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Jérôme Bonnet : "Nous considérons le marché européen comme un marché domestique"

Jerome BONNET CEO de Pramex InternationalJerome BONNET CEO de Pramex International
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Écrit par Vincent GARNIER
Publié le 9 mai 2022, mis à jour le 10 mai 2022

Directeur Général de Pramex International depuis 2019, Jérôme Bonnet a dès 2012 coordonné le déploiement des équipes dans le monde. Filiale du Groupe BPCE, Pramex International accompagne les start-ups, PME et ETI françaises dans leurs projets d’investissement à l’étranger, par création de filiale ou acquisition. 

 


Pouvez-vous revenir sur votre parcours jusqu’à la direction générale de Pramex International en 2019 ?

On peut dire que j’ai réalisé toute ma carrière dans le domaine de l’investissement international. Diplômé d’HEC, j’ai fait mes armes comme chargé de mission au sein des bureaux italiens de la Datar, l’ancêtre de l’AFII -aujourd’hui Business France. Comme directeur du bureau milanais, j’ai connu la belle époque des investissements directs étrangers, avec des projets productifs, structurants et créateurs d’emploi, jusqu’en 2003, date à laquelle je suis parti à Londres pour passer un MBA. J’ai ensuite rejoint Pramex International en 2007, pour diriger la filiale italienne et prendre la direction du développement international. En 2012, j’en ai intégré le Comité de Direction Générale.


Depuis votre situation privilégiée, quel regard portez-vous sur l'internationalisation des entreprises françaises ?

Il faut avant tout bien comprendre que nous nous positionnons sur un marché niche, celui des PME, des ETI et des start-ups, ce qui représente environ 1600 projets annuels d'investissements direct à l'étranger et sur lesquels nous disposons d'une part de marché très satisfaisante, de l'ordre de 15%. A défaut de statistiques officielles, et loin de l'objectif des 120.000 exportateurs marqué par Bpifrance, notre activité constitue donc une photographie partielle de la dynamique de conquête des marchés à l'étranger. Nous sommes néanmoins très bien placés pour observer que d'une part les entreprises françaises bénéficient, avec la Team Export et les acteurs privés de l’OSCI, d'un écosystème particulièrement propice à leur internationalisation, et qu'elles sont d'autre part globalement bien capitalisées, ce qui leur donne une capacité indéniable d'investissement hors de l'Hexagone -de fait, la France est souvent meilleur investisseur qu'exportateur dans les pays où elle opère. 


Vous avez été en charge de coordonner le déploiement des filiales et des équipes dans le monde. De quel dispositif dispose actuellement Pramex International ?

A partir de 2007, Pramex International a engagé un virage pour se spécialiser dans le métier de l’accompagnement à l’implantation, avec deux focus : l’externalisation des services de gestion administrative des filiales des sociétés françaises à l’étranger d’une part, et le M&A -ou fusions-acquisitions en français. A partir de 2009, j’ai eu pour mission de coordonner le réseau de filiales et nous avons entrepris un processus de concentration de nos filiales existantes : nous en avons réduit le nombre, 13 aujourd’hui, pour conserver des hubs forts, dont nous avons grossi les effectifs. Entre 2010 et 2022, nous sommes ainsi passés de 55 à 107 employés au sein de nos filiales à l’étranger, à l’instar de l’Espagne, qui est passée à être une structure de de 5 personnes à une antenne consolidée de près de 15 personnes aujourd’hui.  En parallèle, nous avons opté pour fermer certaines antennes, comme l’Algérie, Dubaï ou encore la Russie.


Pourquoi la Russie ?

Nous avons fermé la filiale russe dès 2009, dans le prolongement de notre reconversion sur les métiers de l’implantation. En abandonnant toute la partie liée au business développement, on se retrouvait avec un volume d’activité trop faible pour justifier la structure en l’état. Dans un marché caractérisé par sa complexité règlementaire et son opacité, il aurait été nécessaire de mettre en place une agence de 15-20 personnes pour développer correctement l’activité. Il n'y avait pas de perspectives de volume d’affaires suffisant pour justifier un tel investissement et nous avons estimé qu’il valait mieux fermer et passer par des partenaires lorsqu’il serait nécessaire d’aller sur le pays.


Comment abordez-vous le contexte très particulier lié à la sortie de pandémie ?

