

Pour la première fois dans l'histoire de la Bolivie, un indien, Evo Morales, est devenu Président du pays. Porte-parole des paysans producteurs de coca et bête noire de Washington, Don Evo rêve de "refonder"ce pays andin de 9 millions d'habitants et de mettre fin à"l'état colonial"créépar les multinationales
Evo Morales est le premier Bolivien d'origine indigène àaccéder àla présidence du pays (Photo : AFP)
Depuis l'indépendance de la Bolivie, voilà180 ans, jamais un indien n'était parvenu àse faire élire àla tête du pays. C'est désormais chose faite. Evo Morales, membre de l'ethnie aymara, a largement remportéhier le scrutin de l'élection présidentielle bolivienne. Il devient le premier chef d'Etat indigène de ce pays andin de 8,5 millions d'habitants, le plus pauvre d'Amérique latine.
Sans même attendre les résultats définitifs, ses principaux adversaires (dont le libéral Jorge Quiroga) ont reconnu leur défaite. D'après un décompte indépendant de l'institut péruvien Apoyo Opinion y Mercado, Evo Morales aurait en effet réuni entre 50% et 51% des suffrages. Et même s'il n'obtenait pas la majoritérequise pour être élu lors de ce scrutin àun tour, le Congrès bolivien, qui se réunirait àla mi-janvier pour désigner le Président, ne pourrait qu'entériner sa victoire.
Le représentant de la culture paysanne et indigène
Pour Don Evo, comme le surnomment ses supporters, ces résultats constituent une revanche. Candidat du Mouvement vers le socialisme (MAS), un parti de gauche àforte connotation antilibérale, et porte-parole des paysans planteurs de coca, Morales représente en effet la culture paysanne et indigène de l'Altiplano, majoritaire en Bolivie, mais depuis toujours marginalisée par le pouvoir.
Bête noire des Etats-Unis depuis plusieurs années, qui avaient tout fait pour le discréditer lors de l'élection présidentielle de 2002, celui qui se décrit régulièrement comme un indien "moche àbec de perroquet"a réussi le tour de force d'être porté, cette fois-ci par les cocaleros (producteurs de coca) mais aussi par une large part des mestizos (les métis), voire par certaines franges de la population blanche. Et donc de gagner en crédibilité.
Un pays ami de moins pour les Etats-Unis
"A partir de demain commencera vraiment la nouvelle histoire de la Bolivie, une histoire oùnous serons en quête de l'égalité, la justice, l'équité, la paix et la justice sociale", a réagi le leader syndicaliste, âgéde 46 ans, àl'annonce des résultats? avant de s'attaquer, dans son discours, àla politique impérialiste des Etats-Unis.
Depuis toujours, le syndicaliste ? qui dédaigne allégrement les vestes/cravates et affiche ostensiblement son soutien àHugo Chavez? prône en effet une véritable "refondation"de la Bolivie. En clair : la mise àpied de la politique d'éradication de la coca prônée par Washington, et la mise sous tutelle des multinationales opérant en Bolivie, notamment dans le secteur du gaz.
Après le Venezuela d'Hugo Chavez, l'Argentine de Nestor Kirchner, ou encore le Brésil de Lula? la pilule, hier soir, devait être amère àavaler pour Washington, qui compte ses amis dans la région.
Valentin BONTEMPS. (LPJ) 20 décembre 2005
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Le Monde, Les multinationales restent prudentes après la victoire d'Evo Morales en Bolivie
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Le Figaro, La nouvelle bête noire de Washington


































