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EXPOSITION - Entretien avec Thomas Pierre, un peintre en relief

Écrit par Lepetitjournal Cambodge
Publié le 24 avril 2013, mis à jour le 8 février 2018

 

Un espace blanc au dernier étage d'un immeuble aux allures modernes du quartier de Tuol Tompong, largement vitré surplombant l'ambassade de Chine : l'atelier de Thomas Pierre offre une grande luminosité propice à l'évasion. Le peintre, pantalon et chemise blanche s'installe au milieu d'une foule d'esquisses et de tableaux en préparation. Alors qu'une exposition est consacrée à son travail à la Metahouse à Phnom Penh, il évoque sobrement mais avec enthousiasme ses nouveaux projets et revient sur son parcours.

Pouvez-vous d'abord revenir sur votre parcours, et les tournants que vous avez pris dans votre production ?

Thomas Pierre : J'avais un fonctionnement de recherche à base de collages et de touches de peinture sur la toile, pour interroger ce qu'il y avait à voir. J'ai vécu à Berlin, et Berlin offrait une scène artistique prolifique. La proximité avec les autres peintres permet d'entrer dans des thématiques plus intellectuelles. A cette période, j'ai commencé à perforer les toiles pour redonner une géométrie, et cela pose la question amorcée par Fontana dans les années 50 : où s'arrête la peinture et où commence la sculpture ? J'avais parallèlement commencé un projet d'arrachage des affiches dans plusieurs capitales. Toutes ces interrogations conceptuelles qui nourrissent le travail des artistes en Europe, aux Etats-Unis et en Chine n'ont pas les mêmes répercussions ici.

Pouvez-vous faire un bilan de votre travail au Cambodge ?

Ma première exposition au Cambodge est une exposition collective de 14 artistes basés au Cambodge au musée des Beaux-arts. Ensuite il y a eu le salon du luxe de 2010 et de 2012, une exposition au Salon des créateurs en 2011 puis à la Chambre de commerce franco-cambodgienne, et cette année l'exposition-hommage à Vann Nath au Bophana center et l'exposition des 60 ans de Pasteur. Les deux dernières expositions sont des rétrospectives de mon travail au Cambodge ; l'une à l'institut Français et l'autre à Metahouse depuis aujourd'hui. Les images, tirées de magazine ou de publicités, que j'utilisais dans ma peinture il y a 4-5 ans venaient en superposition.

L'artiste dans son atelier. Photo © Jean-François Perigois

Au fil des projets et des expositions, votre travail s'est bien établi ici.

L'exposition de l'Institut français est un premier aboutissement ; c'est une exposition personnelle et elle représente 3 années de travail. L'évolution sur ce travail est facile à comprendre, c'est devenu plus classique. Au premier abord, ce sont des images figuratives tout à fait parlantes, que je développe avec ma technique, mes couleurs et ces reliefs. Ce qui était intéressant dans les premiers essais que j'ai fait sur les pierres d'Angkor, c'est de voir à quel point je suis passé de photos intégrées dans la toile, à des images qui ont pris presque toute la possession de la toile. On peut vraiment voir que l'image s'est agrandie de plus en plus dans ma peinture avec le temps. C'est il y a 2 ans que j'ai vraiment pris conscience qu'il fallait que j'aille dans cette voie.

Quelle nouvelle réflexion cet investissement de la toile amène-t-elle dans votre travail ?

A l'origine les images en question étaient plus des zooms sur des détails, des focus. Dans les photos plus vastes, ce qui me plaît, c'est qu'elles proposent un grand angle. Cela donne de la profondeur au tableau, tout en restant attaché aux textures et aux ornementations, aux couleurs de la pierre qui peuvent changer, qui passent du gris au vert... Au rouge quand il pleut.  Ces textures sont essentielles dans mon travail, et j'aime cette idée qu'on ne sait plus distinguer ce qui a été mangé par le temps de ce qui a été sculpté par la main de l'homme. Aujourd'hui, c'est plus la texture de la végétation et les lignes géométriques de l'architecture qui me plaisent. Cela découle de la même chose, du même intérêt. L'exposition à l'Institut français était focalisée sur les temples et des visions extérieures avec les thématiques de la pierre et du végétal auxquelles j'ai intercalé l'eau. En opposition, à la Metahouse j'ai travaillé sur une forme d'intériorité ; par des paysages intérieurs chargés de l'architecture rococo et des cours d'architecture moderne toujours avec une lumière chaude dans des tons ocre. Cette nouvelle exposition est une explosion de tout ce dont j'avais envie, c'est la première fois que j'expose autant de peintures figuratives que de peintures abstraites.

On peut qualifier votre peinture comme expressionniste, quelles sont vos nouvelles influences ?

L'expressionnisme existe toujours dans mon travail, depuis le début quand je faisais des perforations dans la toile sur des compositions abstraites. D'ailleurs la première série s'est appelée hyper expressionniste et j'y reviens doucement. Je dirais expressionniste conceptuel ; je viens de l'abstraction mais je continue à créer des textures par des effets de brillance et de relief. J'aime quand il y a une jubilation de la peinture et du geste. Et effectivement une grande référence dans ma recherche d'aujourd'hui c'est le travaille des ruines de l'artiste Hubert Robert. Le peintre des ruines. Car il n'y a pas de sujet fermé, on peut tout aborder. On croise son travail dans les grand musées nationaux comme dans les musées archéologiques et c'est intéressant de retrouver ce style de peinture, ces grandes scènes décrivant le travaille des explorateurs. Il y a dans ces ruines une altération des géométries et du détail par le temps, et une exaltation du voyage.

Propos recueillis par Yvon Chalm (www.lepetitjournal.com/cambodge) Mercredi 24 avril 2013

Perspective Exhibition, par Thomas Pierre, à la Metahouse jusqu'au 15 mai 2013
37, boulevard Sothearos - Tel : 012 834 517

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Publié le 24 avril 2013, mis à jour le 8 février 2018

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