Édition internationale

Entretien : Katia Sznicer, ma mission la transmission, l’écriture ma boussole.

Maîtresse de conférences à l’Université de Genève pendant dix ans, Katia Sznicer Malausséna a tout quitté pour se réinventer. Aujourd’hui installée en Andalousie, cette Française passionnée de livres et de langue française a développé une activité de « Book Coach ». Elle accompagne les auteurs en herbe ou confirmés dans l’écriture de leur livre. Rencontre avec une femme qui a fait de l’écriture sa boussole et de la transmission sa mission.

Katia Sznicer MalaussénaKatia Sznicer Malausséna
Katia Sznicer Malausséna
Écrit par Bernard Frontero
Publié le 5 novembre 2025, mis à jour le 8 novembre 2025

LePetitJournal.com : Après des études à Londres, Oxford et Québec, vous avez été maîtresse de conférences en FLE et Littératures francophones à l’Université de Genève pendant 10 ans. Qu’est-ce qui vous a poussée à tout quitter après cette première carrière dans l’enseignement supérieur ?

Katia Sznicer Malausséna : Vers 40 ans, j’ai ressenti un besoin profond de changement, une envie d’autre chose. L’université m’avait beaucoup apporté intellectuellement, mais je ressentais une forme de lassitude face aux contraintes de l’institution, aux jeux de pouvoir, à une certaine rigidité du système. J’avais envie de respirer un autre air, de changer de perspective.
 

Une décision pas facile à prendre, car j’abandonnais une carrière stable

 

Comment avez-vous vécu cette transition ?

C’était à la fois libérateur et vertigineux ! Quitter la sécurité d’un poste universitaire pour se lancer dans l’inconnu, cela ne va pas de soi. Mon mari, qui partage mon goût du voyage et de l’ouverture à d’autres cultures, a aussi sauté le pas et nous avons vécu cette aventure ensemble. Nous avons d’abord choisi de nous installer à Ténérife, puis nous avons voyagé pendant trois ans autour du monde.
 

Cette période de nomadisme m’a permis de réfléchir à ce que je voulais faire de ma vie professionnelle, c’était comme une page vierge à écrire

Les Canaries, puis trois ans de voyage autour du monde, avant de revenir vers la péninsule ibérique… Donc fidèle à l’Espagne ! Quel rôle ce pays a-t-il dans votre nouvelle vie ?

L’Espagne, oui, et ce n’est pas un hasard. J’ai fait une partie de ma scolarité au Lycée français de Barcelone, et ma grand-mère maternelle avait des liens généalogiques anciens avec l’Espagne. Il y avait donc un fil invisible qui me reliait à ce pays. Après nos années de voyage, quand il a fallu choisir où poser nos valises de manière plus durable, l’Espagne s’est imposée. La culture, l’art de vivre, le sens de l’accueil… Tout cela résonnait avec mes origines.

Et pourquoi l’Andalousie ?

La culture andalouse est née de métissages, de rencontres de multiples civilisations, ce qui lui donne une puissante identité. En y vivant, je suis devenue, par exemple, aficionada des Sévillanes et surtout du flamenco qui exprime toute cette âme andalouse. M’inscrire à des cours de danse, souvent seule étrangère, c’était un peu désécurisant au début. Mais quel bonheur de partager cette musique, ces rythmes, ces mouvements ! C’est comme ça que j’ai vraiment rencontré les Andalous. Et puis, il y a cette lumière, qui a tant inspiré Sorolla, un peintre que j’adore.

Malgré les grandes chaleurs d’été et une situation immobilière tendue, j’ai trouvé ici une grande qualité de vie.

Plus généralement, quel bilan tirez-vous de ces années de voyages et de vie à l’étranger ?

C’est une grande chance de pouvoir goûter à d’autres cultures, apprivoiser l’inconnu, découvrir d’autres façons de vivre et de penser, rencontrer des gens aux parcours si différents. Chaque nouveau lieu est une aventure et un apprentissage. Mais je ne vais pas vous mentir, il y a aussi des difficultés réelles. La solitude, parfois, et un manque de stabilité qui peut peser.

Quand on débarque dans un nouveau lieu, il faut tout reconstruire : son réseau professionnel et personnel, ses repères quotidiens. Il faut apprendre de nouveaux codes, prendre sa place, ne pas se décourager devant une porte fermée. Ces années m’ont façonnée, enrichie. Elles m’ont donné des ressources que je n’aurais jamais acquises dans une vie plus conventionnelle.

Au moment de votre reconversion, comment avez-vous trouvé votre nouvelle voie professionnelle ? Vous dites que « la langue française est votre maison »…

Oui, c’est ça. Dans mon itinéraire, la langue française est restée mon ancrage. Peu importe où je me trouve, le français est ma maison, mon territoire.

Quand il m’a fallu me réinventer professionnellement, j’ai compris que je devais continuer à travailler avec les mots, avec la langue, avec la lecture bien sûr, qui a toujours été présente dans ma vie, mais surtout avec l’écriture. Je suis convaincue qu’écrire est véritablement thérapeutique.
 

