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Plata o Hippo ? Les hippopotames de Pablo Escobar

Pablo Escobar accompagné d'un hippopotame. Crédit montage: https://wukali.com/Pablo Escobar accompagné d'un hippopotame. Crédit montage: https://wukali.com/
Crédit montage: https://wukali.com/
Écrit par Claudia Chaminade
Publié le 9 mars 2023

Plata o Hippo ? Les hippopotames de Pablo Escobar

Un scénario digne d’un film, entre trafics de drogue, délires mégalo et enjeux réels pour la biodiversité du pays.

L’arrivée des hippopotames en Colombie

L'arrivée des hippopotames à Medellin
Crédit: www.infobae.com 

 

En 1980, Pablo Escobar, baron de la drogue colombien, chef du cartel de Medellin, fait importer illégalement quatre hippopotames en provenance d’Afrique. Pablo a un projet fou, se faire construire un zoo privé au sein de sa demeure la plus emblématique, l’hacienda Nápoles. Le projet avoisine les deux millions de dollars et ne compte pas loin de 1900 espèces d’animaux exotiques dont la plupart ne sont pas endémiques ou endogènes.

 

Pablo Escobar à Dallas, achetant les animaux dans un ancien zoo
Crédit: Juan Pablo, dans le livre "Pablo Escobar, mon père"

 

Rhinocéros, éléphants, girafes, autruches, kangourous, zèbres, oiseaux exotiques du monde entier. Une véritable « arche de Noé » arrivée en Colombie par bateau et avion, financée par l’argent sale du trafic international de cocaïne.

A l’issue de 20 ans de narcotrafics, de l’assassinat de milliers de personnes et de 18 mois de traque acharnée menée par les membres du Bloc de Recherche, par les agences de renseignements colombiens et américains et par les soldats d'élite, « El Patrón » est abattu à l’âge de 44 ans le 2 décembre 1993 à Medellin.

L’empire du « roi de la cocaïne » s’effondre.

Pablo Escobar abattu le 2 décembre 1993 sur les toits de Medellin
Crédit: AFP/Archives

 

La présence des hippopotames en Colombie : des impacts graves sur la biodiversité du pays

A la mort de Pablo Escobar, son ranch « Nápoles » est pillé et laissé à l’abandon. La plupart des animaux importés illégalement sur le territoire meurent ou sont vendus à des zoos.

Les hippopotames, eux, bien trop lourds et dangereux à transporter, s’échappent et trouvent refuge en toute liberté dans le Rio Magdalena et ses environs. Les pachydermes n’étant pas présents naturellement sur le territoire sud-américain, ils deviennent une attraction locale qui se monétise.  

Seulement, un problème se pose, ils se reproduisent en grand nombre, passant de 4 espèces il y a 30 ans à environ 130 aujourd’hui. A ce rythme et selon les estimations des scientifiques, il est question d’une prolifération de la race qui atteindrait 400 hippopotames d’ici la prochaine décennie si aucune action n’est engagée.

La présence de ces animaux engendre des conséquences catastrophiques pour l’écosystème local et les populations avoisinantes. Ils sont considérés officiellement par le gouvernement colombien comme une espèce invasive dans la mesure où ils ne font face à aucun prédateur. Leur invasion met à mal les équilibres de biodiversité. Les hippopotames éradiquent entre autres la présence d’animaux comme les Lamantins ou les Capibaras, sans compter les tonnes d’excréments qu’ils déversent dans le fleuve Magdalena, polluant rivières et affluents. Habitants de la zone et pêcheurs sont aussi impactés par la modification chimique des cours d’eau mettant en péril leur santé.

Certaines études vont à l'encontre de ces arguments, attestant plutôt du potentiel que ces animaux représenteraient dans le remodelage du paysage aidé par leur poids imposant facilitant le piétinement des terres et le transfert des nutriments du sol vers l'eau et favorisant la croissance de nouvelles plantes.

Hippopotames dans le fleuve Magdalena
Crédit: www.ulyces.co

 

Après des années de débats, de guerre juridique et d’études scientifiques, la solution au problème des hippopotames a enfin été trouvée.

Pour le gouvernement colombien, il fut un temps question de les abattre pour assurer à long terme la protection de l’écosystème local. C’était sans compter l’intervention inédite d’un tribunal américain, soutenu par les associations de défense des animaux, reconnaissant pour la première fois de son histoire, la personnalité juridique aux animaux, en l'occurrence ici, nos amis les hippos. Les exterminer reviendrait donc à commettre un meurtre : une image néfaste dont la Colombie n’a pas besoin.

S’en suit un programme long et coûteux de stérilisation, ayant permis de traiter une cinquantaine d’espèces. La tâche n’est pas simple, le vaccin contraceptif Gonacon, entraînant une stérilité temporaire, doit être injecté à intervalles réguliers. De quoi donner migraines et sueurs froides aux vétérinaires colombiens compte tenu des risques encourus face à l’extrême dangerosité de l’animal. Le programme de stérilisation ne suffira pas.

7 mars 2023 : la solution est trouvée. Le gouverneur de la région Antioca, Anibal Gaviria, l’a annoncé.

Les hippopotames vont voyager. Un accord a été trouvé avec l’Inde et le Mexique qui s’engageraient à accueillir environ 70 animaux. Selon les informations diffusées sur RFI « 60 hippopotames seraient envoyés au Greens Zoological Rescue & Rehabilitation Kingdom dans le Gujarat, en Inde. Dix autres iraient au Mexique. L'Équateur, les Philippines et le Botswana auraient également exprimé leur volonté de relocaliser les hippopotames colombiens dans leurs pays ».

Le défenseur de l’environnement mexicain et Président de l’association des zoos, écloseries et aquariums du Mexique, Ernesto Zazueta, également responsable du plan de financement pour la protection des hippopotames de Colombie, l’assure, tout est planifié pour accueillir les animaux avec soin et respect.

Les Hippos de Pablo sont voués à être sauvés !

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