Alors que nous vous proposions de vous intéresser à l'?uvre d'Andrzej Wajda, trésors du cinéma polonais, LePetitJournal/Varsovie.com s'intéresse cette semaine à un autre pilier du septième art polonais, Roman Polanski. Couronné cette année meilleur réalisateur à la cérémonie des César pour la quatrième fois ?un record ! - l'occasion n'est que trop belle pour se plonger dans son univers cinématographique.
Né en France en 1933 d'un père polonais et d'une mère russe, Roman Polanski reste à Paris jusqu'à son quatrième anniversaire. Ses parents décident alors de retourner vivre en Pologne, à Cracovie. L'ouest de la Pologne ne tarde pas à être envahie par les troupes allemandes dès le mois de septembre 1939. Obligé de vivre dans le ghetto de Cracovie, il échappe de peu à la déportation, contrairement à ses parents et à sa s?ur. Après la guerre, Polanski découvre les joies de la comédie dans les camps scouts, et se fait remarquer à une audition pour endosser le rôle principal du film Fils du régiment. Il décide par la suite d'intégrer l'école des Beaux-Arts, mais finit par se faire renvoyer. Polanski n'a pas oublié son amour du cinéma, et est reçu en 1955 à la prestigieuse Ecole nationale de cinéma de Lodz. C'est là qu'il parfait ses connaissances techniques et artistiques. Connu pour son souci de minutie, Polanski impute à ses professeurs son professionnalisme.
Une reconnaissance immédiate sur la scène internationale
Il réalise son premier long-métrage Le couteau dans l'eau en 1962. Si l'accueil en Pologne n'est pas transcendant, le film permet au public international de découvrir un cinéaste des plus prometteurs. Ce film met en scène un couple aisé, parti en croisière sur leur yacht. Andrzej, un journaliste sportif, et sa femme Christine rencontrent alors un jeune étudiant qu'ils décident d'emmener avec eux. Si la croisière se passe plutôt bien au début, les relations entre Andrzej et l'étudiant finissent par se ternir. Si ce film dérange particulièrement en Pologne, c'est parce qu'il laisse penser que classes sociales sont toujours soumises à des rapports de force. Or, dans une Pologne communiste, le message du film est loin de faire l'unanimité. Pourtant, ce film rencontre un succès international. Il obtient un prix à la Mostra de Venise et est nominé aux Oscars dans la catégorie Meilleur film étranger.
Polanski devient alors un cinéaste reconnu et enchaine les récompenses. Son travail dans le film Répulsion avec Catherine Deneuve est récompensé par un Ours d'argent au festival de Berlin en 1965, tandis que Cul-de-Sac reçoit l'Ours d'or en 1966.
La coqueluche du Nouvel Hollywood
Polanski se rapproche du cinéma hollywoodien, comme en témoigne son long-métrage Rosemary's Baby sorti en 1968. Ce thriller fantastique mettant en scène une secte d'octogénaires satanistes se hisse à la tête du box-office. A la fois succès commercial et succès critique, le travail de Polanski est une nouvelle fois remarqué aux Oscars, puisque son film est nommé deux fois.
Malgré quelques échecs, il tourne en 1974 Chinatown, drame policier reprenant les codes du film noir américain. A Los Angeles, dans les années 1930, en pleine sécheresse, le détective Jake Gittes (Jack Nicholson) est engagé par Mme Mulwray pour enquêter sur son mari, soupçonné d'adultère. Atmosphère pesante, suspense développé jusqu'au bout. Tous les ingrédients sont réunis pour faire de ce thriller un classique du genre. Ce film est alors fortement récompensé aux Golden Globes et aux Oscars.
Polanski et la Pologne : un thème qu'il ose enfin aborder dans ses films
Contrairement à son ami et confrère Andrzej Wajda, Roman Polanski n'a pas abordé l'histoire de la Pologne dans ses débuts. D'ailleurs, seul son premier long-métrage fur réalisé en polonais. Pourtant, en 2002, il décide de traiter le passé polonais de façon personnelle et intime dans Le Pianiste. L'histoire se déroule dans le ghetto de Varsovie et suit la vie d'un ancien pianiste, contraint de survivre face à l'occupation allemande. Ce film bouleversant est récompensé aux Oscars. Polanski reçoit le césar du meilleur réalisateur, et Adrien Brody, interprète du pianiste, reçoit celui du meilleur acteur.
Malgré des tumultes très médiatisés avec la justice, Polanski poursuit son travail. Souvent salués par la critique, ses films font l'unanimité tant du coté des spectateurs que des spécialistes. Après The Ghost Writer (2010) et Carnage (2011), tous deux récompensés, La Venus à la Fourrure, film dans lequel joue sa compagne Emmanuelle Seigner parvient à égaler les succès précédents de Polanski.
Clémence Bragard (www.lepetitjournal.com/varsovie) - mardi 11 mars 2014