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Connaissez-vous ces femmes qui ont marqué l’histoire au Chili ?

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Quatrième de couverture du livre "Chilenas Rebeldes" de María José Cumplido
Écrit par Naïla Derroisné
Publié le 8 mars 2021, mis à jour le 16 octobre 2023

À l’occasion de la journée internationale des droits des femmes, lepetitjournal.com Santiago vous présente 11 Chiliennes qui ont marqué l’histoire de leur pays, mais dont on parle peu, ou pas du tout.

Elles sont guerrières, médecins, alpinistes, poétesses, journalistes, commandantes, professeures, astronomes, féministes, et bien plus encore... Dans son livre Chilenas Rebeldes, l’historienne et écrivaine María José Cumplido dresse le portrait de 75 "Chiliennes rebelles". Des récits courts et dynamiques, accompagnés de dessins réalisés par les illustratrices Carolina Angulo, María José Arce et Crossa Grossa.

En ce 8 mars 2021, journée internationale des droits des femmes, Lepetitjournal.com Santiago a choisi de vous présenter 11 femmes qui apparaissent dans cet ouvrage. Elles viennent de différentes époques, exercent diverses professions, mais elles ont toutes un point en commun, celui d’avoir marqué l'histoire du Chili.

Janequeo (16e siècle)

Janequeo était une guerrière mapuche qui s’est battue contre les Espagnols lors de leur arrivée sur le continent latino-américain. Janequeo a défendu ses terres et vengé la mort de son mari. Elle était l’une des leaders du peuple mapuche au moment d’affronter l’ennemi. Elle connaissait les techniques de guerre des Espagnols et donc était en charge de diriger les troupes et d’attaquer les forteresses. Elle gagna de nombreuses batailles et en perdit d’autres. Mais c’est son courage et son dévouement pour sa communauté que l’histoire aura retenu. Personne ne sait ce qu’elle est devenue. Après l’un de ses combats, Janequeo a disparu dans le sud du pays sans laisser de traces. C’est l’énigme non résolue de la vie de cette grande femme insoumise.

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Janequeo - illustration de Carolina Angulo

Mercedes Marín (1804-1866)

Mercedes fut la première femme au Chili à publier de la poésie. Dans sa jeunesse, elle lut beaucoup et apprit à parler plusieurs langues. Inspirée par le travail de son père, l’un des premiers participants au conseil du gouvernement, Mercedes écrivit et publia ses premiers vers sur l’indépendance du Chili, à l’âge de 14 ans ! Elle devint célèbre grâce au poème qu’elle rédigea sur l’assassinat du ministre Diego Portales. Ce texte causa un fort émoi pour son contenu, mais le vrai scandale vint de la signature apposée à la fin du poème : "Écrit par une femme". Beaucoup doutèrent qu’une femme puisse avoir écrit de tels lignes. Mais le scepticisme dura peu, car quelques mois après, le journal El Mercurio de Valparaíso révéla l’identité de l'artiste controversée. Mercedes Marín fut reconnue comme étant la première poétesse chilienne.

Rosario Orrego (1834-1879)

Rosario fut la première femme journaliste et romancière du Chili. Enfant, puis adolescente, elle eut la chance de pouvoir apprendre à lire et à écrire, un luxe auquel peu de femmes chiliennes avaient accès. Mariée très jeune, puis veuve, Rosario s’installa à Valparaíso avec ses cinq enfants, après la mort de son mari. Elle commença à écrire ses premiers romans qui furent publiés dans les magazines de la ville. Ses écrits racontaient plusieurs périodes de l'histoire du Chili, rendant compte des coutumes et de la vie quotidienne. Au début, elle signait avec un pseudonyme, car une femme écrivaine, c’était quelque chose de très étrange pour l’époque. Ce n’est que sur la fin de sa vie qu’elle décida de signer de son vrai nom. En 1873, elle fut acceptée à l’Académie des Belles Lettres de Santiago et fonda, par la suite, la Revue de Valparaíso. Même si elle vécut relativement peu, Rosario Orrego ouvrit le chemin de la littérature à toutes les femmes écrivaines qui lui succédèrent.

