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Des pêcheurs thaïlandais manifestent contre les règles anti-esclavage

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REUTERS/Soe Zeya Tun - Des professionnels de la pêche manifestent devant le ministère thaïlandais de l'Agriculture à Bangkok le 17 décembre 2019

Plusieurs milliers de pêcheurs thaïlandais ont manifesté mardi devant le ministère de l'Agriculture à propos de la réglementation visant à lutter contre la pêche illégale et non régulée qui, disent-ils, les pousse à la faillite.

La Thaïlande, l'un des plus grands exportateurs de fruits de mer au monde, a commencé prendre des mesures contre la pêche illégale, non déclarée et non réglementée (INN) il y a quatre ans, après que l'Union Européenne a menacé d'interdire ses exportations de fruits de mer.

L'UE a levé sa menace en janvier de cette année, invoquant une "amélioration majeure" de la gouvernance thaïlandaise, mais l’application des réformes adoptées par Bangkok en 2015 ne s’est pas faite sans heurter peu ou prou le secteur de la pêche du royaume.

Les manifestants, issus de 22 provinces du pays, ont établi un camp devant le ministère avec des abris de fortune sous des parapluies colorés et se sont relayés au mégaphone pour exprimer leurs doléances.

"Nous avons tout perdu au cours des cinq dernières années. Nous ne partirons pas tant que nous n'aurons pas obtenu de réponses," a déclaré un pêcheur de la province de Rayong.

Mongkol Sukcharoenkana, président de l'Association nationale des pêches de Thaïlande (NFAT), a déclaré que les réformes et les amendes coûteuses avaient fait perdre leur emploi à de nombreux pêcheurs.

"Si le gouvernement ne règle pas les problèmes pour nous, alors nous les chasserons", a affirmé Mongkol à Reuters.

Selon une étude réalisée par le collectif humanitaire Praxis Labs, les efforts des pêcheurs thaïlandais pour se mettre en conformité avec la nouvelle politique anti-esclavage souffrent en partie du fait que la plupart des marques et des distributeurs internationaux refusent de payer plus cher leurs fournisseurs. 

Au début du mois, les associations de pêcheurs avaient dressé une liste de demandes comprenant un assouplissement des restrictions et l'allocation de fonds spéciaux pour aider le secteur.

Alongkorn Ponlaboot, un conseiller du ministre de l'Agriculture, a annoncé mardi au rassemblement qu'un prêt de 10,3 milliards de bahts (305 millions d’euros) pour les pêcheurs et un plan de 7,1 milliards de bahts (210 millions d’euros) pour acheter 2.700 navires attendaient l'approbation du cabinet.

Mais il a déclaré que la modification de la loi était compliquée car elle pouvait affecter l'engagement de la Thaïlande à lutter contre la pêche INN et que des consultations étaient en cours.

Les jours sombres de la pêche non régulée

Le juteux secteur thaïlandais des produits de la mer s’est retrouvé sous les projecteurs internationaux lorsqu’une série d’enquêtes institutionnelles et médiatiques a mis au jour des abus généralisés accablants -incluant des cas de torture et de meurtres- contre des travailleurs sur les bateaux de pêche.

Les organisations internationales ont salué la réforme par la Thaïlande de son industrie de la pêche, notant un renforcement de la traçabilité et de la surveillance des transbordements en mer ainsi qu’une réduction du travail forcé.

Steve Trent, directeur exécutif de l'Environmental Justice Foundation basée à Londres, a exhorté la Thaïlande à ancrer fermement la réforme plutôt que la diluer.

"Si la NFAT obtient gain de cause et que les réformes sont annulées, ce sera un retour aux jours sombres de la violence, du travail forcé, d’une pêche plus illégale et non durable", prévient Steve Trent.

Alongkorn Ponlaboot a déclaré à Reuters que le gouvernement ne ferait rien qui pourrait nuire au statut de la Thaïlande au regard de la pêche INN.

"Nous avons une obligation et nous n’avons pas l’intention de revenir en arrière. C’est clair".

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