Avec des peintures, des ready-mades, des œuvres en LEGO, des sculptures et maquettes, des photos, et des vidéos, cette exposition incontournable compte pas moins de 120 œuvres de cet artiste, fervent militant pour les droits de l'homme. Elle met en lumière toutes les phases de la carrière d'Ai Weiwei, qui s'étend sur plus de quarante ans.
Il est possible de découvrir l’exposition “In Search of Humanity” d’Ai Weiwei au Kunsthal Rotterdam du 30 Septembre 2023 au 3 Mars 2024. Voici un aperçu des grandes lignes de cette exposition à ne surtout pas manquer. Selon les textes de l’exposition, “Ses œuvres d'art témoignent de sa quête d'humanité et d'un monde meilleur (...) L'art conceptuel n'a jamais été aussi vivant, plus intense ou plus pertinent.”
Ai Weiwei (66 ans), artiste chinois de renommée mondiale et militant des droits de l'homme, passe une enfance en exil à la suite de la révolution culturelle Chinoise de 1966 à 1976, car son père, le poète Ai Qing, était accusé d'avoir de « grandes sympathies de droite » par le régime communiste. La famille est d'abord exilée dans le nord-est du pays, puis dans la province du Xinjiang où elle vit dans des conditions de pauvreté et d'oppression extrêmes. Peu avant la mort de Mao, la famille Ai est autorisée à retourner à Pékin. Là, Ai Weiwei s'inscrit à l'Académie du cinéma, où les étudiants sont admis pour la première fois après la Révolution culturelle. Ai Weiwei vit ensuite des manifestations étudiantes réprimées à Pékin, avant de partir aux États-Unis en 1981 pour suivre une formation de cinéaste.
“Tout est Art. Tout est politique.” - Ai Weiwei
À New York, Ai Weiwei découvre pour la première fois l’art moderne et contemporain. Il s'inspire fortement du travail des artistes Marcel Duchamp et Andy Warhol, délaissant la peinture pour les ready-mades. Dans les années qui ont suivi son retour à Pékin en 1993, Ai Weiwei fréquentait régulièrement les marchés aux puces, pour acheter d'anciens objets découverts sur des chantiers pendant des travaux. Il en fait des ready-mades, remettant en question leur signification et valeur. Il les modifiait, les recombinait, les rejoignait, voire les détruisait. Il illustre ainsi le traitement des biens culturels en période de bouleversements politiques.
L'un de ses ready-mades, Forever Bicycles (2003), semble ready-made pour les Pays-Bas! En 2003, Ai Weiwei crée son premier objet vélo, s'inspirant du ready-made de Marcel Duchamp, Bicycle Wheel 1913. C'est une construction de bicyclettes sans guidon. La Chine, une nation de cyclistes, accorde une signification particulière à ce mode de transport. Enfant, Ai a compris son importance. Jusqu'à la fin des années 1980, les vélos dominaient le trafic urbain en Chine. Cependant, le développement urbain a vu l'émergence de véhicules motorisés, contribuant au smog. Ai utilise des vélos de la marque Forever, les rendant non fonctionnels, symbolisant la perte d'individualité dans une société collective.
Ses ready-made évoluent le long de sa carrière, et incluent aujourd’hui le tapis roulant de Julian Assange et un panda en peluche rempli de matériel classifié de l'Agence nationale de sécurité Américaine, la National Security Agency (NSA). Il cherche à rendre visibles des sujets politiques actuels et les cimentiers dans la mémoire collective internationale. Pour créer Panda to Panda (2015), Ai Weiwei a collaboré avec le journaliste et expert en sécurité informatique Jacob Appelbaum, l'un de ceux qui avaient révélé que les appels téléphoniques de la chancelière allemande Angela Merkel étaient mis sur écoute par l'agence de renseignement américains. L'œuvre est composée de vingt pandas en peluche bourrés de copies déchiquetées des documents secrets divulgués par le lanceur d'alerte Edward Snowden, ainsi que d'une sauvegarde de ceux-ci sur une carte mémoire Micro SD.
Ai Weiwei: “La personne la plus dangereuse de Chine”
Le 12 mai 2008, un puissant séisme de magnitude 7,9 a ravagé le sud-ouest de la Chine, particulièrement la province du Sichuan. Des villages ont été anéantis, des villes détruites, causant 90 000 décès. Ai Weiwei a réagi en se rendant sur place pour comprendre la tragédie. Il a découvert que la corruption et la négligence dans la construction des écoles avaient conduit à leur effondrement, devenant une question politique sensible, à l'approche des Jeux olympiques de Pékin. Ai a entrepris une enquête, recensant 5 197 élèves décédés, malgré l'opposition des autorités. Les données étaient publiées sur son blog, qui a été censuré puis bloqué.
