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CHRISTOPHE-ANDRÉ FRASSA – Tournée en Chine de l’un des douze Sénateurs des Français de l’Etranger

Christophe-André Frassa, Sénateur UMP représentant les Français établis hors de France, s'est rendu à Pékin, Shanghai et Hong Kong du 11 au 21 janvier 2012 dans le cadre de son mandat parlementaire. Lors de son entretien avec lepetitjournal.com, le Sénateur s'est exprimé sur la représentation des Français de l'étranger, mais également sur les spécificités des communautés françaises en Chine et à Hong Kong

Le Sénateur Christophe-André Frassa (Photo: Lenny-Baptiste Conil pour DragonEyePhotography)

Lepetitjournal.com : Vous avez été élu à 40 ans Sénateur représentant les Français établis hors de France. Qu'est-ce qui vous a amené à vous engager en politique? Quel est votre parcours ?
Christophe-André Frassa : Né à Monaco, j'ai d'abord été étudiant en Histoire contemporaine à la Sorbonne puis à l'Institut d'Etudes Politiques de Paris. Depuis toujours, "être au service des autres" est une vraie valeur pour moi. J'ai eu le déclic à Science po ; je voulais participer à l'action publique mais du côté politique. Mon premier geste a été mon adhésion au RPR en 1990 à 22 ans. En 1994, j'ai été élu au Conseil Supérieur des Français de l'Etranger, qui est devenu l'Assemblée des Français de l'Etranger (AFE) dix ans plus tard. J'ai passé six ans à la commission économique où je m'occupais des questions fiscales. Durant les huit années suivantes, j'ai été rapporteur général, puis président de la commission des lois à l'AFE.
"Le 21 septembre 2008 à 16h15, c'est une date qui restera marquée dans mon esprit, j'ai été élu sénateur." Dans ce contexte, je suis devenu membre de la commission des lois puis, par la suite secrétaire du bureau. Il s'agit d'un poste important car je suis chargé de tout ce qui concerne les votes et les délibérations, par exemple lors de l'élection du bureau.
Parallèlement j'ai toujours essayé d'orienter ma carrière professionnelle vers la politique. J'ai été consultant juridique mais également collaborateur parlementaire à l'Assemblée nationale et au Sénat, et chef de Cabinet. A long terme, je souhaiterais me reconvertir en faisant de mon expérience politique un atout dans un autre secteur.

Caroline Fieux, le conseiller à l'AFE René Aicardi, Fanny Daurel, Julien Chiaroni, Christophe-André Frassa et le Consul général de France à Hong Kong Arnaud Barthélémy, lors du cocktail à la résidence

A quoi sert un sénateur des Français de l'étranger ? Quels sont les différents dossiers sur lesquels vous travaillez dans le  cadre de votre mandat, en particulier concernant la fiscalité, la protection sociale ou l'éducation ?
En matière de fiscalité, nous avons mené un combat assez délicat en juin de l'année dernière. Avec les autres Sénateurs UMP des Français de l'étranger, nous nous sommes violemment opposés au projet de taxe sur les résidences secondaires des Français de l'étranger. J'avais même affirmé que je ne voterai pas l'ensemble du texte si cette mesure était maintenue. Le Président de la République a répondu à notre appel et a retiré ce point du projet de loi de finance rectificative. Le projet de la gauche qui consiste à vouloir imposer les Français de l'étranger est complètement irréaliste. Ils continuent à payer un certain nombre d'impôts comme des prélèvements libératoires sur les biens qu'ils ont en France ou des impôts sur leurs revenus qui viennent de France. Cela reviendrait à les stigmatiser, simplement parce qu'ils sont expatriés. En réalité ils créent du travail en France. Souvenons-nous qu'un emploi sur quatre en France est lié à l'exportation.
Concernant la protection sociale, nous avons tous beaucoup travaillé sur la réforme des retraites, mais il ne s'agit pas d'un dossier spécifique à l'étranger. Un des points importants pour les expatriés reste d'arriver à pérenniser le budget qui sert à l'action sociale des Français de l'étranger.
Au sujet de l'éducation, nous avons tous accompagné la promesse de prise en charge de la scolarité par Nicolas Sarkozy. Malheureusement nous sommes contraints par les efforts de restriction à cause de la crise. Nous avons dû accepter le plafonnement de la mesure. L'idéal serait que quelle que soit notre géolocalisation, 75% des frais de scolarité soient pris en charge par l'Etat. Or ce n'est pas le cas.

