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10000 agriculteurs manifestent dans les rues de Berlin

Ce lundi 15 janvier, des agriculteurs investissent les rues berlinoises et protestent contre les mesures budgétaires du gouvernement qui suppriment leurs avantages fiscaux sur le diesel.

Tracteurs devant la porte de BrandebourgTracteurs devant la porte de Brandebourg
© Emma Granier - LPJ Allemagne
Écrit par Agnès Blanc-Dubreuil
Publié le 15 janvier 2024

Les tracteurs ont commencé à arriver dès ce dimanche dans la capitale. Le parcours de la manifestation prend la forme d’une étoile avec 5 routes qui convergent vers la Platz des 18. März devant la porte de Brandeburg. La police avait annoncé attendre près de 5000 véhicules et 10 000 participants, mais la participation semble plus importante que prévu. La Strasse des 17. Juni ainsi que la Ebertstrasse ont été fermées à la circulation. 

 

Une colère suscitée par les mesures du ministère des Finances

D'où vient cette opposition de la part d'un groupe qui ne se fait pas entendre si souvent en Allemagne ? Des annonces du gouvernement au mois de décembre concernant les coupes budgétaires devaient faire respecter un déficit de l’Etat fédéral à 0,35% du PIB. Devant la protestation virulente qui s’est immédiatement élevée, le gouvernement a fait marche arrière sur la mesure qui devait supprimer l’exonération fiscale sur les véhicules agricoles.

En revanche, c’est une autre suppression de subvention qui est encore au cœur des revendications actuelles : les avantages fiscaux sur le diesel utilisé par les agriculteurs. Le ministre des Finances Christian Lindner (FDP) a proposé d’échelonner la mise en application sur trois ans afin d’adoucir ses effets pour les exploitations. Mais les professionnels disent craindre pour la survie de beaucoup d’entreprises, notamment car ces changements trop brutaux bouleversent les plans économiques des agriculteurs. Le coût annuel de cette loi reviendrait en moyenne à 30 000 euros par exploitation.

 

Agriculteurs manifestant à Berlin
© Emma Granier - LPJ Allemagne

 

Le gouvernement dans une position difficile

Si Christian Lindner a montré des signes de bonne volonté en annulant une partie des annonces de décembre, il ne semble pas prêt à revenir entièrement sur les décisions prises. Devoir renoncer aux coupes budgétaires qui mettent à contribution les agriculteurs serait un revers politique grave pour la coalition. Le ministre de l’Agriculture Cem Özdemir (Grüne), critiqué pour sa prudence, a pour sa part tenté d’apaiser la colère populaire en proposant d’instaurer une taxe sur certains produits agricoles comme les œufs ou le lait, supportée par les consommateurs, qui serait reversée à certains agriculteurs. Cette idée a reçu le soutien de membres de la FDP comme la députée Carina Konrad, puisqu’une hausse légère du prix au kilo de certains produits se traduirait par des aides financières conséquences aux exploitations.

Dans le même temps, la SPD commence à faire face à des critiques en interne, et le Chancelier Scholz assiste à une hausse inédite de son impopularité. Les manifestations d’aujourd’hui sont soutenues par près de 70% des allemands. Le secteur agricole jouit d’une certaine sympathie auprès de la population, il revendique l’importance d’une production alimentaire nationale et demande donc plus de reconnaissance. Le président du syndicat agricole Deutscher Bauernverband, Joachim Rukwied, a déclaré que le compromis mis sur la table à l’heure actuelle n’était « pas une solution » et que les protestations allaient se poursuivre.

 

 

Quelle issue au conflit ?

Le gouvernement se doit de laisser un dialogue ouvert pour ne pas finir dans une impasse. La loi dans son état actuel peut encore changer, car elle doit être votée fin janvier par le Bundestag et va faire l’objet de débats parlementaires. Mais elle a déjà suscité beaucoup de dissensions au sein des trois partis au pouvoir, qui se sont difficilement mis d’accord sur comment combler le déficit budgétaire 2024 de 17 milliards d’euros. L'Ampel (coalition actuelle) tente de trouver une position intermédiaire sans céder aux critiques qui l'accusent de porter un coup trop dur à l'agriculture et la sylviculture allemande.

Beaucoup s'alarment par ailleurs de la tournure plus radicale que les manifestations ont pris à certains endroits, avec notamment des actes de violence. Le bloquage du ferry sur lequel se trouvait le ministre de l’Économie Robert Habeck (Grüne), la semaine dernière, a été très critiqué. Des potences sont utilisées symboliquement par certains manifestants en bord des autoroutes. Olaf Scholz s’est déclaré inquiet d’une instrumentalisation par l’extrême droite, entre autre l’AfD et des groupuscules plus extrémistes, des protestations qui se tiennent. Les thèses de l'extrême droite sur le sujet sont largement reprises au sein des manifestants et sur les réseaux sociaux.

 

 

 

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photo Agnès
Publié le 15 janvier 2024, mis à jour le 15 janvier 2024

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