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Tech: "Il manque à Barcelone : des financements et des talents"

Guillaume Rostand président French Tech BarceloneGuillaume Rostand président French Tech Barcelone
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Écrit par Lepetitjournal Barcelone
Publié le 15 juillet 2019, mis à jour le 16 juillet 2019

Guillaume Rostand, nouveau président de la French Tech de Barcelone, directeur marketing du site Liligo, revient sur l'environnement Tech spécifique à Barcelone, ses opportunités, ses liens avec l'entrepreneuriat français et les progrès nécessaires pour que la 5e ville en termes de nombre de startups en Europe, devienne une destination plus attractive encore.

 

Pouvez-vous revenir sur votre parcours professionnel et vos liens avec l’univers des startupers ?

J’occupe depuis 2008 des fonctions de directeur marketing dans des startups et des entreprises de taille moyenne. J’ai toujours travaillé dans le digital et le e-commerce en particulier en commençant ma carrière chez eBay France il y a 13 ans. Après eBay je suis parti pour la Chine où j’ai passé 18 mois, avant d’atterrir à Barcelone où je vis depuis 8 ans. Depuis bientôt 2 ans je suis à la tête du marketing du site Liligo, qui appartient au groupe eDreams Odigeo.

Le lien avec le monde des startups et de leurs créateurs est consubstantiel du type de postes que j’ai occupés. En bientôt 15 ans j’ai rencontré et fréquenté énormément d’entrepreneurs -avec qui et pour qui j’ai travaillé, que j’ai conseillé, pour qui j’ai été un client et dont je suis souvent devenu ami. 

En parallèle de mes fonctions j’ai toujours pris du temps pour aider des startups -et notamment lorsque leurs fondateurs se sont posé la question de s’installer à Barcelone. Enfin, j’ai investi à titre personnel dans une dizaine de ces startups et dédie un maximum de temps à les aider dans leur développement.

 
D'où naît cet intérêt pour l’entrepreneuriat ?

Tout d’abord un lien familial : mes parents sont des entrepreneurs et travaillent ensemble depuis 20 ans pendant lesquels ils ont créé ou repris quatre entreprises. Ils viennent de céder leur dernière activité mais sont toujours très actifs et préparent encore de nouvelles aventures.

Et puis il existe dans l’univers du digital dans lequel j’évolue une injonction à créer sa propre boîte. Et, de fait -de ce fait en partie- j’ai passé deux années à participer à la création d’entreprises, avant de rejoindre Liligo : j’ai vécu une série d’échecs et de succès qui m’ont permis d’expérimenter et de démystifier la réalité et le statut du créateur d’entreprise. 

Je dirais qu’aujourd’hui j’entretiens des liens rassérénés avec l’entrepreneuriat, sans exclure de retenter un jour l’aventure, conscient de n’être peut-être pas le meilleur numéro 1, mais certainement un numéro 2 expérimenté.


Quelle importance accordez-vous à cette relation startup / entreprise "corporate" ?

Elle est essentielle dans la mesure où chacun a besoin de l’autre pour se développer. Il y a cependant un phénomène d’attraction paradoxale entre le monde des startups et celui du corporate.

D’un côté les startupers lancent leurs boîtes pour réinventer un modèle que les grands groupes font évoluer lentement, mus souvent par la déception ou l’ennui d’évoluer dans des univers contraints par des jeux politiques, motivés aussi par l’ambition de créer un produit unique -et évidemment d’en retirer une satisfaction personnelle, sociale et financière. Cela étant, bien que désireux de s’éloigner du monde corporate, les startupers en ont besoin non seulement pour vendre leurs services, mais aussi pour réaliser leurs sorties. Et du coup, ils finissent souvent par revenir dans le monde qu’ils ont cherché à fuir.

De l’autre les corporates voient les startups comme de drôles de petites bêtes qui peuvent tour à tour les menacer et les attirer -parfois au-delà du raisonnable, justement parce qu’elles sont plus agiles, flexibles, et apurées des bureaucraties qui souvent minent les grosses boîtes. 

Il en ressort que le mariage -souvent inévitable- entre grands groupes et startups est une alchimie complexe qui réussit rarement. 


La sphère catalane, et plus particulièrement barcelonaise, est-elle favorable au développement de hubs technologiques ? Quid du reste de l’Espagne ? Qu’est ce qui pourrait être amélioré ?

Barcelone a tous les atouts pour devenir un Hub Tech de référence en Europe -elle est du reste la 5e ville en termes de nombre de startups en Europe. Cela est lié à sa situation géographique, à la qualité de vie qu’elle offre et à la liquidité du marché du travail -à la simplicité du droit du travail aussi. Ajoutons bien sûr le travail de la Generalitat -via Accio ou Barcelona Global, qui oeuvre à attirer talents et entreprises à Barcelone. 

