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Guillaume Thureau et son réseau d'écoles inclusives en Espagne

guillaume thureau factoria F5 E2O Españaguillaume thureau factoria F5 E2O España
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Écrit par Lepetitjournal Barcelone
Publié le 2 mars 2021, mis à jour le 1 juillet 2021

Guillaume Thureau a développé depuis Barcelone, le premier réseau dans le pays des écoles de la deuxième chance, E2O España, en se calquant sur le modèle existant dans l’Hexagone. Son initiative constitue le point de départ de la création d’un réseau européen. Dans la foulée cet entrepreneur social a fondé l’association Factoría F5, afin que la révolution numérique soit véritablement inclusive. L’organisation dispose aujourd'hui d'un réseau de 5 écoles en Espagne, qui forment gratuitement des personnes de tous les âges, avec une priorité pour les publics en situation de précarité. "La crise que nous traversons renforce ma conviction que ce sont justement ces personnes, perçues à tort comme issues du bas de notre pyramide sociale, qui constituent la clé de notre avenir commun", défend-il. 

Guillaume Thureau est lauréat du Trophée Education,  parrainé par le CNED, des Trophées des Français de l'étranger 2021.

 

L'entreprenariat social et l'apprentissage du catalan ont vraiment scellé mon intégration locale


Quand, comment et pourquoi vous êtes-vous installé à Barcelone et comment s'y sont déroulés vos premiers pas ?

Je suis arrivé pour la première fois à l'été 1999. A l'époque je travaillais pour le groupe Danone et avais pris une nouvelle responsabilité au sein de la filiale espagnole. J’avais juste 30 ans et arrivais d’un projet de construction d'usine à Bucarest. Même si la Roumanie fut pour moi une expérience fantastique, cette vie à Barcelone eut alors un enivrant parfum de « L’Auberge Espagnole ». J’ai dû repartir pour des raisons professionnelles en 2002, bien décidé à revenir un jour et m'installer définitivement. Ce rêve m'a poursuivi pendant une décennie. Je me suis finalement installé en 2012 dans le quartier gothique. C'est, je crois, l'entreprenariat social et l'apprentissage du catalan qui ont vraiment scellé mon intégration locale. 
 

Qu'est-ce qui vous a orienté vers votre projet actuel, les écoles de la deuxième chance, et comment avez-vous décliné le concept en local ?

L’idée du réseau espagnol des écoles de la 2e chance (E2O España) est née sur une terrasse du Raval en 2015. Je partageais une coupe de cava avec un ami, à l'époque directeur de l'emblématique école de la 2e chance de Marseille. La France était alors le seul pays européen à avoir développé un puissant réseau national pour défendre ce modèle qui permet à des milliers de jeunes en difficulté de renouer avec l'éducation et de réussir leur insertion professionnelle. C'est à partir de ce défi amical que j'ai décidé d'aller à la découverte des entités sociales espagnoles qui avait développé des modèles similaires. Sur mon chemin, j'ai eu la chance de rencontrer des femmes et des hommes engagés et disposés à miser sur le collectif et la coopération. En 2016, 6 entités de référence ont ainsi fondé un réseau national et défini un processus de labelisation inspiré de l’expérience française. Ce réseau réunit aujourd’hui 43 écoles labellisées accueillant environ 8000 jeunes. Notre réseau a développé une relation de confiance et une coopération active avec son homologue français, accompagne la constitution du réseau portugais et contribue activement à la constitution d'un réseau de réseaux au niveau européen.

 

65% des jeunes ont trouvé un emploi ou ont continué à se former

 
Quels sont les savoir-faire pédagogiques que vous y développez ?

