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Raphaël Jérusalmy sauve Mozart

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© Oumeya El Ouadie
Écrit par Fanny VAURY
Publié le 25 mars 2019, mis à jour le 10 avril 2019

De passage à Athènes, Raphaël Jérusalmy a présenté son roman Sauver Mozart. L'occasion pour lepetitjournal.com d'écouter cet ancien agent des services secrets israéliens, aujourd'hui libraire à Tel-Aviv.

Récemment traduit en grec sous le titre Nα σώσουμε τον Μότσαρτ, Sauver Mozart a été salué en France ; succès d'édition grâce à l'engouement qu'il a suscité chez les libraires, le roman, sous forme de journal, esquisse l'existence d'Otto Steiner, malade de la tuberculose soigné dans un sanatorium en Autriche. Juif indifférent à ce qui l'entoure et à la montée du nazisme, l'homme, mélomane, est soudain sorti de son apathie politique par le festival de musique classique, prétentieux et bouffon, qu'organisent les nazis à Salzbourg. Il décide alors de commettre « un attentat musical ». L'éditeur grec Melani a bien fait de se pencher sur ce petit roman au style dépouillé, sur ce journal qui, de prime abord désabusé, tient le lecteur en haleine.

« Le summum de la barbarie nazie, c'est justement la culture nazie », déclare M. Jérusalmy aux auditeurs venus l'écouter à l'Institut Français de Grèce, ce mercredi 21 mars. « Outre leur tyrannie, les nazis voulaient avoir un rayonnement culturel et intellectuel sur le monde. Le dilemme est le suivant : la musique est-elle la complice des nazis, ou représente-t-elle la liberté, comme dans le Chant des Partisans, des résistants ? »

De la Rose de Saragosse à Sauver Mozart, celui pour qui l'art est nécessairement politique, subversif, imagine souvent des héros « solitaires, des francs-tireurs », qu'il met à mal. Tous ont en commun d'avoir une arme secrète et de se dresser contre une injustice, avec des moyens dérisoires mais beaucoup d'ingéniosité. Soudain mus par un souffle épique, ils montrent un étonnant courage dans des circonstances très périlleuses.

« Je transpose dans mes livres beaucoup d'expériences de ma carrière dans les services de renseignement israélien. En général, les gens qui sont dans l'armée ont quelques points communs : ils n'aiment pas beaucoup les politiciens, ne parlent pas pour ne rien dire et pensent que la vérité est sur le terrain. Ils ont la chance - ou la malchance - de vivre des choses extrêmes, pour le meilleur et pour le pire. »

Des choses extrêmes, Raphaël Jérusalmy a dû en vivre un certain nombre. Mais l'humour s'invite souvent sans crier gare, même quand on est entouré de hauts-gradés de pays ennemis. Ainsi de ce général égyptien qui, lors d'un barbecue chez l'auteur, à la surprise de tous, se met à jouer des airs yiddish devant ses pairs israéliens, combattus sur le terrain quelques temps auparavant.

« Pendant beaucoup d'années, mon travail était un peu spécial : je n'étais pas un espion, je prenais part aux relations extérieures avec l'intelligence militaire des pays arabes. Je rencontrais donc en secret mes collègues jordaniens, libanais, égyptiens. »

De cette expérience, Raphaël Jérusalmy a sans doute gardé au moins une farouche volonté d'engagement politique.

« Pour moi, ce qui prime toujours, c'est la force de l'individu. Mon héros, Steiner, a la tuberculose, que j'appelle le 'nazisme de la nature', et qu'il va combattre tout aussi héroïquement, pas pour changer le monde, mais pour une seconde raison : pour sa propre dignité. Si chaque individu agit pour sauver sa propre dignité, il a déjà changé le monde. »

Par ce journal élagué, dont le nombre de mots est réduit à l'essentiel, Raphaël Jérusalmy délivre à la serpe son message : celui de l'action individuelle dans un monde où vainc la justice. Pour ce faire, l'art est chez lui l'arme absolue. Mozart est sauvé.

Sauver Mozart, Éditions Actes Sud

Nα σώσουμε τον Μότσαρτ, Éditions Melani, Traduction Achilleas Kyriakidis

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Publié le 25 mars 2019, mis à jour le 10 avril 2019

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