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Marie-Laure Peytel : “Conseillère consulaire est un mandat précieux !”

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Catherine Vanesse - Marie-Laure Peytel se dit "très heureuse d’avoir été conseillère consulaire" et considère qu’il s’agit d’un “mandat précieux et intéressant”
Écrit par Catherine Vanesse
Publié le 28 janvier 2020, mis à jour le 28 janvier 2020

Élue conseillère consulaire en 2014, Marie-Laure Peytel arrive bientôt à la fin de son mandat, l’occasion de revenir sur une fonction encore balbutiante dans le paysage de la mobilité internationale française. 

Installée à Pattaya depuis 2012 avec son mari, Marie-Laure Peytel a choisi la Thaïlande pour y couler sa retraite après une carrière dans les ressources humaines à Paris. Désireuse de s’investir auprès de la communauté française en Thaïlande, elle s’était présentée en 2014 sur la liste “Union de la Droite Républicaine” lors des toutes premières élections consulaires. Elle assure depuis la fonction de vice-présidente des conseillers consulaires de Thaïlande et de Birmanie

Le 17 mai 2020, les Français établis hors de France seront appelés à élire, pour la deuxième fois, leurs conseillers consulaires, avec un vote qui pourra se faire pour la première fois en ligne. Les Français de l’étranger auront ainsi le choix de voter non seulement à l’urne ou par procuration, mais également par internet. Des élections importantes, car comme le rappelle Marie-Laure Peytel, la France est l’un des rares pays où les Français de l’étranger peuvent participer à un niveau local à la vie politique. 

Pour autant, cette fonction encore nouvelle et parfois limitative est encore peu connue du public. Lepetitjournal.com a rencontré Marie-Laure Peytel pour qu’elle revienne sur son rôle, les difficultés qu’elle a pu rencontrer, mais aussi les succès d’un “mandat précieux et intéressant” comme elle le définit elle-même. 

LEPETTIJOURNAL.COM: Qu’est-ce qui vous a amené à vous installer en Thaïlande ?

MARIE-LAURE PEYTEL: Je me suis installée en Thaïlande, à Pattaya en 2012. À l’occasion d’un voyage, avec mon mari, nous avions eu un coup de cœur et nous nous sommes dit que la Thaïlande pourrait être une belle base pour voyager à travers l’Asie du Sud-est que nous ne connaissions pas à l’époque. Quand mon mari a été en mesure de prendre sa retraite, nous avons un peu discuté de ce que nous pourrions faire et c’est là que j’ai décidé de quitter mon travail dans les ressources humaines pour venir vivre en Thaïlande avec lui. A priori, c’est notre destination finale. 

Quelles sont les raisons qui vont ont conduit à vous présenter en 2014 au poste de conseiller consulaire ?

Avec la naissance de ce nouveau mandat en 2014, Michel Calvet [alors représentant UMP pour la Thaïlande, ndlr] prévoyait de créer une liste “Union de la Droite Républicaine” et il m’a contactée parce qu’il trouvait intéressant d’avoir à la fois des candidats à Bangkok et à Pattaya pour couvrir deux secteurs géographiques qui ne sont pas vraiment les mêmes, en particulier en termes de population. À Pattaya se sont majoritairement des retraités.

Au départ, il n’y avait aucune garantie que je sois élue, nous ne savions même pas combien de postes étaient à pourvoir ni quelles seraient les autres listes en lice. Au final, il y a eu 4 postes pour 3 listes, donc une seconde de liste devait être élue, c’est-à-dire moi-même. 

J’avais accepté la proposition de Michel Calvet par amitié, mais aussi parce que j’avais envie de participer à la vie publique. En France, je n’ai jamais été militante, cela ne rentrait pas dans mes préoccupations même si j’avais bien sûr une sensibilité de droite. Je trouve que le suffrage universel est quelque chose de formidable, nous avons la chance d’avoir un système politique qui nous permet de renvoyer des informations, des problèmes plus haut, il faut en profiter.

Fort de votre expérience avec ce premier mandat de six ans quasiment achevé, comment définiriez-vous votre rôle de conseillère consulaire ?

Les conseillers consulaires complètent le dispositif de représentation des Français de l’étranger. Il y a les députés ensuite les sénateurs des Français de l’étranger et maintenant un mandat local consultatif. Donc sur le papier, c’est très simple, les conseillers consulaires sont là pour représenter les Français établis dans leurs circonscriptions auprès de leurs ambassades et consulats. Ici, nous avons une double circonscription qui inclut la Thaïlande et la Birmanie. 