Isidora Goyenechea (1836-1897)

Isidora Goyenechea fut la femme entrepreneure la plus importante du siècle au Chili, et elle en vint même à posséder la plus grande fortune mondiale de l’époque. Son père mourut lorsqu’elle avait 4 ans. Sa mère hérita de l’immense fortune de son époux et se maria avec Matías Cousiño, qui, grâce à l’argent de sa femme, devint un éminent entrepreneur. Isidora se maria avec son demi-frère, autant dire qu’elle n’aurait jamais eu de problèmes économiques. Mais Isidora n’est pas restée assise à espérer que les autres s’occupent de son argent. Après la mort de son beau-père, et puis celle de son mari, elle se chargea du business familial. Elle entreprit la construction du Palais Cousiño, du parc de Lota et commença à améliorer les entreprises dédiées à l’exploitation minière et à l’agriculture. Isidora voyageait régulièrement en Europe pour apprendre sur les nouvelles technologies et les ramenait au Chili. En un rien de temps, elle vit sa fortune croître de façon exponentielle. Au-delà de l’argent, Isidora a contribué à améliorer les conditions de travail des ouvriers. Elle finança des maisons pour ses employés, construisit des écoles et des hôpitaux, et veilla à ce que les familles de ses employés aient une bonne alimentation. Isidora est morte à Paris et donna une grande partie de sa fortune à des œuvres de charité.

Eloísa Díaz (1866-1950)

À l’âge de 15 ans seulement, Eloísa Díaz entra à la faculté de médecine de l’Université du Chili. Pour être si jeune, et surtout pour être une femme, beaucoup de ses compagnons d’université doutèrent de son intelligence. Mais très rapidement, Eloísa fit disparaître tous les doutes. Elle obtint son diplôme de chirurgienne en 1886 et fut la première femme médecin du Chili, et d’Amérique Latine ! Elle commença à travailler dans un cabinet de gynécologie, mais très rapidement sa route prit un autre chemin. Les conditions hygiéniques de l’époque, notamment dans les écoles, inquiétaient de nombreux professionnels de santé. Eloísa Díaz commença à visiter des écoles et produire des rapports sur ce qu’il fallait améliorer dans chacune d’entre elles. Elle lutta aussi pour que l’État fournisse des vêtements et un déjeuné à tous les enfants. De cette façon, ils pourraient tous avoir accès à l’éducation indépendamment de leurs ressources.   

Elena Caffarena (1903-2003)

Elena Caffarena fut l’une des principales défenseuses du droit de vote pour les femmes. Un droit que les Chiliennes obtinrent en 1949. À cette époque, les femmes n’avaient pas la main sur leurs finances. Elles n’avaient pas non plus de droits civils et leur liberté était très restreinte. Elena fonda en 1935 le Mouvement Pro Émancipation de la Femme, MEMCH. C'est le premier groupe qui s’est battu pour abolir ces injustices. Elena, avocate de profession, disait être féministe par vocation démocratique. En 1941, elle présenta un projet de loi qui permettrait aux Chiliennes de voter à toutes les élections. Huit années plus tard, la loi sur le droit de vote des femmes fut approuvée. Elena a toujours manifesté à haute voix son refus du rôle que l’on assignait aux femmes. Grâce à elle, le Chili connut l’un des tournants majeurs de son histoire.

Julieta Kirkwood (1937-1985)

Julieta Kirkwood est devenue l’une des penseuses féministes chiliennes les plus connues de la seconde moitié du 20e siècle. Elle étudia la Sociologie et les Sciences Politiques à l’Université du Chili. C’est lorsqu’elle était étudiante qu’elle commença son travail, influencée par la révolution de mai 1968 en France. Le coup d’état militaire de 1973 ne l’empêcha pas de continuer de penser, rêver, et d’être libre. Elle écrivit toutes ses réflexions dans plusieurs livres. Julieta soutenait que sans le féminisme, il ne pouvait pas y avoir de démocratie. Grâce à un travail intellectuel et à des études sur les genres, elle fonda les mouvements féministes qui luttèrent dans les années 1980. Les femmes s’organisaient, protestaient et manifestaient dans les rues. Julieta est morte avant le retour de la démocratie au Chili. Mais sa pensée inspire, encore aujourd’hui, les femmes et les hommes qui souhaitent vivre dans un monde plus juste.  

