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CINEMA – Quelles sont les comédies qui font rire les Polonais ?

 Quelles sont les comédies cultes en Pologne ? Question à laquelle seule un(e) Polonais(e) peut répondre ! Alors lepetitjournal.com/Varsovie s'est associé à Katarzyna Mierzejewska pour vous concocter un petit florilège des grands classiques de la comédie polonaise, que vous pourrez à votre tour découvrir et visionner sous-titrés en anglais. Car comprendre la culture d'un pays, n'est-ce pas aussi comprendre son humour ? 

Le plus cinéphiles d'entre vous les connaissent peut-être déjà, les "comédies coup de c?ur" de Katarzyna Mierzejewska, notre correspondante polonaise, sont: La croisière (Rejs), de Marek Piwowski (1970), L'ours (Mi?) de Stanis?aw Bareja (1980), Seksmisja (Sexmission) de Juliusz Machulski (1984), Sami swoi, de Sylwester Ch?ci?ski (1967). Ayant été tournées entre 1967 et 1984, une petite mise en contexte s'impose.

Après la Seconde Guerre mondiale, le cinéma polonais porte le sceau du régime totalitaire russe stalinien. A partir de 1949, le réalisme socialiste devient le genre obligatoire dans les arts, y compris le 7ème art. Les cinéastes doivent se conformer à une propagande exaltant le bonheur de vivre dans le système socialiste ou à dénoncer les horreurs du capitalisme. Ce n'est qu'en 1956, trois ans après la mort de Staline, lorsque le régime communiste perd de son intransigeance idéologique, que le cinéma polonais réussit, dans la plupart des cas, à se soustraire aux exigences du pouvoir et braver la censure. L'humour, la parodie, la métaphore sont parmi les armes utilisées lorsque les cinéastes s'attaquent à la critique du système socialiste et la description d'un quotidien souvent absurde, celui vécu par les citoyens de la République populaire de Pologne. Trois des quatre comédies présentées (La croisière (Rejs), L'ours (Mi?) et Sexmission) s'inscrivent dans cette tendance. Aussi, lorsqu'il s'agit de pures fictions hilarantes, les situations décrites ne sont parfois pas dépourvues de réalisme, au grand étonnement d'un public qui n'aurait pas vécu cette période de l'histoire polonaise.

La croisière (Rejs), de Marek Piwowski (1970)

Un passager clandestin (Stanis?aw Tym) se faufile à bord d'un bateau de croisière sur la Vistule. Le capitaine le prend pour un guide culturel du Parti communiste et l'intrus s'adapte volontiers à son nouveau rôle. Il s'emploie alors à entraîner les passagers dans une série d'animations et jeux aussi stupides qu'avilissants: fête du capitaine, bal masqué, quizz d'intelligence, gymnastique collective, etc. En très peu de temps, le personnage a la main mise sur l'ensemble des passagers et crée sa propre dictature comique.

Tourné dans un style quasi-documentaire, avec pour seuls acteurs professionnels, les talentueux Jan Himilsbach, Zdzislaw Maklakiewicz et Stanislaw Tym, La croisière est considéré comme un chef d'?uvre et surtout le premier film culte du cinéma polonais, dont les répliques sont aujourd'hui connues par coeur du public. L'équipe de tournage s'était isolée pendant plusieurs semaines sur ce bateau et il en résulte une complicité entre les acteurs évidente à l'écran. De nombreuses scènes ont été improvisées, ce qui participe de la force comique du film. S'ajoute à cela une intrigue absurde qui fait de cette simple croisière une satire sans concession de l'ensemble du système communiste. Une des comédies polonaises les plus brillantes, à voir absolument !  

Lien  pour visionner le film avec sous-titrages en anglais : https://www.youtube.com/watch?v=IkEf42l6vo4&index=1&list=PL2gv9m758aYIO_93z_7IphRvYQbdzZGa2 

L'ours (Mi?) de Stanis?aw Bareja (1980)

Le président d'un club de sport (interprété par le phénoménal Stanis?aw Tym) veut quitter le pays pour se rendre à Londres avant son ex-femme, Irène, pour retirer une somme d'argent placée sur un compte commun pendant leurs jours heureux. Mais sortir d'un pays communiste n'est jamais chose aisée, même pour un malin comme Rysiek, surtout lorsque sa femme décide de détruire son passeport.

