infiltrés dans des localités du sud d'Israël, sous couvert d'un barrage de plusieurs milliers de roquettes, et ont massacré plus d'un millier d'Israéliens, pour la plupart des civils, selon les autorités israéliennes.
Selon le dernier bilan du ministère israélien de la Santé publié mercredi, les attaques du Hamas et les tirs de roquettes ont fait plus de 3.200 blessés, évacués sur des hôpitaux israéliens depuis samedi, dont 870 à l'hôpital Soroka, le plus important du sud du pays.
- Couvert de sang -
"Dès 8h00 du matin, les premiers blessés ont commencé à affluer à l'hôpital", relate Dan Schwarzfuchs, 60 ans, également directeur adjoint de l'établissement.
"Et à partir de ce moment là nous avons soigné des blessés dans l'unité de soins traumatologiques à un rythme fou, dont nous n'aurions jamais pu imaginer ni qu'il aurait pu se produire, ni que nous aurions pu être capables de le suivre".
Les nombre de blessés soignés en traumatologie dans les premières 24 heures de la guerre - 120 - a été supérieur au nombre de blessés soignés en moyenne un "mois normal", a expliqué le médecin, qui n'a pas quitté l'hôpital depuis samedi.
"Le nombre de blessés est astronomique. Lors de l'opération israélienne de 2014 dans la bande de Gaza, 40 blessés c'était une journée très difficile", dit-il à titre de comparaison.
Samedi, "nous finissions de traiter un malade, nous le transférions dans la salle d'opération ou en soins intensifs et immédiatement un autre blessé prenait sa place", explique Dan Schwarzfuchs.
"Le sol de toute la salle d'unité de trauma était couvert de sang, on n'arrêtait pas de le nettoyer".
La nature des blessures était également inhabituelle. "La plupart des blessés avaient été touchés par balles, ce qui nécessite énormément de transfusions" sanguines.
- "Choc total" -
Hors de l'unité de traumatologie dans le service des urgences, sont arrivés certains jeunes rescapés de l'enfer de Tribe of Nova, la fête en plein air organisée dans la nuit de vendredi à samedi à la lisière de la bande de Gaza et qui a tourné au cauchemar samedi à l'aube quand des hommes armés du Hamas infiltrés ont commencé à massacrer ses participants.
"Les jeunes qui sont arrivés de la fête avaient des troubles post-traumatiques très graves, ils étaient en état de choc total après avoir été témoins de ce massacre indescriptible", explique Dan Schwarzfuchs.
Le personnel de l'établissement a aussi dû répondre aux demandes des nombreuses familles venues pour tenter de retrouver leurs proches introuvables.
"Nous avons essayé de les aider autant que nous pouvions mais une grande partie d'entre eux sont rentrés chez eux abattus, sans avoir trouvé personne", dit-il.
Également médecin du kibboutz Aloumim à la lisière de la bande de Gaza, dont les membres ont réussi à repousser l'infiltration d'hommes armés du Hamas samedi, Dan Schwarzfuchs, a vu arriver certains de ses amis dans son unité.
"C'est difficile de soigner de gens que l'on connait bien. Mais c'est un peu normal ici, nous sommes un petit pays, tout le monde connaît tout le monde", dit Dan Schwarzfuchs.
Officier dans l'armée avant de devenir médecin et réserviste pendant comme commandant adjoint de brigade, il dit être préparé à des jours difficiles.
"C'est sûr qu'il y aura encore des blessés mais nous sommes tous prêts".