La loi sur l’insolvabilité et la prévention de l'insolvabilité n° 85/2014 a subi de nouvelles modifications avec la publication de la loi n° 46/2023 au Journal Officiel n° 183 du 3 mars 2023. Ces modifications concernent un certain nombre d'aspects juridiques relatifs aux conditions de prolongation de la durée du concordat préventif.
Le concordat préventif est une procédure judiciaire par laquelle une entreprise confrontée à des difficultés financières importantes tente d'éviter l'insolvabilité en négociant un accord avec ses créanciers, lui permettant de rembourser ses dettes et autres obligations financières sur une période plus longue et plus pratique. Le principe est qu’à compter de la date d'ouverture du concordat, toutes les procédures d’exécution forcée[1] dirigées contre le débiteur sont automatiquement suspendues et toute nouvelle procédure est interdite, quelle que soit la nature de la créance, pendant une période de 4 mois[2]. De plus, de même que sont suspendues les procédures d’exécution forcée, les intérêts, pénalités de retard et toutes autres dépenses liées aux créances concernées sont suspendus jusqu'à l'homologation du plan de restructuration. Après l'homologation, le régime des accessoires est celui prévu par le plan.
Ainsi, en entrant dans cette procédure, la société débitrice prend des mesures pour redresser son activité, notamment en remboursant partiellement ou totalement ses dettes sur la base d'un plan de restructuration voté par les créanciers concernés et homologué par un juge-commissaire, après vérification des conditions de légalité.
Nous présentons ci-dessous les modifications apportées par la loi n° 46/2023, en reprenant brièvement les éléments clés de la procédure de concordat préventif.
nouvelles règles
Selon la loi n° 46/2023, les opérateurs économiques engagés dans une procédure de concordat préventif ouverte avant le 17 juillet 2022 ont le droit de demander une prolongation de la durée de paiement des créances établies par le concordat préventif de 24 mois supplémentaires.
Cette prolongation peut également bénéficier aux opérateurs économiques ayant déjà bénéficié de prolongations, la seule condition imposée par la loi étant que la durée totale de la procédure de concordat, prolongations comprises, soit de maximum 60 mois à compter de l'homologation du plan de restructuration.
La demande de prolongation de la durée du concordat, accompagnée de la décision de l'assemblée des créanciers concordataires[3] approuvant la prolongation, peut être formulée à tout moment par l'administrateur concordataire, jusqu'à ce que la procédure soit clôturée.
Éléments clés de la procédure de concordat préventif
- Ouverture de la procédure de concordat préventif
La procédure de concordat préventif peut être initiée par le débiteur en difficulté financière en déposant une demande auprès du tribunal compétent pour solliciter l’ouverture de la procédure. Celle-ci peut également être ouverte à la demande d'un ou plusieurs créanciers détenant une créance certaine et liquide contre le débiteur, à condition d'obtenir l’accord préalable de ce dernier.
L'ouverture de la procédure de concordat préventif est ordonnée par une décision exécutoire du juge-commissaire qui nomme également l'administrateur concordataire du débiteur. Cet administrateur dispose d'un délai de 60 jours pour élaborer ou assister le débiteur dans l'élaboration du plan de restructuration.
- Le plan de restructuration
Le plan doit être soumis à l'approbation des créanciers et à l'homologation du tribunal. Il doit prévoir des mesures concrètes pour redresser la situation du débiteur et offrir des garanties de recouvrement des sommes dues aux créanciers.
La période de négociation et de vote sur le plan de restructuration ne peut dépasser 60 jours calendaires à compter de sa date de dépôt. À tout moment pendant cette période, une demande d'homologation du plan de restructuration peut être déposée si la majorité requise par la loi est obtenue. La période de négociation et de vote peut être prolongée de 30 jours par le juge-commissaire, à la demande du débiteur ou de l'administrateur concordataire, si les créanciers ont atteint un stade suffisamment avancé de négociation et s'il existe des perspectives raisonnables d'acceptation du plan de restructuration proposé.
- Approbation du plan de restructuration
Le plan de restructuration est voté par les créanciers détenant des créances affectées, les autres n'ayant pas le droit de vote sur celui-ci. Si le plan est approuvé par ces créanciers, le débiteur demande au juge-commissaire de l'homologuer.