Je crois intimement au pouvoir des mots. J’ai compris que la langue française allait devenir mon fil directeur le plus solide.

Vous avez donc développé des activités autour de l’écriture ?

Oui, au début, j’ai cherché une compétence pratique qui me permettrait de gagner ma vie en tant qu’indépendante. Je me suis formée à la rédaction web SEO. C’était une porte d’entrée dans le monde de l’écriture sur Internet, une façon d’apprendre les codes du digital et de manier autrement la langue. J’ai alors fondé mon auto-entreprise Mots Puissants.

Puis, on m’a sollicitée pour écrire des textes plus personnalisés, et je suis devenue «ghostwriter». J’ai prêté ma plume à des célébrités des réseaux sociaux qui voulaient sublimer leur propos, raconter leur vie et faire rayonner leur message auprès de centaines de milliers de followers via des newsletters ou des slogans. Cette activité m’a passionnée, car elle combinait mon expertise académique — structurer une pensée, argumenter, créer une narration — avec une dimension humaine très forte. J’entrais dans l’intimité des histoires de vie, des projets et des rêves. Et c’est là que tout a basculé.

En 2023, vous publiez chez Eyrolles La Sagesse éternelle des déesses de la Lune. Comment ce projet est-il né ?

Écrire pour les autres a fini par me donner envie donner envie d’écrire mon propre livre ! (rires) Cet ouvrage est né d’une passion personnelle pour les mythes et le symbolisme. Formée en sciences humaines et lettres, j’ai toujours été fascinée par les récits fondateurs, les archétypes, la manière dont certains récits traversent les époques et continuent de nous parler aujourd’hui. Explorer les mythologies des divinités lunaires m’a permis de faire revivre la mémoire de grandes déesses, dont certaines sont les grandes oubliées de l’Histoire. J’ai adoré ce travail de recherche et de vulgarisation d’un savoir universel.

Vous diriez qu’écrire un livre est le rêve de beaucoup ?

Indéniablement, oui ! Cette expérience m’a amenée à dialoguer avec de nombreuses personnes. Et j’ai réalisé deux choses essentielles. D’abord, à l’époque du tout numérique et du virtuel, le livre-papier reste une valeur forte et intemporelle.
 

Tenir un livre entre ses mains, c’est quelque chose d’irremplaçable, j’oserais même dire sacré

Ensuite, j’ai découvert à quel point écrire un livre est un véritable rêve pour beaucoup de gens. Lors de rencontres et d’échanges sur les réseaux sociaux, j’ai entendu cette phrase revenir sans cesse : « J’aimerais tant écrire un livre, mais je ne sais pas par où commencer, je remets toujours à demain » ou « J’ai tellement de choses à dire, mais je n’arrive pas à les structurer ». Ces confidences m’ont beaucoup touchée. J’ai compris que j’avais bel et bien quelque chose à transmettre.

Aujourd’hui, quel est exactement votre engagement auprès des personnes qui viennent vers vous ? Pourriez-vous expliquer à nos lecteur. rices ce qu’est le Book Coaching ?

En tant que Book Coach, j’aide les auteurs en herbe, ou plus expérimentés, à structurer leur pensée, à trouver leur voix, à organiser leur contenu de manière cohérente, sans procrastiner ni se décourager. Écrire un livre n’est pas chose facile ! Je les accompagne, tout au long du processus, de la conception jusqu’à la finalisation du manuscrit. Je les sensibilise aussi aux réalités du monde de l’édition. C’est du sur mesure qui demande de l’écoute, de la méthode et, très important, beaucoup d’empathie.

Je continue en parallèle mon activité de rédactrice web SEO et de prête-plume.

En préparant cet entretien, vous avez évoqué l’idée de « mettre en lumière les parcours des héros et héroïnes d’aujourd’hui » ?

Je pense en effet qu’écrire un livre n’est pas réservé aux célébrités. C’est une ambition à la portée de tous ceux qui ont quelque chose à transmettre, un parcours unique, une expertise, une vision singulière du monde à mettre en mots : entrepreneurs qui bâtissent au quotidien, créateurs qui embellissent le monde, thérapeutes qui transforment des vies, coachs qui accompagnent le changement, chercheurs qui élargissent et diffusent leur savoir. Je m’adresse également aux particuliers qui, tout simplement, ont envie de transmettre leur histoire.

J’ajouterais qu’on écrit pour soi, mais aussi pour les autres. L’expérience, les apprentissages, les découvertes des uns peuvent transformer la vie des lecteurs. Mon travail consiste ainsi à mettre des parcours en lumière, à donner à ces personnes les moyens les plus justes, les plus adéquats de se faire entendre et de créer des liens grâce à l’écriture de leur livre et on peut bien entendu me contacterCette mission, je la trouve pleine de sens. Elle est fondée sur la confiance et l’échange. Je m’y sens à ma place, en contact avec le monde.

Katia Sznicer Malausséna

 

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