La Chine a lancé vendredi une sonde pour collecter des échantillons sur la face cachée de la Lune, une première mondiale, qui serait une avancée pour l'ambitieux programme du pays.
Une fusée transportant la sonde Chang'e 6 a décollé du Centre de lancement spatial de Wenchang, sur l'île tropicale de Hainan (sud), peu avant 17h30 (09h30 GMT), ont constaté des journalistes de l'AFP près du site.
Des centaines de spectateurs se sont rassemblés à proximité pour assister à la dernière avancée du programme spatial chinois.
L'agence d'Etat Chine Nouvelle a salué ce lancement comme "la première entreprise de ce type dans l'histoire de l'exploration humaine de la Lune".
"L'ensemble de la mission comporte de nombreux défis, chacune des étapes étant liées entre elles et est éprouvante pour les nerfs", a déclaré à Chine Nouvelle Wang Qiong, concepteur en chef adjoint de la mission Chang'e 6.
Il s'agit du dernier projet de la Chine, qui, selon Washington, déguise un programme spatial militaire sous l'apparence d'un programme civil.
La mission Chang'e 6 a pour objectif de collecter environ deux kilos d'échantillons lunaires sur la face cachée de la Lune et de les ramener sur Terre à des fins d'analyse.
Il s'agit d'une mission techniquement complexe, d'une durée de 53 jours, qui consiste notamment à lancer une sonde sur cet hémisphère de la Lune qui tourne le dos en permanence à la Terre.
"Chang'e 6 collectera pour la première fois des échantillons de la face cachée de la Lune", a indiqué à la presse Ge Ping, vice-directeur du Centre chinois d'exploration lunaire et d'ingénierie spatiale.
En 2019, la Chine avait déjà posé un engin sur la face cachée de la Lune mais il n'avait pas rapporté d'échantillons.
La sonde doit se poser dans l'immense bassin Pôle Sud-Aitken, l'un des plus grands cratères d'impact connus du système solaire.
Une fois sur place, elle ramassera du sol et des roches lunaires et mènera des expériences dans la zone où elle aura atterri.
Sa mission terminée, elle doit revenir vers la Terre et atterrir au Centre de lancement spatial de Wenchang.
Le président Xi Jinping a donné un coup d'accélérateur au "rêve spatial" de la Chine. La deuxième économie mondiale a injecté des milliards de dollars dans son programme spatial militaire afin de rattraper les Etats-Unis et la Russie.
Pékin a déjà enregistré plusieurs succès, notamment la construction de la station spatiale Tiangong ("Palais céleste") où ont été envoyés la semaine dernière un nouvel équipage de trois astronautes.
- "Grande importance pour l'humanité" -
La Chine a également fait atterrir un astromobile (un petit "rover" motorisé) sur Mars et c'est le troisième pays au monde à avoir envoyé un humain dans l'espace par ses propres moyens.
Les Etats-Unis comptent faire atterrir des astronautes sur la Lune en 2026 avec leur mission Artémis 3. La Chine compte aussi y envoyer des humains, d'ici 2030.
La Chine est exclue de la Station spatiale internationale depuis 2011, date à laquelle les Etats-Unis ont interdit à la NASA de collaborer avec Pékin. La Chine a alors développé son propre projet de station spatiale.
L'avancée rapide du programme spatial chinois suscite l'inquiétude de Washington.
En avril, Bill Nelson, le patron de la Nasa, a affirmé que les Etats-Unis se trouvent désormais engagés dans une "course" avec Pékin.
"Nous pensons qu'une grande partie de ce qu'ils appellent leur programme spatial civil est en fait un programme militaire", a-t-il dit, devant une commission chargée des dépenses à la Chambre des représentants, à Washington.
Chang'e 6 est la première des trois missions sans équipage envoyée sur la Lune prévues par la Chine pour cette décennie.
Puis, Chang'e 7 explorera le pôle sud lunaire à la recherche d'eau, tandis que Chang'e 8 tentera d'établir la faisabilité technique de la construction d'une base sur le satellite naturel de la Terre, Pékin affirmant qu'un "modèle de base" sera achevé d'ici à 2030.
Selon les scientifiques, la face cachée de la Lune - appelée ainsi parce qu'elle est invisible depuis la Terre et non parce qu'elle ne capte jamais les rayons du soleil - est très prometteuse pour la recherche, car ses cratères sont moins recouverts par d'anciennes coulées de lave que ceux de la face proche.
Cela pourrait donc signifier qu'il sera plus facile de collecter des matériaux afin de mieux comprendre comment la Lune s'est formée.
"Les échantillons collectés par Chang'e 6 auront un âge géologique d'environ 4 milliards d'années", a estimé M. Ge.
"La collecte d'échantillons lunaires provenant de différentes régions et de différents âges géologiques et la réalisation d'expériences sont d'une grande valeur et d'une grande importance pour l'humanité", a-t-il ajouté.