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ART CONTEMPORAIN– Li Tianbing, un pont artistique et intime entre Chine et Occident.

Écrit par Lepetitjournal Singapour
Publié le 18 janvier 2017, mis à jour le 18 janvier 2017

 

Li Tianbing est un peintre chinois qui vit sur trois continents, en Chine, aux Etats-Unis et en France Influencé par la peinture contemporaine occidentale, il fait parti de cette génération d'artistes chinois, reconnus internationalement qui portent un regard singulier sur l'évolution de son pays.  Né en 1974 en Chine communiste, ses premières peintures qui ont connues le succès évoquaient la politique de l'enfant unique avec des enfants figés et des couleurs sombres. Avec subtilité  et esthétisme, ces peintures lèvent le voile sur une Chine du quotidien, celle que connaissent les familles et des millions d'anonymes. 

 

 Rencontre avec Li Tianbing

www.lepetitjournal.com/singapour - A travers vos peintures, vous racontez la Chine d'aujourd'hui et celle de votre enfance. Quels sont les thèmes plus particulièrement que vous abordez pour parler de la Chine contemporaine ?

Li Tianbing - Dans ma nouvelle série (présentée à Art Stage Singapore 2017, Pearl Lam Gallery) je parle de la Chine d'aujourd'hui dans la banalité du quotidien. Contrairement à mes anciennes peintures, qui parlaient du passé et étaient figées autour de la figure de l'enfant, j'ai voulu montrer la Chine qui vit, aujourd'hui, en vitesse accélérée.

Au premier regard, on perçoit le mouvement et ensuite la scène se dévoile.  Ce sont des scènes banales, de « micro-violence ». Ce ne sont pas des violences dont on parle dans la presse mais elles existent au quotidien. En tant que chinois, je connais cette violence dont personne ne parle. Elle témoigne d'une fracture entre les plus pauvres et les plus riches. Je pense que les plus pauvres aujourd'hui ne peuvent pas s'élever vers la classe moyenne, d'où cette violence qui éclate. Dans l'un de mes récents tableaux (photo 1) je montre, par exemple, une femme se faire trainer dans la rue par les cheveux : c'est la maitresse d'un homme marié qu'on insulte et maltraite en public. Personne n'intervient. Pourtant, c'est très violent.

Vous travaillez donc par série, celle de l'enfant et maintenant celui de la violence du quotidien. En tant qu'artiste, comment vous renouvelez-vous ?

- En tant qu'artiste, c'est un besoin : celui d'explorer, de rechercher. J'avais l'idée d'exprimer la vitesse, le mouvement. Je souhaitais travailler sur un autre style.

La violence est laide, donc je souhaitais ces traits effacés, gommer les identités. Dans mes peintures sur l'enfant, il y avait le regard et les traits marqués. La violence est dure à regarder. J'ai voulu fragmenter l'image à la fois pour protéger le regard et exprimer les conséquences de cette violence sur les victimes.

 

Dans ce processus de renouvellement, une galerie a t'elle un rôle à jouer ou est-ce une démarche exclusivement personnelle ?

- Ce besoin de changement de style et de sujet était très personnel. Il est vrai que ma série sur l'enfant unique connaissait le succès, se vendait bien.

Je pense que c'est le rôle d'une galerie de soutenir ce changement. Commercialement, il y a un risque, c'est vrai. J'ai de la chance, avec Pearl Lam gallery, mes nouvelles propositions ont été acceptées et soutenues.

Li Tianbing b. 1974
 

Li Tianbing  Xiao San 2, 2016, oil on canvas, 157.5 x 198cm (62 x 78 in.)

Vous  avez étudié en France, à l'école des beaux-arts à Paris d'ou votre maitrise du français mais aussi d'une certaine façon occidentale d'envisager votre art. Pouvez vous nous en dire plus de votre regard d'artiste entre occident et chine ?

- Je suis arrivé à Paris en 1996 et la première exposition que je suis allé voir est une rétrospective de Francis Bacon à Beaubourg. Quel choc ! A l'époque, il n'y avait pas d'expositions d'art contemporain en Chine. C'était un choc esthétique ; pour un chinois, ces tableaux peuvent être très laids. C'est la notion de beauté qui était remis en cause. J'avais déjà peint des tableaux dans une recherche esthétique très chinois. Francis Bacon m'a poussé à trouver mon style. J'ai donc passé 5 ans à Paris. J'ai essayé de trouver une manière de me situer entre l'Occident et la Chine. J'ai étudié les artistes contemporains et la peinture. La peinture contemporaine n'était pas aussi bien représentée qu'aujourd'hui. Je crois que les beaux-arts est une des seules écoles où l'on peut apprendre à peindre. En fait, dès l'âge de 10 ans, je voulais devenir un artiste.

 

Comment aussi jeune, a t'on le désir de devenir un artiste ?

- Pour mon anniversaire de 10 ans, ma mère m'avait offert un livre d'art sur un artiste chinois Xu Beihong, très connu pour ses encres de chevaux.  Cet artiste était parti également, au début du XXème, étudié aux Beaux-Arts à Paris et il est l'un des premiers artistes à introduire une modernité dans la peinture chinoise. Je voulais suivre son parcours. Il m'a fait rêvé. Quand j'ai pu, j'ai donc préparé le concours des Beaux-Arts. Ayant reçu les félicitations du jury, j'ai commencé à exposer d'abord en Province en France, puis en Suisse?

Li Tianbing  Small Violence1 2016 oil on canvas 40.5x51cm
 

Li Tianbing,  Small Violence1, 2016, oil on canvas, 40.5x51cm 

 

Maintenant, vous travaillez et exposez sur plusieurs continents. A votre avis, y ?a t'il des différences significatives d'aborder l'art au delà du sujet et des thèmes traités ?

- Ce qui m'a frappé à l'époque où j'étudiais et qui me frappe toujours est qu'en France, tout le monde connaît l'art. Les gens dans la rue parlent des expositions qu'ils ont vues. Les galeries sont de très bon niveau. Les français ont du goût et savent apprécier l'art. C'est assez unique je trouve.

Ce qui n'est pas forcément le cas, en Chine ou aux Etats-Unis. Aux Etats-Unis, les gens sont plus intéressés par le sport ! Ce qui fait défaut en France est le manque de moyens financiers. Les galeries françaises sont moins puissantes que les galeries américaines. Et pour moi, l'Asie se situe entre les 2 ! Il y a un vrai marché en Chine pour l'Art contemporain. Mais pour soutenir des artistes, il faut du temps et instaurer la confiance auprès de ses clients. En Chine, très peu d'entreprises ont plus de 5 ans, les galeries en font parties.

 

Propos recueillis par Clémentine de Beaupuy, www.lepetitjournal.com/singapour, le jeudi 19 janvier 2017 

Pour mieux connaître son travail et suivre son actualité cliquer ici 

 

Photos courtesy of Pearl Lam Gallery  

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Publié le 18 janvier 2017, mis à jour le 18 janvier 2017

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