Nous sommes également consultés pour les questions concernant les Français et leurs intérêts lors des conseils consulaires qui se tiennent à l’ambassade au moins deux fois par an. Là, nous abordons les sujets sur l’éducation française à travers les commissions des bourses, des aides sociales ou de l’argent qui peut être attribuée à des associations. 

Et bien sûr, nous avons un rôle politique. Nous sommes des grands électeurs puisque nous élisons les sénateurs des représentants des Français de l’étranger. De plus, nous élisons les 90 personnes qui nous représentent à l’Assemblée des Français de l’Etranger (AFE), une institution qui siège à Paris deux fois par an et vers laquelle le ministère des Affaires étrangères se tourne pour des préconisations ou des avis, qui sont suivis ou non, sur des questions relatives aux Français de l’étranger. 

Tout cela, c’est sur le papier. Mon premier défi a été de comprendre ce rôle de conseillère consulaire. 

Et en pratique ? 

Je reçois beaucoup de sollicitations, principalement par mél, de Français pour me demander un avis ou un coup de main pour le visa d’un(e) Thaïlandais(e), un rendez-vous au consulat pour un passeport, un contentieux avec les impôts, etc. 

Mon deuxième défi a été de comprendre et donc d’accepter que pour mener à bien ce mandat, je ne devais pas juste prendre le bus et aller à Bangkok pour des réunions, mais que je devais être très disponible et être dans le dialogue. C’est réellement un mandat à plein temps et en même temps c’est super intéressant parce que j’ai pu rentrer en contact avec plein de gens. 

Après, le problème est de faire reconnaître et de faire vivre ce mandat. Parmi les personnes qui m’ont contactée, la moitié ne comprenait pas le rôle d’un conseiller consulaire. Il a aussi fallu se faire reconnaître par les ambassades. Aujourd’hui, vous trouvez la liste des conseillers sur le site de l’ambassade. Avec l’ambassade de France à Bangkok, il y a eu une grande collaboration.  Par contre en France, c’est plus compliqué. La plupart des administrations ainsi que le ministère des Affaires étrangères ne savent pas ce qu’est un conseiller consulaire! Et cela ne semble pas près de s’arranger. Il existe un annuaire, “Le répertoire national des élus”, qui recense les élus des Français et nous n’y sommes pas inscrits. En fait, nous sommes des élus, mais nous n’avons qu’une voix consultative alors qu’en termes de fonction on pourrait nous comparer aux conseillers départementaux. 

La dernière chose qui est regrettable, nous ne sommes pas reconnus auprès des autorités locales thaïlandaises. Nous aurions aimé que la France, que l’ambassadeur nous présente, et avoir une carte de visite officielle qui pourrait par exemple nous aider à discuter avec les responsables de l’immigration en tant que conseillers consulaires. 

Par contre, maintenant, notre poste est ancré dans la vie civile locale. 

Que pensez-vous du fait que les candidatures aux élections des conseillers soient politisées ? Est-il nécessaire que les conseillers soient marqués politiquement ? 

Les deux questions sont liées. D’un côté, il y a beaucoup de personnes qui auraient les capacités pour être conseillers consulaires, mais qui ne s’engagent pas parce qu’ils refusent d’être catégorisés politiquement. De l’autre côté, si l’on veut se passer de ce côté politique, il faudrait que les conseillers consulaires n’élisent pas les sénateurs, parce que ces sénateurs ont des couleurs politiques et un rôle législatif important. Il est donc normal que les électeurs, les Français de l’étranger sachent au moins la couleur politique de celui ou celle qui sera appelé à voter pour ces sénateurs. Les questions autour des 30% d’imposition au premier euro, la CSGRDS sur les revenus immobiliers pour les résidents hors de l’UE, la suppression des 10% d’abattement sur les impôts… tout cela est politique!

Par contre, au sein du conseil consulaire de Thaïlande et de Birmanie, nos opinions, nos couleurs politiques, nous ne les voyons pas, nous n’avons pas encore eu de conflit lié à une sensibilité politique. 

Quand vous répondez aux Français sur les questions concernant les visas, la CFE… n’est-ce pas le rôle du consul honoraire d’y répondre ?

Les consuls honoraires sont tenus par le consulat de ne délivrer qu’une information officielle alors que nous, les conseillers consulaires, nous pouvons dire ce que nous voulons. Aujourd’hui, je crois que l’aspect le plus important de notre fonction est d’être la personne humaine qui répond alors que nous vivons dans un monde de plus en plus désincarné, où la dématérialisation est l’objectif de l’administration. Par exemple pour les certificats de vie, il faut aller sur son espace personnel en ligne, attendre l’attestation, l’imprimer, la signer, la scanner et la renvoyer. C’est ça le progrès absolu ?

