Plusieurs dizaines de personnes ont été blessées lors des violents affrontements dimanche selon les urgentistes. La police a reconnu avoir tiré des balles en caoutchouc et des gaz lacrymogènes.
Dix manifestants et 26 policiers ont été blessés dans des affrontements dimanche, a déclaré lundi le centre d'urgences Erawan de Bangkok, et un policier est décédé d'une crise cardiaque, selon un porte-parole du gouvernement.
La police a reconnu avoir tiré des balles en caoutchouc -une première fois depuis le début des manifestations l'année dernière- contre des manifestants qui ont défilé devant une caserne militaire à Bangkok, appelant le roi Maha Vajiralongkorn à abandonner le commandement d’une unité militaire qu’il s’est octroyée en 2019. Les forces de l’ordre ont également utilisé des gaz lacrymogènes et mis en œuvre des canons à eau
Des manifestants ont été vus jeter des bouteilles sur les policiers en marchant jusqu'à une barricade faite de conteneurs et de barbelés qui interdisait l'entrée du 1er régiment d'infanterie, abritant l'une des unités de l'armée que le gouvernement du Premier ministre Prayuth Chan-O-Cha a transférées au roi à la demande de ce dernier en 2019.
"C'était la première fois que des balles en caoutchouc étaient utilisées", a déclaré lundi le chef de la police de Bangkok, Pakapong Pongpetra, aux journalistes, affirmant que leur utilisation était nécessaire pour empêcher l'escalade de la violence.
Le Premier ministre Prayuth Chan-O-Cha a justifié ces mesures en affirmant que les manifestants avaient ouvert les hostilités."La police a dû utiliser des mesures conformes aux normes internationales", a-t-il déclaré lundi aux journalistes à la Maison du gouvernement.
L’une des chefs de file du mouvement de contestation, l’étudiante Jutatip Sirikhan, a contredit le Premier ministre sur les responsabilités du déclenchement des affrontements. "La violence n'a commencé que lorsque les autorités ont réprimé les manifestants", a-t-elle déclaré à Reuters. "La police devrait faciliter l'expression politique des gens, et non leur tirer des balles."
La police a indiqué que 22 manifestants avaient été arrêtés et accusés d’avoir fait obstruction aux autorités et d'avoir violé le décret d'urgence, en vigueur depuis l'année dernière pour limiter la propagation du Covid-19.
Le mouvement de contestation politique dirigé par une partie de la jeunesse thaïlandaise a émergé l'année dernière pour exiger la démission du Premier ministre putschiste et a poussé ses revendications jusqu’à appeler à des réformes de la monarchie, brisant un vieux tabou sur la critique de la royauté.
Les manifestants ont également exprimé leur soutien aux manifestations anti-coup d'État en Birmanie voisine, qui est plongée dans le chaos depuis que l'armée a pris le pouvoir début février et arrêté Aung San Suu Kyi, la dirigeante élue du gouvernement.
"Prayuth accueillant un responsable du gouvernement militaire birman en Thaïlande en début de semaine dernière montre également qu'il soutient le dictateur là-bas", a déclaré à Reuters Chukiat Sangwong, un des chefs de file de la manifestation thaïlandaise.
"Ce n'est pas acceptable pour les Birmans, ils nous ont donc rejoints ici", a-t-il ajouté.
Toute critique du roi en public est illégale en Thaïlande, et les insultes à la monarchie sont passibles de peines allant de 3 à 15 ans de prison en vertu de la loi de lèse-majesté, parmi les plus sévères au monde.
Le Palais Royal n'a fait aucun commentaire sur les manifestations depuis le début du mouvement l’an dernier.