Le personnage principal nous guide dans une Pologne où la corruption, la bureaucratie absurde, le marché noir et le clientélisme sont omniprésents. Ce film traite également avec ironie de la « propagande du succès », mise en place par le gouvernement dans les années 70, qui s'attachait à vanter à tout prix les mérites du régime, quitte à nier les évidences. Ainsi, Bareja, pousse l'absurde à travers une célèbre anecdote dans le film : lorsque tous les tramways du pays tombent soudainement en panne, les médias parlent d'une mesure prise par le gouvernement afin d'encourager les usagers à marcher à des fins salutaires ! Cette situation, imaginée par le cinéaste, illustre la dimension comique de ce film et la volonté de dénoncer l'hypocrisie du régime. L'ours permet de voyager dans le temps, celui des dernières années du communisme en Pologne, et de comprendre l'humour noir indissociable de cette période.

Le film est disponible sous-titré en anglais en DVD seulement. A titre indicatif, voici 2 sites d'achat en ligne : http://www.amazon.com/Teddy-Bear-MIS-Stanislaw-Tym/dp/B0006VVN9A ou http://dvd.netflix.com/Movie/The-Teddy-Bear/70001001

Seksmisja (Sexmission), de Juliusz Machulski (1984)

C'est l'histoire d'Albert (Olgierd Lukaszewicz) et Max (Jerzy Stuhr), deux savants qui participent à une expérience d'hibernation en se faisant congeler. Mais l'expérience ne réussit qu'à moitié car, au lieu d'un sommeil de trois ans, comme initialement prévu, le réveil a lieu en  2044. Dans l'intervalle, le monde a changé radicalement : une guerre nucléaire a eu pour conséquence la disparition de tous les hommes, ne laissant en vie que les femmes. Ce sont elles qui gouvernent désormais, et les deux savants ne sont que les deux seuls survivants de leur sexe. Mais pour la reproduction il n'y a plus besoin d'hommes : les éprouvettes ont pris la relève. Comme la guerre a pollué la surface de la Terre, c'est dans des villes souterraines que la vie continue.

Sexmission est avant tout un film de science-fiction loufoque, qui traite de la question du genre. L'ironie sur le féminisme qui gagnait la Pologne pendant les dernières années du communisme y est criante. Les dialogues y sont particulièrement drôles et une expression du film est entrée dans le langage commun polonais : lorsque les femmes, dans le film, affirment que Copernic n'était pas un homme mais une femme, l'expression continue d'être utilisée aujourd'hui, lorsqu'on souhaite, ironiquement, contredire une évidence. Tout en riant du féminisme, Machulski fait également une critique du totalitarisme dans ce film. 

Lien pour visionner le film avec sous-titrages en anglais :  http://www.cda.pl/video/154476d0%20 

Sami swoi (Our folks), de Sylwester Ch?ci?ski (1967) 

Sami swoi raconte l'histoire de deux familles ennemies (les Kargul et les Pawlak) voisines qui ne cessent de se quereller. Le premier conflit remonte au temps où la vache des Kargul avait pénétré dans le champ de blé des Pawlak, avant la Seconde Guerre mondiale. Puis contraintes de déménager, après la guerre, dans les ex-territoires allemands récupérés après le déplacement des frontières de la Pologne vers l'Ouest, elles n'en décident pas moins de rester encore une fois voisines, malgré l'animosité mutuelle. Si leur intention initiale est d'essayer de vivre en paix, les choses changent lorsque le fils des Pawlak et la fille des Kargul tombent amoureux. 

Dans cette comédie, on s'aime et on se déteste. Aucune des deux familles ne peut admettre qu'elle a en réalité besoin de l'autre. Et puis mieux vaut vivre à côté d'un ennemi que l'on connaît plutôt qu'à côté d'un étranger ! La société décrite est celle où la méchanceté, la rancune et l'avidité n'empêchent pas d'être pieux et de parler de justice. La fraternité côtoie l'hostilité, et la solidarité l'envie. Le réalisateur est parvenu à décrire habilement la mentalité de la société polonaise de cette époque, dans une province qui se reconstruit au milieu des ruines. En regardant ce film chaque Polonais sait qu'il rit un peu de lui-même !

Le film est disponible sous-titré en anglais en DVD seulement. A titre indicatif, voici 2 sites d'achat en ligne : http://www.empik.com/sami-swoi-trylogia-checinski-sylwester,p1043833167,film-p ou http://www.amazon.com/Sami-swoi-Edycja-Kolekcjonerska-Region/dp/B00D1D7WF4

Ces quatre comédies ne sont que quelques suggestions, il en existe évidemment, beaucoup d'autres. Elles ont le mérite d'être restées intemporelles et ont une véritable valeur historique et sociologique. Reflets d'une époque révolue, elles n'en demeurent pas moins essentielles pour comprendre la société polonaise d'aujourd'hui !

Laura Giarratana et Katarzyna Mierzejewska (lepetitjournal.com/Varsovie) ? Lundi 7 mars 2016

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lepetitjournal.com varsovie
Publié le 6 mars 2016, mis à jour le 15 mars 2024
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