Gladys Marín (1941-2005)

Elena Fritz ou Virginia Castro, furent quelques-uns des nombreux noms que Gladys Marín a dû adopter à cause de la répression militaire des années 1970. Pendant douze ans, Galdys vécut dans la clandestinité, en cachant sa réelle identité. Elle étudia pour être professeure, mais s’orienta ensuite vers la politique. Elle intégra les Jeunesses Communistes et vit dans le projet du président socialiste Salvador Allende, une opportunité de créer une nation plus juste. Quand éclata le coup d’état, Gladys Marín était une figure reconnue de la gauche chilienne. C’est pour cela qu’elle est partie en exil pendant quelque temps. Au retour de la démocratie, Gladys Marín fut choisie pour être la secrétaire générale du Parti communiste – le poste le plus haut de l'organisation. Elle fut la première féministe à présenter une candidature pour l’élection présidentielle, et inspira de ce fait beaucoup de femmes qui la considèrent comme une combattante infatigable des luttes contre l’injustice et l’inégalité.

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Gladys Marín - iIllustration de María José Arce

María Teresa Ruiz (1946)

María Teresa Ruiz était si fascinée par l’univers qu’elle en vint à découvrir un corps céleste. Elle est la première Chilienne à avoir étudié l’astronomie et s’est diplômée au Chili ainsi qu'aux États-Unis. C’est également la première femme à avoir reçu le Prix National des Sciences Exactes, en 1997, lorsqu’elle découvrit une Naine brune [objet substellaire – NDLR], qui fut baptisée "Kelu". D’autres scientifiques avant elle avaient enquêté sur ces "Naines" mais jamais personne n’en avait trouvé. María Teresa Ruiz reçut divers prix de la part de la communauté scientifique et continua ses observations de nébuleuses, d’astres, d’exoplanètes... Aujourd’hui, elle est l’une des astrophysiciennes les plus importantes mondialement. Elle publia également des livres destinés au grand public, adultes comme enfants.

Comandante Tamara (1956-1988)

Son vrai nom était Cecilia Magni. Cecilia est née dans une famille aisée et reçut une excellente éducation dans l’un des collèges les plus prestigieux du pays. Son appartenance à l’élite la protégea de la réalité que vivait une grande partie de la population sous la dictature de Pinochet. Quand Cecilia entra à l’Université du Chili pour étudier la Sociologie, elle rencontra d’autres étudiants issus de différents secteurs sociaux. Elle se rendit compte de la violence et de la répression qui sévissait dans son pays. À partir de ce moment, tout changea pour elle. Cecilia décida de rejoindre le Front Patriotique Manuel Rodriguez. Il s’agissait d’un mouvement révolutionnaire qui combattait la dictature. Ses membres utilisaient des pseudonymes pour protéger leur identité. C’est ainsi que Cecilia Magni est devenue la Commandante Tamara. C’est la seule femme qui parvint à atteindre un si haut poste au sein de l’organisation. Elle participa à l’opération la plus importante du Front : l’assassinat de Pinochet. La Commandante Tamara était chargée de coordoner les véhicules. L’opération fut un échec. Quelques années plus tard, des agents de Pinochet l’assassinèrent. Elle avait 32 ans.  

Patricia Soto (1970)

Originaire de Santiago, Patricia Soto dédia sa vie à l’alpinisme. Elle commença à pratiquer cette discipline lorsqu’elle était étudiante, alors que l’alpinisme était encore considéré comme "un sport pour les hommes". Ce préjugé ne l’empêcha pas de poursuivre sa passion. Elle commença par gravir les montagnes El Plomo et Provincia, dans la région métropolitaine de Santiago. Puis en 1977, elle escalada l’Aconcagua, en Argentine, le plus haut sommet d’Amérique du sud. Patricia ne s’arrêta pas là. En 2001, elle mena un groupe de femmes et, ensemble, elles gravirent le mont asiatique le plus haut du monde : l’Everest. Elle fut ainsi la première femme chilienne, et par la même occasion la première femme d’Amérique Latine, à réaliser cet exploit. Elle continua l’aventure en escaladant le Kilimandjaro en Afrique, le Carstensz en Océanie, le Denali en Amérique du Nord, le Vinson en Antartique, l’Elbrouz en Russie...

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Patricia Soto - illustration de Crossa Grossa

 

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