Laurence Huret, Daniel Schneersohn, Christophe-André Frassa et Patrick Goubier, lors du cocktail UFE Hong Kong chez Patrick Deli

Et quels dossiers allez-vous traiter plus spécifiquement à votre retour de Chine ?
En Chine continentale, je me suis penché sur la question des cotisations sociales des entreprises étrangères et des étrangers, récemment mises en vigueur. Je compte sensibiliser Xavier Bertrand dès mon retour en France sur la nécessité de négociations accélérées avec nos partenaires chinois pour mettre un terme à la double cotisation. Il s'agit d'un enjeu majeur, à la fois pour les grands groupes et pour les PME.
À Shanghai, je souhaite appuyer les négociations concernant le premier conventionnement du Shanghai East Hospital par la Caisse des Français de l'Etranger (CFE). Je suis très favorablement impressionné par la volonté des Chinois dans ce dossier. Nous devons encore effectuer un ajustement technique pour harmoniser les deux systèmes qui ne fonctionnent pas de la même manière. Par exemple sur les opérations nous facturons une somme globale, alors que les Chinois facturent à l'acte.
Et enfin à Hong Kong, je me suis occupé du projet d'extension du lycée français. J'ai eu des entretiens avec le Proviseur, la Présidente du comité exécutif et j'ai rencontré les représentants du personnel. La communauté française est sur une pente exponentielle et il y a des demandes croissantes auxquelles il faut faire face.

Christophe-André Frassa et le bureau de l'UFE Hong Kong chez Patrick Deli

Quelle est selon vous l'implication des Français à l'étranger dans les élections présidentielles et législatives en 2012 ?
"Peut mieux faire !", comme on dit à l'école. La véritable leçon qu'on pourra tirer de ces élections, au-delà des résultats, sera le taux de participation. Les Français de l'étranger ne participent pas autant qu'on le voudrait pour de nombreuses raisons. Ainsi pendant très longtemps, les Français qui se trouvaient sur le continent américain connaissaient les résultats plus tôt et ne se sentaient pas obligés de voter.
Autre facteur important, le maillage des bureaux de vote en France est avantageux, alors qu'à l'étranger les Français en sont parfois éloignés de 1.000 ou 2.000 km. J'essaie de lutter contre ce désavantage, j'ai, par exemple, pu contribuer à l'obtention d'un premier bureau de vote à Taiwan. Nous leur donnons également pour la première fois l'opportunité de voter par internet lors des législatives. Si cela fonctionne bien, il sera plus facile de réclamer l'extension de ce système aux autres élections.

Christophe-André Frassa, le Conseiller à l'AFE Francis Nizet et les membres de l'UFE Shanghai à D-Park

Vers quels changements allons-nous en 2012 avec l'élection de 11 députés des Français de l'étranger?
Tout d'abord, cela vient enfin rééquilibrer la balance de la représentation politique des Français de l'étranger au parlement car, depuis 1946 ils ne sont représentés qu'au Sénat. Quand nous voulions faire adopter un amendement, c'était comme jeter une bouteille à la mer. Certains députés acceptaient de nous aider mais simplement par amitié ou par implication. Aujourd'hui, on aura des députés en amont et en aval pour "bétonner" la position des Français de l'étranger. Il s'agissait d'une demande déjà très ancienne et force est de reconnaître que seul Nicolas Sarkozy a tenu cet engagement. Pour représenter les Français établis hors de France, nous avions déjà les élus locaux à l'AFE, des sénateurs et un secrétaire d'Etat. Ces députés pourront s'appuyer sur le réseau des élus de l'AFE qui s'occupent de zones moins larges. Ils auront une expertise plus pointue sur leur circonscription alors que les sénateurs ont une vision globale.

Et par la suite, que pensez-vous de la création d'une collectivité publique des Français de l'étranger ?
"J'en pense le plus grand bien avec mon ami Christian Cointat !" Aujourd'hui il existe une collectivité de fait. Il ne manque plus que son existence légale. Nous avons un ministre, un système éducatif, une protection sociale : tous les éléments d'une véritable collectivité. Nous n'avons pas besoin d'un territoire pour être qualifiés de "collectivité publique", il existe bien une "collectivité d'outre frontière".

L'Ambassadeur de France en Chine Sylvie Bermann, Christophe-André Frassa, le Conseiller à l'AFE Francis Nizet et Françoise Onillon à Pékin

Quelle est selon vous l'évolution probable de la communauté française en Chine ?
En Chine, la communauté française connaît une croissance exponentielle. "C'est du jamais vu !" Il y a 25 ans, il y avait 4.500 Français inscrits en Chine, aujourd'hui il y en a 44.000. On pourrait même dépasser les 50.000 selon les estimations. Quand on a fait le découpage des circonscriptions administratives on a largement dépassé la règle du plafond de population. Mais en 2012 on est déjà à plus de 100.000 Français inscrits dans la 11ème circonscription. Dans 20 ans, il faudra probablement redécouper en deux cette circonscription.
Cette évolution va obliger les pouvoirs français à mener une réflexion sérieuse sur les moyens à mettre en ?uvre pour répondre aux demandes croissantes de ces communautés françaises. Il faudra bientôt réorganiser les services de l'administration consulaire pour faire face aux requêtes concernant l'action sociale, les papiers ou l'enseignement. Il faut prévoir de nouveaux établissements scolaires à l'étranger. Il s'agit d'une des clés de l'expatriation pour les jeunes couples qui souhaitent bénéficier d'une scolarité de qualité.

Un mot pour la fin ?
Je souhaite à tous les Français de Chine et d'Asie une bonne année du Dragon ! "Kung Hei Fat Choi !!"

Propos recueillis par Laurence HURET et Clara LEONARD (www.lepetitjournal.com/hongkong.html), lundi 30 janvier 2012

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