En dépit des chamboulements et des crises qu'ont traversé les économies à travers le monde, la réalité reste que notre activité enregistre une croissance de 10 à 15% par an sur les 5 dernières années. La pandémie mondiale n’a pas dissuadé la majorité des dirigeants de passer à l’action. La crise sanitaire, avec les difficultés de déplacement qu'elle a engendré, a fait valoir l'intérêt de disposer de filiales à l'étranger -et de conseillers installés sur place, ou dans des hubs de proximité. Cela conforte notre modèle et le rôle de nos 13 filiales dans le monde dont l'activité et le poids relatif est soumis aux grandes tendances de l'économie mondiale. Il est encore trop tôt pour mesurer l'impact qu'aura le conflit en Ukraine, mais en attendant au premier trimestre 2022 nos accompagnements sont en hausse, et l'appétence des entreprises françaises pour s'implanter à l'étranger ne semble pour l'instant pas décroître. 

Quelles sont les dynamiques que vous observez, par zones, concernant l’appétence des sociétés françaises pour s’implanter hors de l’Hexagone ? 

Il y a plusieurs phénomènes qui viennent se conjuguer dans un contexte de fin d’une pandémie qui, on l’a dit, n’a pas dissuadé les entrepreneurs français d’investir à l’étranger. Chez Pramex International, on pourrait évoquer trois gros pôles de flux de signatures : les USA, l’Asie et l’Europe… puis l’Allemagne, qu’on est obligés de considérer un peu à part, de par le volume que le pays génère et le caractère des projets qui s’y développent, moins liés à l’univers des start-ups, et plus à celui des PME et des ETI. 

En Asie, le ralentissement de la Chine et l’incertitude forte liée au Covid a un effet certain sur la région. Notre filiale de Hong Kong, qui avait déjà vu ses activités affectées dès la révolution des parapluies, a perdu pas mal de flux au profit de la filiale de Singapour, qui s’est converti en un hub pour attaquer l’ensemble du marché asiatique. 

Pour les entreprises technologiques, les Etats-Unis restent une destination essentielle, la première souvent, et nos antennes de San Francisco, Chicago et New York sont plus actives que jamais. Pourtant, le baromètre de l’implantation à l’international, qui recense les projets d’investissement réalisés à l’étranger par les start-ups, PME et ETI disposant d’un siège en France et que nous publions chaque année, montre qu'un certain recentrage sur l'Europe, initié dès 2019, dans un contexte de guerre commerciale entre la Chine et les USA, se confirme, avec une part de marché étant passée de 44% en 2018, à 52% en 2020, et en hausse sur 2021. Chez Pramex, nous considérons de toutes manières le marché européen comme un marché domestique et nous estimons qu'il est important d'y faire ses gammes, avant de sauter le pas vers le grand export. 
 

Vos prévisions pour l’avenir ?

Portés par une dynamique de croissance, nous sommes confiants, d’autant plus confiants que notre appartenance au groupe BPCE nous assure une proximité idéale avec les PME et les ETI dans les territoires et les régions françaises. Le modèle de collaboration mutualiste qui nous caractérise, très implanté dans la société française, est un atout majeur pour Pramex International, dont les services sont en quelque sorte distribués par les Banques populaires et les Caisses d’épargne du groupe. Notre attractivité s’inscrit parfaitement dans le plan stratégique du groupe BPCE, notamment au plan interne par le biais des métiers spécialisés, où Pramex International constitue un pôle à part entière, et la solution proposée pour l’accompagnement à l’international. 

 

diego daccarett pramex espagne

Diego Daccarett, DG de Pramex International en Espagne

Quelles sont les perspectives pour le marché espagnol ?

Dans notre baromètre, derrière les USA et devant le Royaume-Uni, l'Espagne ressort dans le top 5 des pays d’implantation préférés des sociétés françaises. Ce qui est certain que le phénomène de recentrage sur l’Europe, qui semble se consolider, bénéficie évidemment à l’Espagne. En la matière, la proximité du pays avec la France joue en sa faveur, dans un contexte de réduction des émissions de CO2, de simplification des chaînes logistiques et de concentration de la production. 
Aujourd’hui notre filiale en Espagne dispose d’un portefeuille de près de 150 clients, avec une centaine de sociétés implantées dans le pays. Nous jouissons d’une belle part de marché sur le stock et sur le flux entrant, nous maintenons nos promesses de croissance sur les 2 dernières années, en dépit de la crise du COVID… Et l’année 2022 démarre très fort, ce qui n’exclut pas qu’un ralentissement économique, lié à une conjoncture défavorable, puisse se faire ressentir. Le FMI a déjà réduit ses prévisions concernant le taux de croissance du pays cette année [] et il faudra surveiller l’impact que la hausse des taux d’intérêt peut avoir sur la capacité des entreprises à se financer et à financer leurs projets. Malgré ce contexte, les grand pays Européens, dont l’Espagne, devraient rester le terrain de jeu privilégié des entreprises françaises.

 

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