La francophonie : pourquoi et comment ? Les ambassades, alliances françaises et autres associations francophones mettent un point d'honneur à promouvoir la langue à l'étranger. Un projet qui n'est pas désintéressé. Lepetitjournal.com/Varsovie a rencontré Franck Pezza, délégué de la Wallonie-Bruxelles à Varsovie, afin de comprendre le rôle de la francophonie et les stratégies pour la promouvoir.
Comprendre ce qu'est la francophonie nécessite un court retour historique. Si l'apparition du terme est estimée aux années 1880, où il est principalement utilisé par les géographes, il faut attendre 1962 pour que ce mot fasse son entrée dans le Petit Larousse. Popularisée par le sénégalais Léopold Sédar Senghor, l'expression « francophonie » ne recouvre alors plus seulement la langue, mais aussi une culture, multiple mais fédérée par l'idiome.
Promouvoir non seulement une langue, mais aussi une culture
« Apprendre le français, ce n'est pas seulement ouvrir une porte sur la France, la Belgique, la Suisse, et le Canada. Cela signifie également étendre ses opportunités vers l'Afrique et l'Asie. Il s'agit d'un atout professionnel mais aussi d'une qualité pour une vie d'aventure » estime Franck Pezza. La promotion de la francophonie s'est en effet institutionnalisée avec la création du Groupe des Ambassades, Délégations et Institutions francophones (GADIF) comptant 12 Etats ou régions membres.
Parmi eux, la région Wallonie-Bruxelles. La Belgique, pays fortement décentralisé, compte dans cette région quelque 5 millions de francophones. Ils bénéficient de représentations à l'étranger, à l'instar de la délégation présente à Varsovie. Un porte-étendard qui permet à la Wallonie-Bruxelles de se distinguer de la France et de promouvoir ses propres atouts : « Il y a encore trop peu d'auteurs belges traduits, et lorsqu'ils le sont, on les pense français, relève par exemple Franck Pezza. Amélie Nothomb, Jean-Philippe Toussaint, notamment. C'est un élément qui doit se développer. Nous avons malgré tout beaucoup de bandes dessinées, qui fonctionnent bien. Cette année, nous fêtons le 70e anniversaire de Lucky Luke, annonçant le relancement de la publication des albums en polonais. »
Des programmes de promotion de la francophonie de part et d'autre
Si le secteur culturel ne constitue pas l'essentiel du travail de la délégation Wallonie-Bruxelles, il en est cependant la vitrine. Coopération entre musées, promotion d'artistes wallons en Pologne, assurent la visibilité de la région. Mais la promotion de la Belgique francophones passe également par l'enseignement du français. La délégation soutient ainsi plusieurs lecteurs francophones dans les universités polonaises ainsi que l'instauration de classes francophones. La Silésie, cible principale de ce projet, pourvoit des résultats encourageants : la moyenne d'apprenants du français y est deux fois plus importante que la moyenne nationale.
Aujourd'hui, le français est la quatrième langue étrangère la plus apprise par les élèves polonais, derrière l'anglais, l'allemand et le russe. Le polonais est pour sa part enseigné en Wallonie-Bruxelles, principalement dans les universités. Un programme éducatif intitulé « Ouverture des langues et de la culture » tend à le promouvoir dans le secondaire également. Ce système repose sur la demande des élèves ; s'ils sont assez nombreux dans un établissement à demander l'apprentissage d'une langue, elle leur sera proposée. La Wallonie a établi des accords de ce type avec la Pologne, mais aussi la Turquie, la Roumanie, l'Espagne ou l'Italie. Ce programme s'adresse avant tout aux enfants issus de l'immigration. Franck Pezza explique : « nous souhaitons que les enfants gardent le contact avec leur culture et leur langue d'origine, d'abord du fait d'une vision humaniste des choses, mais également car demain, lorsqu'ils seront adultes en Belgique, ils créeront des liens avec la Pologne et développeront des relations économiques, commerciales, culturelles ».
Promouvoir la francophonie, un moyen d'anticiper de nouvelles coopérations économiques
La promotion de la francophonie n'est pas désintéressée. L'activité de la délégation Wallonie-Bruxelles a ainsi pour épicentre l'aide aux entrepreneurs belges souhaitant investir en Pologne. Elle est actuellement le neuvième pays d'exportation des produits de la Wallonie, très active dans le secteur de la chimie, la pharmacie et des biotechnologies. Développer la francophonie permet de former de nouveaux entrepreneurs bilingues et donc attirés par un développement binational. Promouvoir la culture belge encourage également les échanges et le tourisme ; les Polonais forment actuellement la neuvième communauté touristique en Wallonie.
Franck Pezza tient également à rassurer les investisseurs : le climat politique n'est selon lui absolument pas un frein à l'investissement en Pologne. « Le pays se développe, il va bien, il a de bonnes perspectives économiques, estime-t-il. Il s'agit d'un pays-cible prioritaire, non seulement dans le domaine économique, mais aussi culturel ». Deux éléments indissociablement liés.
Océane Herrero (lepetitjournal.com/Varsovie) - Lundi 24 octobre 2016
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