Le modèle des écoles de la 2e chance s'inspire d’un livre blanc publié par la Commission européenne. Il s'appuie sur différentes dynamiques pédagogiques qui ont démontré au fil des années leur efficacité auprès des jeunes ayant eu des difficultés au sein du système éducatif classique. Elles se structurent autour du projet de chaque jeune, combinent un enseignement professionnel qui associe étroitement les entreprises, un renforcement des compétences scolaires nécessaires au projet, et un accompagnement individuel prenant en compte la réalité sociale de chaque jeune. Il en résulte un projet pédagogique personnalisé qui a permis à 65% des jeunes sortant des écoles de la 2e chance espagnoles au cours de l’année 2018-2019, de trouver un emploi ou de continuer à se former.


Comment vous adaptez vous à la situation Covid actuelle ?

C'est un vrai défi pour tout le secteur éducatif. Les écoles de la 2e chance ont dû s'adapter en mettant en œuvre, non seulement toutes les mesures de prévention recommandées par les autorités sanitaires, mais aussi des solutions numériques innovantes afin de maintenir la continuité éducative et de garder le lien humain, élément central dans notre modèle.

 

Factoría F5 est devenu le partenaire exclusif de Simplon.co

 
Pouvez-vous nous parler de votre implication dans la réplique en Espagne du modèle français d’école du numérique Simplon.co ?

Avec trois autres membres fondateurs, nous avons décidé de créer en 2016 l’association Factoría F5 afin que la révolution numérique soit véritablement inclusive. Nous avions cherché dans le monde le meilleur modèle d'économie sociale et solidaire permettant de former à la programmation de façon inclusive les personnes en situation de vulnérabilité. C'est en France que nous l'avons trouvé ! Factoría F5 est devenu ainsi le partenaire exclusif de Simplon.co en Espagne. Nous avons ouvert une première école à Barcelone et disposons aujourd'hui d'un réseau de 5 écoles au niveau national qui forment gratuitement des personnes de tous les âges, toutes les origines et sans besoin de connaissances préalables. Nos publics prioritaires sont les femmes en situation de précarité, les jeunes sans emploi et sans diplôme, les personnes au chômage de longue durée et les personnes réfugiées. Nous avons l'objectif ambitieux de former 3.000 personnes d'ici à 2025 en nous appuyant sur un réseau de 15 écoles. 

 

guillaume thureau factoria F5 E2O España


Qu'est-ce qui vous a motivé pour vous présenter aux Trophées des Français de l'étranger ?

C’est grâce à une amie, Française établie à Madrid, qui vient de reprendre récemment la direction du réseau espagnol des écoles de la 2e chance. Sans son regard sur le travail accompli, je crois que je n'aurais pas osé présenter ma candidature. 

 
Quels sont vos projets pour l'avenir et que peut-on attendre en termes de développement des écoles de la 2e chance ?

Je souhaite continuer à faire ma part pour permettre que les personnes en risque d'exclusion sociale trouvent leur place et contribuent à la construction d'une société plus inclusive et plus juste. La crise que nous traversons renforce ma conviction que ce sont justement ces personnes, perçues à tort comme issues du bas de notre pyramide sociale, qui constituent la clé de notre avenir commun. 
 

Quelques mots sur le fait de s'expatrier, aller tenter sa chance à l'étranger -et notamment à Barcelone ? Entre avant et après, qu'est-ce qui a changé ?

C'est une question très large. Les conditions de l'expatriation ont énormément changé dans les derniers mois et sont très diverses suivant les pays. S’expatrier reste néanmoins une opportunité unique d'ouverture sur le monde pour peu que nous prenions le temps de découvrir l'histoire et la culture de ces hommes et de ces femmes qui vivent dans ces territoires qui nous accueillent.

 

Qu'est-ce que cela vous fait d'avoir remporté le Trophée Education des Trophées des Français de l'étranger 2021 ?

En toute sincérité, je ne suis pas très à l’aise avec les honneurs. Ce qui m’importe c’est de faire bouger les lignes et de générer de l’impact durable. Je serais en revanche très heureux que ce trophée permette de mobiliser les énergies en faveur des nombreux talents formés au sein des écoles de la deuxième chance et des écoles du numérique Factoría F5 en Espagne.

 

 

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