Née en 1960 dans l'ancienne capitale royale de Mandalay, Phyu Mon a grandi un stylo entre les mains. Depuis l'âge de 12 ans, elle dessine, peint, crée. Adolescente, elle a également écrit des poèmes et des histoires courtes. Arrivée à l’âge adulte, son travail s’est tourné vers l'art multimédia.
Rencontre
En tant que première performeuse féminine au Myanmar, mais aussi pour son art numérique, Phyu Mon est considérée comme l'une des artistes conceptuelles les plus connues du pays. La photographie numérique et l’art visuel sont à Phyu Mon ce que le pinceau et la toile sont au peintre. Quand on lui demande ses sujets de prédilection, l’artiste nous répond avec passion : "l’opposition binaire restriction/liberté est un leitmotiv dans mon travail". Depuis 1985, Phyu Mon expose ses peintures et écrit des poèmes.
Des centaines
Pourtant, elle a développé un vif intérêt pour l'art conceptuel grâce à son mari, Chan Aye, qui l'a encouragée à se tourner vers l’art numérique contemporain. Cette nouvelle forme d’expression, Phyu Mon l’avait étudiée grâce à un programme organisé par l'Université de Finlande ; ce qui lui a permis de travailler librement sur plusieurs thèmes, en particulier ceux qui concernent les questions liées aux femmes birmanes. Explorer des zones souvent fracturées par des préjugés, des philosophies culturelles, la position subalterne des femmes et les réalités économiques auxquelles se confronte la Birmanie, voilà ce qui pousse notre artiste à se surpasser, création après création. "En 1962, peu de temps après ma naissance, la junte militaire a pris le pouvoir en Birmanie et l'a conservé jusqu'en 2011. Au cours de ces années sombres, les droits de l'homme ont été violés et une sévère censure a empêché toute forme d'expression libre. Depuis 1985, en tant que femme artiste, j'ai créé des œuvres d'art qui témoignent de problèmes sociétaux dans mon pays", explique cette femme courage.
La vague artistique
Alors que la pratique de l'art féminin au Myanmar pouvait être qualifiée d'ambiguë à ses débuts, Phyu Mon a multiplié ses supports, mélangeant œuvres d'art numérique, performance, vidéo et art sonore. "Ma première exposition au Myanmar a été un échec. Personne n'a compris mon travail. J'ai été confrontée aux mêmes défis que d'autres femmes artistes asiatiques, y compris être considérée comme inférieure aux artistes masculins. Heureusement, ma famille m’a beaucoup soutenue", se souvient cette mère de famille. Mais cette battante a eu sa revanche. Japon, Thaïlande, Corée, Chine, Malaisie, Cambodge, Danemark, Espagne, États-Unis, Royaume-Uni, France,… Tous ces pays ont depuis accueilli les créations de Phyu Mon. Et comme pour embellir le tableau, la Fondation Prince Cloud l'a invitée au Symposium des Pays-Bas en 2011 et en 2015. "Ma photographie consiste à dévoiler les rêves, à pousser les limites de l'imagination, à donner à la créativité un sens nouveau", explique Phyu Mon. Ses dernières expositions ont eu lieu à la galerie One East Asia à Singapour et à la Karin Weber Art Gallery à Hong Kong en mars 2017.
Vent bleu
Comme la brise qui se transforme en cyclone, Phyu Mon est une artiste qui s’engage au-delà de ses propres œuvres et pour ce faire, elle a fondé l’association Blue Wind Art. "Blue Wind est composée de femmes artistes. C’est une association libre qui organise des activités artistiques tous les ans". En 2009, le Musée national du Myanmar a accueilli Blue Wind pour sa toute première action : une exposition d’œuvres de 58 artistes, exclusivement féminines. "Nous avons apporté à l’art une lumière bleue sous la forme d'une brise. C’est cette brise qui portera la lumière de l'art au cœur de chaque peuple". Voilà comment Phyu Mon décrit avec métaphore et douceur son association et les enjeux de son métier.