

Hasard du calendrier, Yann Arthus Bertrand revient à Rio de Janeiro, 20 ans après Rio 92, pour présenter son exposition La Terre vue du Ciel. Depuis le 27 avril 2012, la place de Cinelândia accueille cette exposition gratuite à ciel ouvert. 130 photographies y sont présentées. Lepetitjournal.com est allé à la rencontre de Yann Arthus Bertrand, un amoureux du monde animal et des grands espaces
A l'aube de Rio+20, Yann Arthus Bertrand, connu pour son militantisme écologique, tire la sonnette d'alarme au sujet de la dégradation des milieux naturels provoquée par l'Homme. Il a présenté son exposition et confié ses inquiétudes au Petitjournal.com.
Lepetitjournal.com - Pouvez-vous nous dire quelques mots de cette exposition présentée pour la première fois à Rio de Janeiro ?
Yann Arthus Bertrand - Cette exposition a été présentée sur les grilles du Jardin du Luxembourg. Elle a été remise à jour et est présentée aujourd'hui avec de nouvelles photos plus récentes. Cela fait 20 ans que j'ai commencé ce travail, c'était d'ailleurs pour Rio 92. On peut dire que la boucle est bouclée ! L'exposition est gratuite. La gratuité est d'ailleurs un mot-clé de mon travail. Je trouve cela très important de pouvoir donner la possibilité à tous de voir mon projet. Je souhaite qu'il puisse circuler. J'ai créé des expositions en plein air, dans la rue? Mon film Home est d'ailleurs, lui aussi, libre de droit et en téléchargement sur internet. Le cadeau que j'ai reçu en le faisant, je le partage avec tous !
Vous avez pris quelques clichés de Rio, qu'avez-vous avez voulu montrer ?
Il y a très peu de photographies du Brésil, j'ai montré des photos de Rio d'une façon très simple. La photographie aérienne consiste à montrer des photos engagées, mais c'est aussi offrir un autre regard sur le territoire. J'ai tenu aussi à évoquer la pollution de la baie de Rio qui est une des plus polluée au monde.
Il y a une photo de la plage d'Ipanema bondée?

Oui, j'ai été très étonné de voir autant de monde sur une plage. La plage est pour les Brésiliens quelque chose de véritablement culturel. C'est très impressionnant à filmer ! Si on veut parler de la surpopulation, quand je suis né nous étions deux milliards, aujourd'hui, la population a triplé.
Quel est votre bilan de ces vingt dernières années?
Je m'étais dit que pour l'an 2000, je ferai un grand travail sur la Terre. Je voulais marquer l'événement. C'est un travail qui m'a littéralement transformé, la terre était plus belle que je ne l'imaginais, plus intéressante. Plusieurs vies ne suffiront pas pour photographier toute la planète. J'ai été transformé aussi parce que j'ai vu l'impact de l'Homme sur la planète, j'ai rencontré des scientifiques qui m'ont communiqué des chiffres inquiétants pour l'humanité. Il y a énormément de gens qui se battent et qui ne baissent pas les bras. Ce sont des gens qui donnent et qui aident. Je crois que l'engagement rend heureux. C'est quelque chose que j'ai découvert en faisant ce travail.
Vous avez d'ailleurs créé votre propre ONG?
Oui, j'ai créé ma propre fondation pour m'engager, pour faire partie de cette famille. Être sur le terrain, c'est aussi comprendre et apprendre des autres. Mon travail n'est pas de faire culpabiliser, mais de rendre responsable. Cette exposition à Rio, c'est plus pour mettre en avant d'un point de vue médiatique ce qui se passe dans le monde. De la part des hommes politiques, je ne m'attends qu'à des belles paroles. Aujourd'hui, on vit en démocratie, mais on est dirigé par des politiciens qui ont une vision électoraliste des choses. En tout cas, c'est par le bas que les choses changeront.
Parlez-nous de votre engagement concernant Rio+20?
Nous sommes en train de finir un film sur l'importance des océans pour l'avenir de l'homme. C'est l'océan qui fait notre climat. C'est un point important de la gouvernance mondiale. Si on continue à pêcher comme ça, il n'y aura plus de poissons en 2050. On continue de subventionner, de vendre des poissons en voie de disparition. On vit dans une espèce de déni collectif. On ne veut pas croire ce que l'on sait. C'est un film un peu là-dessus. C'est un film très pédagogique, passionnant et inquiétant. Le plastique, le réchauffement climatique, l'acidité de la mer? On travaille sur le film avec le bateau scientifique Tara, qui fait un tour du monde depuis trois ans et avec des plongeurs qui nous ont donné leurs films.
Qu'allez-vous organiser pour cet événement ?
Il y aura des débats avec les ONG brésiliennes. L'Odéon Cinéma sera privatisé et nous diffuserons des films. Nous essaierons de faire venir Ban Ki Moon, et d'autres personnalités.
Le Brésil avec votre regard de photographe et de militant, c'est un modèle sur certains aspects en matière d'écologie, de défense de l'environnement ?
Vous rigolez ! Le Brésil est un pays en voie de développement. Il n'est vraiment pas un bon exemple. Le pays se développe grâce au pétrole, il y a une déforestation. C'est un pays qui a besoin de se développer.
Justement sur le barrage de Belo Monte, sur la question des autochtones, de l'environnement quelle est votre opinion ?
Vous savez d'abord je ne connais pas bien le dossier. Aujourd'hui ce n'est plus la mode des grands barrages. On sait que ce n'est pas bon pour l'environnement. 70% des gens sur la terre, n'ont pas d'acte de propriété donc quand on crée un barrage, on les exproprie. C'est complexe car dans le même temps, nous avons besoin d'énergie, et le barrage est une source d'énergie propre.
Qu'est-ce qui vous étonne encore maintenant?
Mes petits-enfants, comme ils grandissent vite ! Plus sérieusement, je deviens de plus en plus naïf et utopiste. Je crois qu'être écolo c'est aimer la vie. C'est aider les autres. Aujourd'hui, on est une écologie de combat, une écologie politique. Il faut absolument qu'on se retrouve et qu'on travaille ensemble. Il faut surtout responsabiliser. Eva Joly a montré que l'écologie politique était morte. Il n'y a pas de partis écologiques. L'écologie doit être dans l'ADN de tous les partis politiques. Je pense qu'il faudrait créer un lobby. Les 2% d'Eva Joly au premier tour de l'élection présidentielle m'ont conforté dans mon idée.
Pensez-vous que le président français viendra au Rio+20 ?
Non, je ne crois pas. Je crois qu'il y aura moins de présidents que prévu. Obama ne viendra pas. Ce ne sera pas Copenhague!
Camille JEANJEAN (www.lepetitjournal.com - Brésil) vendredi 4 mai 2012








































