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Retour sur la visite d’Annalena Baerbock dans les Balkans

Annalena Baerbock discoursAnnalena Baerbock discours
© Welt - YouTube
Écrit par Ludovic Tölg
Publié le 15 mars 2022, mis à jour le 21 mars 2022

Jeudi dernier, la ministre des Affaires étrangères allemande s’est rendue dans les Balkans pour y rappeler l’importance de l’Etat de droit pour les pays de la région qui veulent rejoindre l’UE.

 

Une première rencontre à Sarajevo

C’est à Sarajevo qu’Annalena Baerbock a atterri jeudi dernier pour entamer sa tournée. Cette visite dans la capitale de Bosnie-Herzégovine lui a permis de rencontrer son homologue bosnienne, Bisera Turković. A l’issue de l’entretien entre les deux cheffes de la diplomatie, la ministre allemande a tenu à rappeler l’importance d’une garantie de paix dans le pays :

 

Nous devons assurer la paix ici en Bosnie et nous devons nous battre contre ceux qui mettent en péril la paix. Nous ne permettrons pas que la paix soit mise en danger. [...] J’apporte un message très clair : l’Allemagne sera plus présente ici, dans votre pays et dans les Balkans occidentaux.

 

Depuis 1995 et la fin de la guerre de Bosnie, le pays est divisé en deux parties. D’un côté, une entité serbe appelée "Republika Srpska" et de l’autre, une entité croato-musulmane. Les deux parties dépendent toutefois d’un parlement national commun. Depuis l’invasion russe en Ukraine le 24 février, l’Allemagne craint un regain des velléités sécessionnistes de l’entité serbe en Bosnie, en raison des rapports étroits entre les pouvoirs serbe et russe. Poutine pourrait d’ailleurs soutenir les territoires séparatistes de la région afin d’affaiblir le pouvoir bosnien en place et troubler la stabilité politique du moment.

 

Milorad Dodik, chef politique de la "Republika Sprska", a démenti toute volonté sécessionniste sur son territoire. Pour Bisera Turković, la réalité est tout autre. Selon elle, le mouvement sécessionniste est de plus en plus visible depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie. L’Union européenne a donc prévu de renforcer les effectifs de ses troupes Althea, dont l’objectif est d’empêcher tout conflit dans la région et de garantir l’accord de paix signé entre les deux entités au lendemain de la guerre de Bosnie.

 

La Serbie puis le Kosovo

La cheffe de la diplomatie allemande s’est ensuite rendue dans la capitale serbe vendredi après-midi. Après sa rencontre avec le président serbe Aleksandar Vučić, Annalena Baerbock a rappelé que l’Allemagne avait fait de l’adhésion de la Serbie et des autres Etats des Balkans à l’Union européenne une de ses priorités. Berlin a appelé les dirigeants serbes à agir pour un Etat de droit si la Serbie compte intégrer l’UE. Après les élections présidentielles serbes le 3 avril prochain, l’Allemagne souhaite contribuer au rapprochement entre la Serbie et le Kosovo et rompre avec les tensions qui existent entre les deux Etats depuis la fin de la guerre de Yougoslavie en 2001.

 

La visite de la ministre des Affaires étrangères allemande à Belgrade poursuivait aussi un autre objectif. Il s’agissait d’obtenir des clarifications concernant la position serbe par rapport à la guerre en Ukraine. Le président serbe Aleksandar Vučić a entretenu par le passé de très bonnes relations avec Poutine, ce qui inquiète l’Allemagne et l’UE. Baerbock a néanmoins souligné le soutien apporté par la Serbie à la résolution condamnant l’invasion russe à l’Assemblée générale de l’ONU, mais l’Etat serbe ne s’est pas associé aux sanctions de l’UE. Bon nombre de médias serbes, proches de Vučić, diffusent la propagande de guerre de Moscou, ce qui interroge la position de cet Etat sur la guerre en Ukraine.

 

De son côté, le président Vučić a répondu que la Serbie soutenait l'intégrité territoriale de l’Ukraine, et a assuré ne pas avoir eu de contacts avec Vladimir Poutine depuis le début de la guerre. Il a ensuite affirmé ne pas comprendre les accusations de proximité entre son homologue russe et lui-même, et a demandé en quoi la Serbie était impliquée dans cette guerre.

 

Après cette halte à Belgrade, la cheffe de la diplomatie allemande est arrivée au Kosovo le même jour. Elle s’est entretenue avec le Premier ministre Albin Kurti à Pristina, la capitale du pays. En rappelant l’importance du maintien de l’Etat de droit au Kosovo, Annalena Baerbock a évoqué l’influence russe sur les sécessionnistes serbes du pays et les conséquences que les dires de Poutine pourraient avoir sur le Kosovo. Tout comme la Serbie, le pays est divisé en deux : on trouve au nord la population serbe et au sud la population albanaise.

 

Baerbock a ensuite reconnu les efforts fournis par le Kosovo pour espérer intégrer l’UE, mais estimant qu’il fallait faire mieux. Selon elle, l’élection d’un nouveau président en France pourrait faciliter cette adhésion. Jusqu’à présent, Emmanuel Macron n’était pas favorable à l'entrée du Kosovo dans l’UE.

 

Une ultime visite en Moldavie, à la frontière avec l’Ukraine

Le dernier déplacement de la ministre fédérale était en Moldavie, samedi dernier. Depuis le début de la guerre, le pays voit de nombreux ukrainiens passer la frontière pour fuir l’invasion des troupes russes. Par sa visite, Annalena Baerbock souhaitait étudier les possibilités d’aides que l’Allemagne pouvait accorder à l’Etat moldave. La ministre a rencontré son homologue Nicu Popescu. Afin de rassurer le peuple et ses dirigeants moldaves, elle a déclaré que l’Allemagne empêchera "que les ondes de choc provoquées par la Russie se propagent à d’autres pays d’Europe".

 

Tout comme la Bosnie et le Kosovo, des groupes moldaves de Transnistrie veulent faire sécession depuis plusieurs années. Ceux-ci sont soutenus par Moscou depuis la chute de l’URSS.
Là encore, un éventuel discours de Poutine soutenant la sécession de la Transnistrie pourrait troubler l’ordre politique de la Moldavie et faire renaître un conflit dans la région.

 

Un voyage pour réaffirmer la puissance allemande sur la scène internationale 

Dans un contexte de risque de sécessions accru par l’invasion russe et le discours du Kremlin, Annalena Baerbock avait pour mission de rappeler le poids de l’Allemagne mais aussi de l’UE sur la scène internationale, et de mettre en place de nouvelles mesures pour soutenir les différents gouvernements des Balkans. La ministre a donc annoncé la création d’un poste d’envoyé spécial dans les Balkans occidentaux, qui sera en charge d’informer le gouvernement allemand sur l’évolution de la situation en Serbie notamment. Manuel Sarrazin devra veiller au bon respect de l’Etat de droit dans la région.

 

 

Pour la cheffe de la diplomatie allemande, Berlin doit accroître sa présence dans la région pour éviter de nouveaux conflits et accompagner les Balkans occidentaux vers l’adhésion à l’UE. L'engagement allemand pourrait surprendre tant la République fédérale est considérée comme un "nain politique". On pourrait aussi s’interroger sur le rôle de Baerbock lors de cette visite. Etait-elle envoyée seulement par Berlin ou bien également par l’Union européenne ? En tous les cas, le discours tenu par la ministre durant cette tournée a aussi rappelé que l’Allemagne était bien la première puissance de l’UE.

 

 

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