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Léonore Baulac, une danseuse étoile à Singapour

Léonore Baulac danseuse étoile Opéra Paris SingapourLéonore Baulac danseuse étoile Opéra Paris Singapour
@ Bernie Ng
Écrit par Sabrina Zuber
Publié le 25 juin 2019, mis à jour le 5 janvier 2024

Lors de la tournée asiatique du ballet de l’Opéra national de Paris, j’ai eu le privilège de rencontrer la danseuse étoile Léonore Baulac à Singapour le 21 juin. Je l’ai observée pendant quelques jours dans les coulisses du théâtre de l’Esplanade. J’ai particulièrement apprécié sa fraîcheur, son regard pétillant, son sourire doux, même à l’issue d’une journée intense de leçons et de répétitions. Petite et fine, longue chevelure bouclée et dorée, les yeux couleur du ciel, elle me reçoit dans sa loge, juste avant la répétition générale. En coulisses, la montée d’adrénaline est tangible, Léonore Baulac, en revanche, m’ouvre la porte de sa loge avec un grand sourire, elle a l’air calme et confiante. Étrangement, c’est moi qui ai le trac ! Je n’ai que quinze minutes devant moi…

 

Quelles sont, à votre avis, les spécificités qui rendent le ballet de l’Opéra national de Paris si particulier ?

Léonor Baulac : La majorité d’entre nous a suivi tout un cursus à l’École de danse. Cela contribue à donner une façon de danser commune et, donc, à créer une très belle unité. C’est aussi une compagnie avec une très grande histoire derrière elle, avec beaucoup de maîtres de ballet et danseurs qui nous transmettent des informations issues des plus grands chorégraphes. La transmission est un élément très important au sein de l’Opéra de Paris. Quand on rentre dans la compagnie, on démarre dans le corps de ballet, il y a une hiérarchie assez structurée. Cet élément nous motive car tout le monde a l’espoir et la possibilité de devenir soliste (par rapport à d’autres compagnies où il existe moins de mobilité interne). Moi-même, j’ai passé 5 ans dans le corps de ballet pendant lesquels j’ai toujours rêvé d’être soliste.

 

Vous avez été consacrée « Etoile » en 2016, à la fin d’une représentation du Lac des Cygnes sur une chorégraphie de R. Nureyev. Quand votre nomination est arrivée, quel a été votre ressenti ?

C’est difficile à décrire. La nomination se passe à la fin d’une performance, au moment où l’on est vraiment épuisé. Dans mon cas, c’était la première fois que je dansais le rôle principal de Odile/Odette et donc il y avait une forme d’incrédulité. Je n’arrivais pas à comprendre que c’était en train de se passer réellement. D’un côté, je voulais profiter de ce moment unique, et en même temps, j’avais une sorte de petite appréhension… Je me demandais si la direction de l’école était vraiment sûre de sa décision. Tout se passe si vite, on est sur scène parmi nos collègues et devant le public. On essaie de garder le contrôle.

 

Quels sont vos rôles préférés, en général, et en particulier, dans ce spectacle ? Il y a-t-il une pièce qui vous tient particulièrement à cœur ?

D’une façon générale, j’adore danser des rôles d’interprétation, dans des ballets qui ont une forte narration, où l’histoire est au cœur du ballet, par exemple Romeo et Juliette ou La Dame aux Camélias.

Dans le programme présenté à Singapour, j’aime particulièrement danser la pièce de William Forsythe, Blake Works I, parce qu’elle a été créée pour nous et nous a offert un moment de partage extraordinaire avec le chorégraphe, un artiste vraiment spécial, qui est capable de pousser chaque individu dans ce qu’il sait faire le mieux. Nous avons la sensation d’être vraiment encouragés et poussés à prendre des risques et à nous dépasser. Cela nous permet de beaucoup évoluer. Cette pièce représente un véritable moment de joie.

 

Opéra national de Paris, Singapour
@ Bernie Ng

 

Lors de la prochaine étape du tour asiatique, à Shanghai, vous allez danser un double spectacle : le programme présenté à Singapour et le Lac des Cygnes. Est-ce que cela représente une difficulté particulière, lors de la même tournée, de changer de rôle et de style ?

Le changement de style n’est pas très difficile pour moi, personnellement, car je ne danse pas la pièce contemporaine Season Canon, de Crystal Pite (danser sans pointes, par rapport aux autres pièces en programme). En revanche, le Lac des Cygnes exige beaucoup de puissance et nous n’avons pas beaucoup de temps pendant notre séjour à Singapour pour le répéter.

 

Être danseuse étoile ne signifie pas seulement avoir la maitrise d’une technique parfaite. Cela exige également des qualités dramatiques d’expression et d’interprétation. Comment approchez-vous un rôle ?

Pour l’aspect technique, il s’agit d’un travail quotidien et continu, que l’on fait pendant le cours du matin. Cela représente un moment très important dans notre journée. Les répétitions qui suivent sont plus focalisées sur l’interprétation. Personnellement, je me documente beaucoup, je regarde les vidéos des danseuses que j’admire et qui m’inspirent, même si je m’en détache assez vite pour forger ma propre interprétation. J’essaie aussi toujours de laisser une part de spontanéité au moment du spectacle, parce qu’il y a des choses magiques qui peuvent se passer sur le moment, par rapport à la relation avec son partenaire par exemple. Ce moment spontané donne de la fraîcheur à un rôle que l’on peut souvent danser pendant une carrière. Il contribue à empêcher que notre performance tombe dans la routine.

 

Si vous aviez à choisir un métier dans une nouvelle vie, seriez-vous encore danseuse ?

J’ai la chance d’avoir une autre vie après la danse, puisqu’une carrière de danseuse est relativement courte ! Je ne sais pas si j’aurai une autre passion aussi intense, mais j’aurai sûrement la chance d’expérimenter des choses bien différentes. Peut-être dans la transmission, surtout aux gens qui ne souhaitent pas devenir danseurs professionnels, car on peut transmettre la danse uniquement comme une joie, une manière de connaître son corps et de s’exprimer.

 

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