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SPEAK CRYPTIC, une vision du street art en noir et blanc 

Speak Cryptic, street art, singapourSpeak Cryptic, street art, singapour
Speak Cryptic (c) Marina Bay Sands
Écrit par Clémentine de Beaupuy
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 7 mai 2018

Farizwan Fajari, connu sous le nom Speak Cryptic, est un jeune artiste vivant et travaillant à Singapour. A l’occasion de la première exposition Street art à Singapour, Art from Street de l’Art Science Museum, sa présence au milieu des artistes, souvent cagoulés pour rester anonyme, ayant fait leurs « armes » très jeunes dans la rue, sur les métros, les chantiers, pouvait intriguer. Comment un artiste singapourien grandit et se nourrit dans un pays où la loi interdit toute peinture murale dit « sauvage » en dehors des commandes autorisées ? 

lepetitjournal.com : Comment devient-on « Street Artist » à Singapour ? 

Speak Cryptic : Pour moi, cela a été possible grâce à un collectif assez fort. L’esthétisme du street-art m’a séduit d’emblée. J’ai été assez chanceux de rencontrer des amis, très intéressés par cet esthétisme graphique ici à Singapour. Et puis, il y a des sites internet très connus qui vous montrent tout ce qui ce fait à travers le monde et les artistes qui créent.  Je me suis formé aux techniques, mais aussi à cet esthétisme particulier du street-art. Avec cette communauté d’artistes, nous avons grandi ensemble, trouver notre propre chemin créatif. Pour des raisons personnelles, je me suis formé aux feutres. Je ne travaille pas à la bombe ! En fait, je suis plutôt mauvais ! 

Et votre attirance, vers l’art et la création a-t-elle toujours été là ? 

Depuis mes 14 ans, je veux dessiner et peindre. Je n’avais pas encore l’idée d’être un artiste et d’en faire mon métier, mais j’ai commencé des études dans ce sens. Je suis diplômé de Lassalle et je pense avoir eu de la chance d’avoir pu bénéficier de tel enseignement, ce qui n’était pas forcément le cas il y a quelques années ici. 

De quoi traitent vos œuvres, toujours en noir et blanc, avec des personnages aux faciès reconnaissables, serrés les uns aux autres ? 

Je développe, depuis presque 13 ans maintenant, les mêmes personnages. Ils reviennent toujours dans toutes mes histoires et les scènes que je réalise. Le travail que je présente à l’Art Science Museum, A State of Decline,fait partie d’un ensemble qui traite des ruptures amoureuses et comment les surmonter. La première partie de ce travail est à Kuala Lumpur et fait partie de la biennale.  Ces personnages sont également dessinés au milieu de lieux que je connais, dans lesquels j’ai grandi. Par exemple, pour cette série, je dessine The Substation,un lieu très important pour mes amis et moi, qui m’a soutenu et aidé à développer ma créativité. 

Pourquoi vos fresques sont-elles toujours en noir et blanc ? 

En fait, je suis daltonien (colours blinders en anglais). Je vois les couleurs primaires mais je ne fais pas la différence s’il y a des nuances de tons. Je distingue mal le rose d’un violet par exemple. Quand j’ai étudié, les professeurs m’ont poussé à utiliser et à travailler la couleur mais j’aime voir ce que le public voit également. Je ne me sentais pas à l’aise dans ce décalage de perception et je l’ai réglé en utilisant uniquement le noir et blanc. 

Justement, que pensez-vous de la scène artistique singapourienne ? 

La scène artistique ici est réduite.   L’avantage est que l’on se connaît tous ! C’est une scène également jeune. J’envisage cette taille et cette jeunesse aussi comme des atouts. J’adore échanger avec d’autres artistes, créer des projets multidisciplinaires. Je suis également musicien dans un groupe. Cette jeunesse me plait, elle ressemble à mon âge. Je me considère à la fois faisant partie de cette scène artistique et spectateur de cette scène. Je regarde fasciné et très admiratif les œuvres de mes « héros » présentées ici à l’exposition « Art from street, »à l’Art Science Museum où j’ai aussi la chance d’y être exposé. C’est un rêve qui devient réalité. Cette communauté de personnes que m’a porté au début, je la retrouve maintenant en fréquentant et échangeant avec ces artistes. Pour moi, le street-art réside aussi dans cet esprit communautaire, de partage, de collaboration entre artistes et j’adore ça ! 

 

 

A state of decline, Speak Cryptic (c) Marina Bay Sands
A state of decline, Speak Cryptic (c) Marina Bay Sands 

 

Zoom sur ... 

THE SUBSTATION est le premier centre d’art multi-disciplinaires de Singapour, fondé en 1990 par Kuo Pao Kun, auteur et metteur de scène de théâtre et artiste engagé, qui a été détenu pendant plus de 4 ans, dans les années 70,  sans procès, pour ses engagements artistiques. Ce lieu, à but non lucratif,  a la vocation de « nourrir » les artistes locaux en proposant ateliers, conférences, rencontres, résidences d’artistes et expositions. Installée dans une ancienne centrale électrique, à Armenian street, ses expositions, comme celle présentée en 2017, Discipline The City, veulent casser les codes et frontières entre les disciplines artistiques et l’engagement du public, également acteur de leur réflexion artistique. Réalisée en 3 actes, cette « exposition », conférence ou forum,  se voulait une réponse à la question du contrôle, de l'accès et de la politique de l'espace en milieu urbain. 

C’est un lieu important pour les artistes singapouriens, considéré comme un espace de création libre des contraintes et de l’art « officiel ». 

Détails pratiques : 

Art from street, Art Science Museum 

jusqu'au 3 juin 2018 

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