D’où l’importance d’assurer des permanences pour rencontrer la population ?

J’organise en effet des permanences tous les mois à Pattaya. Je suis également disponible sur rendez-vous et je participe aux tournées consulaires. À une époque, il y avait moins de consuls honoraires. Par conséquent, le consul et l’ambassadeur se déplaçaient en province, ils invitaient les conseillers consulaires à se joindre à eux. 

Au cours de ces six dernières années, quels sont les succès et les déceptions de votre mandat ?

Au niveau du consulat, il y a une grande amélioration pour la prise de rendez-vous. Il y a eu la création d’un poste supplémentaire au sein du service social de l’ambassade de France à Bangkok et la nomination de deux consuls honoraires supplémentaires, l’un à Khon Kaen et l’autre à Hua Hin. Tout cela fait partie des demandes que nous avons poussées auprès de l’ambassade et des dialogues avec le consul. 

Par contre, il y a aussi des frustrations sur certains points qui soi-disant ne nous concernent pas et pour lesquels nous ne sommes pas consultés par exemple sur la délivrance des certificats de revenus qui ne sont plus vérifiés, mais qui restent une déclaration sur l’honneur. 

Sur d’autres points, nous sommes consultés, mais pas écoutés. Récemment, nous avons été interrogés sur le dispositif des bureaux de votes pour les élections consulaires au mois de mai 2020 : à l’unanimité nous avons donné un avis défavorable parce que les bureaux de Khon Kaen et de Koh Samui n’y figuraient pas. 

Il faut pouvoir gérer cette frustration pour soi-même, mais aussi gérer le mécontentement que cela peut engendrer auprès de nos compatriotes qui nous en tiennent pour responsables ou qui estiment que nous n’en avons pas fait assez. 

En parlant des prochaines élections consulaires, que diriez-vous aux Français pour les inciter à voter ?

Nous sommes le seul ou l’un des seuls pays au monde où les citoyens à l’étranger peuvent voter pour des gens qui les représentent. C’est quelque chose d’important qui n’est pas arrivé tout seul. Des gens se sont battus pour que cela ait lieu. En plus, cette année, les Français vont pouvoir voter par Internet! 
Il faudrait également que davantage de Français s’inscrivent au registre des résidents en Thaïlande. C’est incompréhensible qu’il y ait près de 50% des Français qui ne soient pas inscrits. Outre la sécurité que cela apporte en cas d’incidents politiques ou de catastrophes naturelles, cela pourrait permettre d’avoir des effectifs plus importants au consulat et davantage de conseillers consulaires élus. 

En Birmanie, il y a 1.000 inscrits. Des Français non-inscrits, il ne doit pas y en avoir beaucoup parce que la Birmanie est un pays à risques, il y a des inondations, des séismes, des guerres, etc. En Thaïlande, les gens se sentent tellement peu menacés qu’il y a une certaine réticence à s’inscrire sur les listes de l’ambassade. 

Votre mandat couvre en effet aussi la Birmanie, quel y est votre rôle ?

J’ai trouvé ce point un peu difficile dans la mesure où je n’habite pas ce pays. J’ai eu à coeur d’y aller et tout au long de mon mandat, je m’y suis rendue trois ou quatre fois par an. J’ai eu la chance d’avoir des ambassadeurs et des consuls avec lesquels j’ai toujours eu d’excellentes relations, mais j’avoue qu’à chaque fois je me sens un peu gênée, je trouve que les Français en Birmanie mériteraient d’avoir des conseillers consulaires qui partagent leur quotidien et leurs problématiques. 

Vous présenterez-vous aux prochaines élections ?

Non, je ne me représente pas. Ce mandat de six ans était très prenant, il a été au coeur de mon action et de mes activités mais, en six ans, j’ai changé, mon environnement a changé et, personnellement, je trouve que repartir pour six années supplémentaires c’est beaucoup.

C’était un mandat intéressant et précieux pour les gens qui sont ici, même s’il a une valeur symbolique. A chaque fois que je me suis déplacé, les Français sont contents de rencontrer leurs élus même si nous ne sommes que consultatifs. Ils réalisent qu’ils ne sont pas oubliés. Je suis très heureuse d’avoir été conseillère consulaire. 

Marie-Laure Peytel est joignable par email à l’adresse : mlpeytel.thailande.birmanie@gmail.com ou via sa page Facebook

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