Trois sites mémoriels cambodgiens candidats à l'inscription au patrimoine mondial

Des sites pour commémorer les victimes du régime khmer rouge

Ces sites ont été proposés par le gouvernement royal dans le cadre de la commémoration du 50ème anniversaire du début du régime khmer rouge. 

Selon le ministère de la Culture et des Beaux-Arts, la préparation de la documentation nécessaire a commencé en 2019, au nom du gouvernement royal. Les trois sites concernés sont l'ancienne prison M-13, le musée du génocide de Tuol Sleng et le centre génocidaire de Choeung Ek. Tuol Sleng et Choeung Ek sont situés à Phnom Penh, tandis que M-13 se trouve dans la province de Kampong Chhnang.

Description des trois sites mémoriels

1 - L'ancienne prison M-13. 

Située dans la province de Kampong Chhnang, l'ancienne prison M-13 a été l'un des premiers centres de détention et de torture établis par les Khmers rouges au début des années 1970. Sous le commandement de Kang Kek Ieu, connu sous le nom de "Duch", ce camp a servi de modèle pour les centres de torture ultérieurs, dont Tuol Sleng.

Parmi les détenus notables de M-13 figure l'anthropologue français François Bizot, qui y fut emprisonné pendant trois mois en 1971. Il relate cette expérience dans son livre "Le Portail", offrant un éclairage sur l'idéologie et les méthodes de Duch à cette époque.

2 - Le musée du génocide de Tuol Sleng 

Également connu sous le nom de S-21, Tuol Sleng était une ancienne école secondaire transformée en prison secrète sous le régime khmer rouge. Des milliers de Cambodgiens y ont été détenus, torturés et forcés d'avouer des crimes imaginaires avant d'être exécutés. Aujourd'hui, le site est devenu un musée mémoriel pour éduquer les générations futures sur les horreurs du génocide.

3 - Le centre génocidaire de Choeung Ek

 Situé à la périphérie de Phnom Penh, Choeung Ek est l'un des nombreux "killing fields" où les prisonniers de Tuol Sleng étaient envoyés pour être exécutés. Plus de 17 000 personnes y ont perdu la vie. Le site abrite aujourd'hui un mémorial central contenant les crânes des victimes, rappel poignant des atrocités passées.

Une candidature conjointe pour illustrer un schéma répressif organisé

Ces trois sites ont été sélectionnés dans le cadre d'une candidature conjointe, mettant en évidence le caractère planifié et cohérent des actes de torture et d'exécution perpétrés par les Khmers rouges, depuis le camp M-13 au début des années 1970.

Le décret royal prévoit non seulement la protection de ces sites historiques, mais aussi leur promotion en tant que lieux de mémoire à inscrire sur la liste du patrimoine mondial. Intitulé Sites mémoriels du Cambodge : des centres de répression à des lieux de paix et de réflexion, ce décret constitue également le titre officiel de la candidature sérielle pour le patrimoine mondial.

Trois objectifs clés pour le décret royal

Le décret royal poursuit trois objectifs principaux :

1. Protéger et préserver toutes les preuves historiques et les documents afin de servir de leçons et de souvenirs, et prévenir la répétition du génocide, des crimes contre l'humanité et des violations graves des Conventions de Genève du 12 août 1949.

2. Protéger l'environnement, les paysages historiques et les ressources naturelles des zones concernées, et développer ces régions de manière durable pour préserver leurs valeurs universelles.

3. Renforcer la sensibilisation, la recherche, l'éducation et la communication pour promouvoir la réconciliation et la paix.

Une candidature inédite et symbolique

En 2020, ces sites ont été inscrits sur la liste indicative du Cambodge pour le patrimoine mondial. La candidature officielle a été soumise en janvier 2024 après consultation d'un comité interministériel composé de 10 ministères et des administrations provinciales de Phnom Penh, Kampong Chhnang et Kampong Speu.

Le Cambodge compte déjà quatre sites inscrits au patrimoine mondial : le complexe d'Angkor, le temple de Preah Vihear, les complexes de Sambo Prei Kuk et Koh Ker. Cependant, comme l'a souligné Phoeurng Sackona, ministre de la Culture et des Beaux-Arts, « il s'agit de notre première candidature pour un site moderne et non archéologique classique ». Elle a ajouté que c'est aussi « l'une des premières au monde à concerner des sites associés à un conflit récent ».