Édition internationale

Prestation compensatoire et aliments en cas de divorce international dans l’UE

Du fait de la mobilité croissante des personnes, le nombre d’unions revêtant une dimension internationale croit et avec celui-ci, le nombre de désunions intervenant dans un contexte international.

Prestation compensatoire et aliments en cas de divorce international dans l’UEPrestation compensatoire et aliments en cas de divorce international dans l’UE
Écrit par Notaires de France
Publié le 10 septembre 2025, mis à jour le 26 novembre 2025

Est ici abordé en particulier, dans la sphère européenne, le divorce, et plus spécifiquement deux de ses effets patrimoniaux : la prestation compensatoire et la demande d’aliments, présents dans bon nombre de divorces.

Lorsque le divorce comporte des éléments d’extranéité, notamment parce que plusieurs Etats sont impliqués, comment savoir quelle juridiction est compétente pour obtenir le versement de ces sommes et quelles règles légales vont être appliquées par le juge saisi s’agissant notamment des modalités de versement de telles sommes ?

 

L’exemple suivant permettra d’illustrer ces difficultés et d’apporter des éléments de réponse :

Hans, allemand, et Louise, française, se sont mariés à Lyon le 20 août 2014 et ont conclu à cette occasion un contrat de mariage.

Ils ont établi rapidement après le mariage leur résidence habituelle à Munich en Allemagne.

Aujourd’hui, Louise rentre en France pour s’y réinstaller. Elle envisage de demander le divorce, et souhaiterait à cette occasion, obtenir une prestation compensatoire et une contribution à l'entretien et à l'éducation des deux enfants mineurs du couple.

 

Dans un divorce international, il peut être délicat de savoir quelle juridiction saisir d’une demande relative au versement d’une prestation compensatoire ou d’une demande d’aliments.

Dois-je saisir les juridictions de l’Etat dans lequel je réside, ou celles de l’Etat dans lequel réside le débiteur de ces sommes ?

Le règlement européen dit « obligations alimentaires », comporte les réponses à cette interrogation et est applicable dans tous les États membres, aux procédures engagées à compter du 18 juin 2011.

Peuvent être saisies les juridictions de l’Etat dans lequel réside le débiteur de ces sommes OU celles de l’Etat dans lequel réside le demandeur ou créancier de ces sommes. Le texte prévoit également que pourrait être saisie d’une demande relative à une prestation compensatoire ou une demande d’aliments, la juridiction déjà saisie d’une demande relative à la responsabilité parentale ou l’état des personnes, si la première demande est accessoire à la seconde.

 

Dans notre exemple, le juge français pourra donc être saisi de la demande de prestation compensatoire sur le fondement du b) de cet article, puisque le créancier de l’obligation alimentaire, Louise, réside en France.

Le juge allemand pourrait également l’être sur le fondement du a) (lieu de résidence habituelle de Peter, défendeur à l’action).

 

Une fois déterminé le juge compétent, se pose la question de la loi applicable à la demande de prestation compensatoire, de devoir de secours ou de contribution.

La règle applicable (dans les Etats de l’Union européenne ainsi que dans les Etats signataires et ayant ratifié le protocole de la Haye du 23 novembre 2007 sur la loi applicable aux obligations alimentaires ) est la suivante : il est fait application de la loi de l’Etat de la résidence habituelle du créancier (c’est-à-dire celui à qui est due la prestation compensatoire ou la dette d’aliments), ce qui aboutirait dans notre exemple, à la loi française, puisque Louise, créancière, réside actuellement en France.

Cette application pourrait très probablement s’avérer favorable à la prétention de Louise puisque, même si le droit allemand connait la prestation compensatoire, les conditions de son octroi y sont plus strictes. Elle est donc moins facilement obtenue que lorsqu’il fait application du droit français.

  

Toutefois, en ce qui concerne les obligations alimentaires entre des époux ou des ex-époux, l’application de principe de la loi de l’Etat de la résidence habituelle du créancier d’aliments est écartée, lorsque l'une des parties s'y oppose et que la loi d'un autre État, en particulier l'État de leur dernière résidence habituelle commune, présente un lien plus étroit avec le mariage. Dans ce cas, la loi de cet autre État s'applique.

Hans pourrait donc, dans notre exemple, s’opposer à l’application de la loi française et invoquer l’application de la loi allemande si celle-ci s’avérait plus favorable pour lui.

 

Il faut également noter qu’il est possible pour les époux (ou ex-époux) de désigner la loi applicable à leur relation alimentaire par le biais de leur contrat de mariage ou un autre écrit. Un notaire est parfaitement en mesure de conseiller sur l’opportunité d’une telle désignation et sur les lois pouvant être choisies.

 

Les mêmes principes s’appliquent concernant la détermination de la juridiction compétente et de la loi applicable lorsqu’est en cause une obligation alimentaire. Il faut toutefois noter deux particularités en matière de loi applicable à une telle demande d’aliments :

- D’une part, il existe une règle protectrice de certains créanciers d’aliments, notamment les créanciers mineurs : la loi de l’Etat dont les tribunaux sont saisis s’applique si la loi de la résidence habituelle du créancier ne permet pas d’obtenir d’aliments.

L’application de cette règle spéciale aboutirait dans notre cas, en tout état de cause, à l’application de la loi française.

- D’autre part, s’agissant de la possibilité de choix de loi applicable à la relation alimentaire des parties, un tel choix de loi n’est pas possible lorsqu’un mineur est concerné.

 

4 Qui se trouve dans le protocole de la Haye du 23 novembre 2007 sur la loi applicable aux obligations alimentaires auquel il est renvoyé par l’article 15 du règlement « obligations alimentaires ».

5 https://www.hcch.net/fr/instruments/conventions/status-table/?cid=133
 

Pour plus d'informations : 
Notaires.fr
Guide juridique de l'expatriation

 

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Publié le 26 novembre 2025, mis à jour le 26 novembre 2025