Le plan de restructuration, approuvé par les créanciers et confirmé par le juge-commissaire, est ensuite communiqué aux créanciers affectés et aux créanciers titulaires de créances non affectées, par l'intermédiaire de l'administrateur concordataire, dans un délai de 48 heures à compter du prononcé de la décision.
La modification du plan de restructuration, en ce compris sa prolongation, peut être effectuée à tout moment au cours de la procédure, sans que la durée totale maximale de mise en œuvre du plan ne puisse être dépassée. La modification du plan et le vote de cette modification seront effectués dans les mêmes conditions que l'élaboration et le vote du plan, en fonction des créances affectées toujours impayées à la date du vote. Cette modification devra être homologuée par le juge-commissaire.
- Mise en œuvre du plan de restructuration
Après l'approbation du plan de restructuration, le débiteur doit respecter ses engagements et mettre en œuvre les mesures prévues pour maintenir sa viabilité financière et éviter la faillite.
Un plan de restructuration confirmé est opposable à tous les créanciers, y compris ceux qui ont voté contre ou qui n'ont pas exprimé leur vote à son sujet.
Dans l'exercice de ses fonctions de surveillance du plan de restructuration, l'administrateur concordataire communique aux créanciers concernés par le plan un rapport d'analyse trimestriel présentant la manière dont il est mis en œuvre et indiquant comment, grâce à lui, l'activité reste viable.
La procédure de concordat préventif se clôture par décision du juge-commissaire dans les cas suivants : soit les dispositions du plan de restructuration ont été mises en œuvre et la procédure est clôturée avec succès à la demande de toute partie ou de l'administrateur concordataire, soit le plan a échoué et le débiteur revient à sa situation antérieure.
Dans ce dernier cas, les éventuelles créances réduites renaissent à la date du prononcé de la décision de clôture de la procédure, diminuées selon les paiements effectués au cours de la procédure de concordat préventif. Les créanciers dont la perception d'intérêts, de majorations, de pénalités de toute nature ou de tous frais entrant dans la catégorie des accessoires avait été suspendue par le plan de restructuration peuvent calculer les accessoires rétroactivement sur la durée de mise en œuvre du plan.
Important ! Après l'homologation du plan de restructuration et jusqu'à la clôture de la procédure de concordat préventif :
- le débiteur ne peut pas bénéficier d’une autre procédure de prévention de l'insolvabilité
- la procédure d'insolvabilité ne peut être ouverte à la demande de l'un des créanciers concernés.
En conclusion, il convient de souligner que la procédure de concordat préventif peut varier en fonction des circonstances de chaque situation spécifique et peut impliquer d'autres éléments ou étapes supplémentaires. Les éléments présentés ci-dessus sont les plus importants, conformément à la loi n° 85/2014 dans sa version modifiée.
Enfin, il est important de noter que les dernières modifications législatives apportent leur soutien aux entreprises qui rencontrent des difficultés en leur accordant des leviers efficaces pour poursuivre leur activité, leur permettant de restructurer leurs affaires et d'éviter l'insolvabilité.
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Nous espérons que ces informations vous ont été utiles !
[1] Par exception à cette règle, l'exécution forcée des créances salariales n'est pas suspendue de droit. Elle peut être suspendue par le juge-commissaire, à la demande du débiteur, si celui-ci prouve sa capacité à payer les sommes en question, même de manière échelonnée, au moins pour le montant qui serait récupéré via la procédure d'exécution forcée.
[2] Pour des motifs valables, à la demande du débiteur, d'un créancier ou de l'administrateur concordataire, le juge-commissaire peut ordonner la prolongation de la suspension des procédures d’exécution forcée ou accorder une nouvelle suspension pour une ou plusieurs périodes déterminées. La durée totale de la suspension, avec prolongations et renouvellements, ne peut pas dépasser 12 mois à compter de la date d'ouverture de la procédure de concordat préventif.
[3] Les créanciers concordataires qui ont voté contre la prolongation du concordat préventif, ainsi que les créanciers non concordataires, peuvent formuler une demande d'ouverture d’une procédure d'insolvabilité à l'encontre du débiteur.