Cela étant, il manque à mon sens deux choses essentielles à Barcelone : des financements et des talents. Pour faire émerger des scale-ups et des licornes, il faudrait que plus de fonds d’investissements internationaux -français bien sûr mais aussi anglo-saxons et pourquoi pas chinois- s’installent ici. Ainsi les startups auraient un accès facilité à plus de capitaux, ce qui est encore difficile aujourd’hui, du moins pour des séries A ou B où on parle parfois en centaines de millions d’euros. 
Pour les talents, bien que Barcelone soit extrêmement attractive, je vois autour de moi beaucoup de boîtes qui ont du mal à recruter localement des C-level et top managers, et les faire venir depuis l’étranger est parfois fastidieux. 
Je suis néanmoins très optimiste : les choses changent vite et, à l’image des levées de Travel Perk ou Glovo, les deux dernières années ont été exceptionnelles pour la scène tech Barcelone et pleines de promesses pour l’avenir.

En dehors de la capitale catalane on peut évidemment citer Madrid et Valence qui offrent un écosystème propice au développement des entreprises de la tech.

 
Quelles relations transfrontalières observez-vous à cet égard entre la France et l’Espagne ?

Il y a de très fortes relations entre la France et l’Espagne. D’une part parce que le marché espagnol est très souvent le premier sur lequel les startups françaises lancent leur expansion internationale une fois arrivées à maturité en France. Ainsi Payfit, Welcome to the Jungle… sont arrivées dans les 18 derniers mois et commencent à réellement se développer ici.

D’autre part parce que l’Espagne et tout particulièrement Barcelone offre une fantastique "base arrière" à nombre de boîtes françaises, comme on a pu le voir avec l’arrivée de Critéo ou, plus récemment, de Papernest. Parce qu’il y a beaucoup de francophones et que le turnover se gère plus facilement, notamment pour les fonctions de services clients. 

Enfin de nombreux entrepreneurs installent leurs familles ici et commutent chaque semaines avec Paris -la proximité de l’aéroport et le nombre de rotations permettent de vivre la vie barcelonaise tout en continuant à travailler en France. C’est une tendance qui se confirme d’année en année.

À présent je pense qu’il est important de favoriser le mouvement inverse : faire venir plus d’entreprises tech espagnoles en France et les aider à se développer sur ce marché. C’est l’une des missions de la French Tech.


Pourquoi avoir choisi de s’investir au sein de la French Tech v2 ?

Ce choix a été assez simple à faire pour moi, diriger la French Tech V2 me permet de lier deux éléments qui me passionnent : Barcelone et les entreprises technologiques. Depuis 8 ans j’ai assisté à l’arrivée et à la création de beaucoup de startups françaises. Comme beaucoup, j’ai constaté qu’il manquait une entité qui permettrait de faire le lien entre cet écosystème et non seulement la France (ses fonds, ses talents, son administration) mais aussi les autres capitales technologiques mondiales. La création de la French Tech Barcelone il y a 3 ans a été un changement significatif et poursuivre l’œuvre du premier board est pour moi une réelle fierté en même temps qu’il est un vrai challenge.

Le fait qu’il existe aujourd’hui 48 antennes internationales de la French Tech est une formidable opportunité pour aider nos pépites locales à se développer. De même que nous pouvons et devons aider les startups espagnoles à s’installer et se développer en France, nous sommes les mieux placés pour repérer et accompagner ces entreprises.

Nous sommes pour la plupart des exilés balnéaires mais nos liens avec la France sont toujours très forts et si je peux aider à faire rayonner notre pays et à aider un écosystème auquel je suis très attaché alors j’aurai réussi ma mission.

 
Quels sont les axes d’action de la nouvelle équipe ?

Notre mission s’oriente autour de 3 axes :

• l’accueil des entreprises françaises qui s’installent à Barcelone : leur simplifier des démarches et les mettre en relation avec les interlocuteurs plus à même de pouvoir les aider ;
• L’accompagnement des acteurs de l’écosystème (entreprises, talents, investisseurs) dans leur recherche de financement, dans le développement de leur activité, leurs recrutements ;
• L’animation, en tâchant de créer des liens à l’intérieur de la communauté et des ponts entre celle-ci, les entités locales (fonds de ventures espagnols, incubateurs, accélérateurs…) et l’ensemble du réseau French Tech dans le monde.
La mission est ambitieuse mais nous pourrons compter, au-delà de l’investissement de chacun des membres du board, sur nos adhérents qui ont tous la volonté d’aider la FTB à devenir l’association référence de la Tech Française à Barcelone.

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