Quelques jours après la visite d’Emmanuel Macron en Asie du Sud-Est, l’Ambassadeur de France pour l’Indopacifique a publié une tribune dans le Bangkok Post. Elle s’intitule « À la recherche de « partenariats de souveraineté » ».Nous vous en livrons une traduction réalisée par nos soins. Les intertitres sont de la rédaction.


À la recherche de « partenariats de souveraineté »
En 2018, le président français Emmanuel Macron a posé les bases de la stratégie française pour l’Indopacifique, une région qui devient le nouveau centre de gravité de l’économie mondiale, mais qui connaît également des tensions croissantes et une concurrence accrue entre les grandes puissances. En tant que nation résidente dans les océans Indien et Pacifique, par le biais de ses territoires et collectivités d’outre-mer, la France a un intérêt direct dans la stabilité et le développement de la région. Dans ce contexte, la France souhaite agir comme une force stabilisatrice et promouvoir un multilatéralisme efficace fondé sur l’État de droit, l’inclusivité et le respect de la souveraineté.
La stratégie de la France vise à relever tous les défis régionaux
La stratégie française vise à relever tous les défis régionaux par une approche coopérative et multidimensionnelle. Au-delà de la défense et de la sécurité, elle met également l’accent sur la lutte contre le changement climatique, la protection de la biodiversité et la promotion d’une gestion durable des océans, de la connectivité et de la santé. La priorité de la France est de forger des « partenariats de souveraineté » avec les pays de l’Indopacifique. Ces partenariats sont conçus autour d’objectifs partagés de réduction des dépendances et de renforcement de la résilience grâce à des programmes de coopération répondant à des défis communs. Ils contribuent à préserver la liberté d’action et à accroître la large de manœuvre des partenaires dans un environnement de plus en plus soumis à une concurrence stratégique.
L’ASEAN occupe une place centrale dans la stratégie de la France
L’association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) occupe une place centrale dans la stratégie de la France, car elle est au cœur du multilatéralisme régional et joue un rôle crucial dans l’élaboration d’une architecture de sécurité efficace. La vision exposée dans les perspectives de l’ASEAN sur l’Indopacifique ainsi que les mécanismes et la méthode développés par les institutions de l’ASEAN s’alignent étroitement sur l’approche française, fournissant ainsi une base solide pour renforcer nos partenariats.
La France et l’ASEAN renforcent leur collaboration sur les pandémies
À cet égard, une étape importante a été franchie en 2020 avec la mise en place du Partenariat de développement France-ASEAN et l’adoption ultérieure d’un plan d’action. Ce nouveau cadre de coopération agit comme un catalyseur pour renforcer l’engagement français auprès des trois communautés de l’ASEAN et pour accélérer la mise en œuvre de projets sur des priorités communes, en s’appuyant sur l’expertise reconnue de la France. Il s’agit notamment de la coopération dans les domaines tels que la sécurité régionale, le climat et l’environnement, l’économie bleue et la connectivité. À cet égard, je suis heureux de constater que nous disposons déjà d’un programme important d’actions communes avec des résultats à venir sur la qualité de l’air, le transport maritime propre, l’efficacité énergétique des bâtiments, le fonds de renforcement des capacités multisectorielles et, très bientôt, nous l’espérons, sur ke réseau électrique de l’ASEAN (APG). La France et l’ASEAN renforcent également leur collaboration sur les pandémies, en termes de préparation et de réponses, en s’appuyant sur la collaboration de longue date de la France avec les gouvernements de l’ASEAN, les instituts de recherche et la plateforme CSO dans la démarche « One Health » ou « Une Seule Santé » et le lutte contre les maladies transmissibles. La France a lancé en décembre 2024 une nouvelle phase d’un programme de prévention et d’atténuation des maladies zoonotiques avec la Thaïlande et le Laos, dans le cadre de l’initiative PREZODE. Au total, l’Agence française de développement prévoit d’engager 20 millions d’euros (742,7 millions de bahts) dans la région pour soutenir les interventions et la recherche qui réduisent les risques d’une nouvelle pandémie.
La France veut contribuer à l’architecture de la sécurité régionale
L’adhésion de la France en tant qu’observateur aux groupes de travail de la Réunion des ministres de la Défense de l’ASEAN (ADMM+) pour 2024-2027 démontre une fois de plus sa volonté de contribuer concrètement à l’architecture de sécurité régionale. La France participera aux groupes sur la sécurité maritime, et l’Aide Humanitaire et les Secours en cas de Catastrophe. Cet engagement se traduit également par le déploiement régulier de la Marine nationale et de l’Armée de l’air et de l’espace, dans le but d’assurer le respect de la liberté de navigation et de survol, de sécuriser l’accès aux biens communs mondiaux et de préserver la stabilité stratégique. Ces déploiements permettent à la France de participer à des exercices bilatéraux et multilatéraux visant à renforcer l’interopérabilité avec les forces armées partenaires et à mener des opérations conjointes de surveillance, comme ce fut le cas récemment lors du déploiement du groupe aéronaval dans le cadre de la mission CLEMENCEAU 2025.
Engagement français et européen dans la région indopacifique
La France continue de jouer un rôle de premier plan dans l’avancement de l’agenda européen dans la région indopacifique. Lancé à Paris pendant la présidence française de l’UE en 2022, le Forum ministériel de l’UE pour la coopération dans la région indopacifique est devenu un format unique et efficace qui réunit chaque année les États membres de l’UE, les partenaires de la région indopacifique et les organisations régionales afin de faire progresser la coopération autour de trois piliers : la sécurité et la défense, le climat et les défis mondiaux, et l’économie et la connectivité.
Le lancement officiel à Bangkok, le 27 mai, du projet Global Ports Safety (GPS), cofinancé par l’UE et la France en partenariat avec la Pologne, marque une nouvelle étape dans l’engagement français et européen dans la région. Ce projet, porté par Expertise France, s’inscrit dans la stratégie Global Gateway de l’UE, qui vise à améliorer la connectivité maritime entre l’Asie et l’Europe de manière plus sûre, plus verte et plus résiliente.
Marc Abensour, Ambassadeur de France pour l’Indopacifique
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