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L’économie thaïlandaise marche sur des œufs en 2020

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Reuters

La Thaïlande affiche en 2019 son plus faible taux de croissance en cinq ans et les perspectives pour 2020 sont à peine meilleures, entre tensions commerciales mondiales, un baht fort et un risque politique croissant.

Particulièrement tributaire des exportations, le royaume a été durement affecté par le conflit commercial sino-américain auquel s’est ajoutée la forte appréciation du baht. La Banque de Thaïlande (BOT) s’attend à ce que les exportations enregistrent une baisse de 3,3% sur 2019 et n'augmentent que de 0,5% en 2020.

La monnaie thaïlandaise, qui a pris près de 9% par rapport au dollar en 2019 est la monnaie d'Asie ayant connu la plus forte appréciation ces douze derniers mois, et les analystes estiment que cela a également un impact sur la fréquentation touristique - la devise s'échangeait à 30,15 bahts pour un dollar américain vendredi, après avoir atteint 29,91 le 30 décembre, le plus haut depuis plus de six ans.

La croissance thaïlandaise est à la traine par rapport aux pays voisin depuis plusieurs années déjà. Et la banque centrale, après avoir sans cesse revu ses prévisions à la baisse, estime qu'elle ne sera finalement que de 2,5% en 2019 -le taux le plus faible depuis 2014, année du dernier coup d'État- et de 2,8% en 2020.

Et certains analystes sont encore plus pessimistes.

"Nous tablons sur une croissance de seulement 2,4% [en 2019] et de 2,5% en [2020]", a déclaré la semaine dernière Somprawin Manprasert, économiste en chef de la Bank of Ayudhya. "L'économie est toujours en phase de ralentissement", a-t-il souligné, ajoutant que les faibles exportations nuisent désormais à l'activité intérieure.

Charnon Boonnuch, économiste chez Nomura à Singapour, dit ne s’attendre à rien de mieux qu’une reprise économique atone en 2020.

La Thaïlande est une base régionale de production et d'export pour les grands constructeurs automobiles, mais les exportations de voitures ont chuté de 6% au cours des 11 premiers mois de 2019, incitant certaines usines à réduire les heures de travail, a indiqué Surapong Paisitpattanapong, porte-parole de la division auto de la Fédération des industries thaïlandaises.

"La marge dans la fabrication d'une voiture ne dépasse pas 5%, mais le baht a gagné 7% -8%. Par conséquent, plus ils exportent, plus ils subissent des pertes", a-t-il ajouté.

Pour contrer l’appréciation de la monnaie thaïlandaise, la BOT a mis en place un certain nombre de mesures et a réajusté son taux directeur à deux reprises en 2019, l’abaissant au niveau record de 1,25%. Mais le baht reste fort, poussé par un fort excédent de compte courant.

La banque centrale a fait savoir qu’elle disposait encore d’une certaine marge de manœuvre pour mettre en place de nouvelles mesures, précisant cependant qu’une intervention sur les marchés s’annonçait difficile, la Thaïlande risquant d'être placée sur la liste américaine de surveillance des pays manipulateurs de monnaie. 

Le gouvernement a essayé de stimuler la croissance avec notamment un plan de relance de 10 milliards de dollars, mais avec peu de résultats.

Autre facteur aggravant, le retard de quatre mois -jusqu'en février- pris sur le budget 2020 en raison de la formation tardive du cabinet à l’issue des élections de mars 2019 qui avaient permis à l'ancien chef de la junte, Prayuth Chan-ocha, d’être reconduit dans ses fonctions de Premier ministre avec une faible majorité au Parlement.

La question de l'incertitude politique devrait peser en 2020. Des milliers de personnes ont participé le mois dernier à la plus grande manifestation organisée depuis le coup d'État de Prayuth en 2014. Une mobilisation spontanée intervenue après une décision des autorités de faire interdire l’un des principaux partis d'opposition au gouvernement.

Le 21 janvier, la Cour constitutionnelle, qui a déjà dissous plusieurs partis anti-establishment ces dernières années, statuera sur la dissolution du parti Anakot Mai (Future Forward Party), ce qui risque de déclencher à nouveau des mouvements de protestation.

Le 12 janvier, le parti d'opposition organisera une "Course contre la dictature" ("Run Against Dictatorship") à Bangkok et le même jour les partisans du gouvernement thaïlandais une marche en soutien au Premier ministre Prayuth.

Un récent sondage relayé par le journal The Nation indique une importante réduction ces dernières semaines de la majorité politiquement silencieuse, portant en janvier la part des partisans au gouvernement à 34%, contre 36,6% pour leurs adversaires.

"L'économie pourrait s’améliorer [en 2020], quoique légèrement, s'il n'y a pas de nouveau chaos politique", a déclaré Sanan Angubolkul, vice-président de la Chambre de commerce de Thaïlande.

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