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FRAUDE — Fin d’une spirale du mensonge autour d’un détecteur d’explosifs factice

Écrit par Eric DESEUT
Publié le 28 septembre 2018

Un verdict formel de la justice britannique a enfin conduit la hiérarchie militaire thaïlandaise à suspendre l'usage d'un détecteur d'explosif dont l'inefficacité est démontrée depuis 2010.

Le millionnaire britannique James McCormick vient d'être condamné pour fraude après avoir vendu des détecteurs d'explosifs factices dans plusieurs pays, notamment en Irak et en Thaïlande. Depuis 2006 plus de 700 exemplaires de ce GT 200 ont été acquis par l'armée thaïlandaise qui les a principalement utilisés dans le sud du royaume. Dés 2010 l'inefficacité de l'engin a été démontrée par une enquête de la BBC menée en collaboration avec la prestigieuse université de Cambridge.

Et en janvier 2010 le gouvernement britannique en interdisait la vente en Irak et en Afghanistan. Cela n'a pas empêché le chef de l'armée thaïlandaise de continuer à défendre son usage jusqu'en juillet 2012 : "J'affirme que l'appareil est encore efficace" (Bangkok Post, 14.02.2012). Les valeureux militaires siamois ont donc continué à confier leur vie à un engin procurant un faux sentiment de sécurité.

Le vulgaire boitier de plastique vide orné d'une antenne a également acquis par 13 agences gouvernementales dont le service de la médecine légale dirigée par la très médiatique Pornthip Rojanasunand. Réputée pour ses coupes de cheveux excentriques Pornthip n'a accordé aucun crédit à l'expertise du laboratoire de Cambridge. "Personne n'a le droit d'interdire l'usage de ces détecteurs et je continuerai à les utiliser" , avait-elle déclaré sur un ton péremptoire en s'abandonnant au passage à zest de philosophie couleur locale : "ce n'est pas parce les choses sont invisibles qu'elles n'existent pas ".

La conclusion du processus judiciaire au Royaume-Uni a finalement mis fin à cette spirale de l'aveuglement. Dans les provinces du sud de la Thaïlande régulièrement frappées par des attentats, l'usage du funeste GT 200 a enfin été suspendu selon le porte-parole de l'armée. Et une enquête menée par le service des enquêtes spéciales, l'homologue du FBI nord-américain, pourrait bientôt déboucher sur des mises en examen. L'agence nationale de lutte contre la corruption (NACC) s'est aussi saisie du dossier.

Au total 1.358 détecteurs factices ont été acquis par la Thaïlande et ont coûté près de 30 millions d'euros à ses contribuables.
Le sentiment d'humiliation contribue souvent à accabler les victimes d'escroqueries. Si les responsables de ces achats inconsidérés se sont longtemps enferrés dans un déni de réalité, c'est sans doute pour ne pas perdre la face. Ironiquement leur opiniâtre aveuglement pourrait maintenant constituer une ligne de défense crédible dans la perspective du processus judiciaire à venir.

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