L'Ambassadeur de France à Singapour Marc Abensour a conféré ce lundi 28 mars 2022 à Andrew Lau le titre de Chevalier dans l’Ordre National du Mérite au nom du Président de la République française Emmanuel Macron, pour ses contributions à la culture française en qualité de Président de l’Alliance française de Singapour. Toute l'équipe singapourienne de Lepetitjournal.com lui adresse ses plus vives félicitations !
L’occasion pour nous de republier l’interview menée par Laurence Huret pour Lepetitjournal.com le 11 mai 2021
Né à Kuala Lumpur, en Malaisie, Andrew Lau été envoyé à l’âge de 9 ans en Angleterre pour étudier à l'Orley Farm School, puis à la Harrow School et à l'University College London, où il a étudié l'architecture. Alors que l’économie se dégradait en Angleterre, il est arrivé à Singapour en 1991 avec l'intention d'y passer quelques années avant de retourner en Malaisie, mais a rencontré à Singapour son épouse Tan Lu Gim et n’en est jamais reparti. Architecte de profession, Andrew Lau a participé à la rénovation du bâtiment de l'Alliance française de Singapour en 2005, avant de rejoindre le conseil d'administration, d’en devenir l’un des vice-Présidents, puis le Président en septembre 2020.
Andrew, quel est votre parcours ?
Je suis architecte de profession et j'ai participé à la rénovation du bâtiment de l'Alliance française lorsque Pierre-Emmanuel Jacob en était le Directeur exécutif : à cette époque, nous avons déplacé la galerie au niveau 2, l'administration au niveau 4 et ajouté les couleurs à la façade en verre du bâtiment. Je suis maintenant plus impliqué dans l'immobilier avec des projets à Singapour, Manchester et Berlin. J'ai rejoint le conseil d'administration de l'Alliance Française de Singapour en septembre 2007, en suis devenu vice-Président en avril 2008, et enfin Président en septembre 2020.
Mon histoire d'amour avec la France et la culture française a été influencée par l'ouverture d'esprit de mes parents et leur volonté de se lier d'amitié avec les étrangers qui venaient travailler et vivre en Malaisie. Le fait que mes deux parents aient étudié en Angleterre (mon père à l'Imperial College de Londres et ma mère à Cambridge) m'a également aidé, car ils étaient tous deux très internationaux pour leur époque. Mon père a travaillé en Allemagne après la Seconde Guerre mondiale et parlait allemand, tandis que ma mère a appris le français à l'Alliance française de Kuala Lumpur avec son professeur M. Roquigny, dont le fils Philippe et sa femme Sybil sont maintenant nos amis. Comme le monde est petit, nous avons découvert que Philippe enseignait le français à l’artiste Hossan Leong.
Suite à l'amitié de mes parents avec l'Ambassadeur de France en Malaisie de l'époque, M. et Mme de Quirielle (1971 à 1976), ils ont demandé à mes parents s'ils pouvaient m'adopter comme leur "filleul". Dès lors, je passais plusieurs vacances d'été dans leur maison de campagne à Annonay, en Ardèche, ou des vacances d'hiver dans leur appartement de la rue Vaneau à Paris. Mme de Quirielle était toujours très fière de parler de ses ancêtres de Montgolfier et Marc Seguin qui ont contribué aux réalisations de la France pendant la révolution industrielle et cela m'a donné un aperçu différent de la culture française, bien que d'un âge révolu. Néanmoins, c'est cette expérience de ma vie que j'aimerais partager à l'Alliance Française de Singapour.
Qu'est ce qui vous a amené à Singapour ? Avez-vous des membres de votre famille avec vous à Singapour ?
L'Angleterre a connu une récession qui a débuté en 1989. Alors que l'économie continuait à se dégrader en Angleterre, je suis arrivé à Singapour en 1991 avec l'intention d'y passer quelques années avant de retourner en Malaisie, mais je me suis finalement marié à mon épouse Tan Lu Gim à Singapour et je suis resté ici depuis.
Ma fille travaille à Londres, tandis que mon fils travaille à Singapour. Pour ce qui est de ma famille en général, la famille de ma mère s'est installée à Penang il y a cinq générations, si bien qu'au fil des ans, nous avons des parents en Malaisie et à Singapour.
Quels souvenirs gardez-vous de Singapour lors de votre arrivée ? Quels évènements vous ont le plus marqué ?
Singapour est devenue plus cosmopolite au cours des 20 dernières années, avec un afflux important de personnes venues du monde entier. Cela lui a donné plus de dynamisme, ce qui est particulièrement évident dans le domaine de la nourriture et des boissons.
On essaie de vivre de sa passion et pour moi, c'est lié à mon intérêt pour les arts et la culture. Cela a commencé lorsque je faisais mes études à Londres. Mon parrain honoraire, Dato Richard Curtis, m'emmenait dans les musées et au théâtre pour m'apprendre la culture anglaise. C'est ainsi que Mme de Quirielle m'a dit que "les voyages forment la jeunesse", c'est-à-dire les voyages en France et en Europe, ont enrichi ma vie et ont influencé la façon dont j'exécute mes projets immobiliers. Le voyage dans l'immobilier a commencé avec la vieille école de Mount Sophia qui a brisé les frontières de ce qui était considéré comme de l'art. Mes projets suivants, au 222 Queen Street et au 51 Waterloo Street, étaient également consacrés à la promotion d'un large éventail d'arts. Mon projet actuel, au 406 Joo Chiat Place, compte également quelques locataires qui se consacrent aux arts.
A quels challenges l’Alliance française a du-t-elle faire face au cours des dernières années?
L'Alliance Française est avant tout une école de langue, elle a la chance d'avoir un théâtre et une galerie où nous pouvons promouvoir des activités culturelles. Le théâtre présente un large éventail de la culture française, des films aux pièces de théâtre et aux récitals musicaux. La galerie d'art est dédiée aux arts visuels et tente de présenter des œuvres ayant un lien avec la France. Cependant, j'ai le sentiment que l'enseignement de la langue française ne suffit pas à permettre aux élèves d'apprécier et de comprendre pleinement la richesse de l'histoire et de la culture que la France a à offrir.
Pour beaucoup, l'exposition à la culture quotidienne de la France se concentre sur les vins et la nourriture française, mais ce n'est que la partie émergée de l'iceberg. Je me souviens que la première chose que Mme de Quirielle voulait m'apprendre avant de rencontrer ses proches était les manières de table françaises. Nous avons donc décidé de développer à l’Alliance française un programme d'expositions pour présenter l'excellence française, en commençant par cette exposition intitulée “À Table” avec des ateliers sur l'étiquette française, car je pense que les étudiants bénéficieraient de l'apprentissage de ces aspects de la vie quotidienne française.
Comment voyez-vous la situation actuelle à Singapour dans le contexte de la pandémie ?
Singapour, comme de nombreux autres pays, a connu pire. Quand je me rappelle les histoires que mes parents racontaient sur l'occupation japonaise de la Malaisie, ce que nous vivons aujourd'hui n'est vraiment rien en comparaison. En temps de guerre, les gens perdent tout, au moins la pandémie est bien gérée maintenant à Singapour et nous pouvons vivre une vie assez normale. Certains peuvent se plaindre de ne pas pouvoir prendre des vacances ou faire la fête librement, mais ce sont des choses insignifiantes étant donné que nous ne sommes pas dans un pays où la situation du Covid 19 est vraiment terrible. Comme pour tous les bouleversements de l'histoire du monde, nous surmonterons cette période et nous espérons adopter une approche plus significative de la vie.
Comment envisagez-vous votre avenir ?
Le voyage de la vie n'est jamais prévisible et l'année dernière nous a montré à quel point il peut être difficile de planifier, en particulier dans les affaires. Des défis apparaîtront toujours, mais on peut espérer réaliser le rêve de pouvoir passer la moitié de l'année en Europe et l'autre moitié en Asie. Passer le printemps et l'automne dans la nature de la campagne européenne et, bien sûr, un peu de ski en hiver.
Dans le cadre de l’anniversaire des 20 ans de lepetitjournal.com, l’édition de Singapour a souhaité donner la parole et mettre en lumière des Français et francophones résidant à Singapour depuis une vingtaine d’années.