Deux ans d'enquête dévoilent l'ampleur de la tragédie et mettent en lumière la lutte d'Ai pour la vérité, malgré les obstacles gouvernementaux. "Le type d'État autoritaire que nous avons en Chine ne peut pas survivre s'il répond aux questions - si la vérité est révélée, ils sont finis. Ils ont donc commencé à me considérer comme la personne la plus dangereuse de Chine. C'est ce qui m'a poussé à devenir un artiste, mais aussi un activiste", a écrit Ai Weiwei dans le Guardian en 2018. En tant que dissident, toutes traces d'Ai ont maintenant étés effacés de l'internet en Chine.
La critique des gouvernements autoritaires est un fil conducteur dans la vie et l'œuvre de Weiwei, ce qui a conduit à son incarcération en solitaire en 2011. En effet, Il crée des œuvres d'art porteuses d'un message social et n'hésite pas à critiquer ouvertement le gouvernement de son pays natal. Selon les autorités chinoises, il est accusé d'appeler la population à se révolter contre le système politique du pays. Durant ces 81 jours de captivité, Ai a mémorisé toutes les caractéristiques de sa cellule jusque dans les moindres détails. Il a ensuite réalisé une reconstitution de cette pièce à une échelle proche de la grandeur nature sous la forme d'une installation de plain-pied, reconstruite au Kunsthal. Il est libéré au bout de trois mois, mais reste assigné à résidence.
"Quand il n'y a nulle part où aller, l'on est c'est chez soi nulle part. " - Ai Weiwei
En juillet 2015, les autorités chinoises ont enfin restitué à Ai son passeport, après quoi il a pu à nouveau voyager librement. Il s'installe à Berlin, où il est témoin des effets du flux de réfugiés et des discussions politiques qui l'accompagnent en Europe. Depuis 2015, quand il à déménagé son studio sur l'île grecque de Lesbos, Ai cherche à attirer l’attention mondiale sur la crise des réfugiés et migrants, qu’il qualifie de "crise humaine". Déterminé à s'impliquer davantage politiquement, il commence à faire des recherches et à réaliser des films sur le sujet.
Pour une des œuvre sur ce thème, Pillar (2016), il crée un pilier en porcelaine montrant six scènes traitant de la situation des réfugiés: la guerre, les ruines de la guerre, la fuite, la traversée de la mer, les camps de réfugiés et les manifestations et protestations dans les camps. Les frises d’images évoquent les poteries grecques antiques, tandis que le bleu et blanc correspond à l’esthetique de la porcelaine traditionnelle chinoise. Avec ces associations, Ai inscrit ces scènes contemporaines dans un contexte historique. Avec Crystal Ball (2017), Ai utilise des gilets de sauvetage laissés sur la plage par les réfugiés. Il les disposa en forme de fleur de lotus autour d'une imposante boule de cristal.
Planifiez votre visite
In Search of Humanity est réalisée en collaboration avec le studio d'Ai Weiwei, l'Albertina Modern de Vienne et le commissaire invité Dieter Buchhart, et dure du 30 Septembre 2023 au 3 Mars 2024. Le musée est ouvert de 10h à 17h, du mardi au dimanche. Il est ouvert exceptionnellement le lundi 16 Octobre 2023. Vous pouvez réserver vos billets et consulter les différents tarifs en ligne ici. Le Kunsthal Rotterdam se trouve à Museumpark, Westzeedijk 341, Rotterdam. S’y rendre depuis la station Rotterdam Centraal prend environ 25 minutes à pied, et 14 minutes avec les trams 7 direction Willemsplein, ou 8 direction Spangen. Il est aussi possible de s’y rendre avec le métro D ou E: le musée se trouve à dix minutes à pied de la station de métro Leuvehaven.
L’oasis de verdure qu’est le Museumpark rassemble le Kunsthal Rotterdam, un musée d’histoire naturelle, le musée Boijmans van Beuningen (temporairement fermé en raison de travaux de rénovation de grande envergure), ainsi que du Dépôt Boijmans van Beuningen, contenant plus de 151 000 œuvres. Het Nieuwe Instituut, un institut artistique dédié à l'architecture et le design contemporains, se trouve aussi à proximité. Vous pouvez donc facilement passer la journée à papillonner de galerie en galerie si vous souhaitez éviter le froid pendant les jours d'hiver.
Autrement, vous pouvez vous réchauffer autour d’une boisson chaude dans le café du musée, le Kunsthalcafé, le café du Het Nieuwe Instituut, le Westkop. Pour ceux qui prennent le café très au sérieux, Dune coffee, à cinq minutes à pied du Kunsthal, prépare son café d'origine éthique avec la minutie d'un chimiste. Vous pouvez aussi commander une ‘biertje’ ou autre boisson dans l’un des multiples bars et restaurants qui se trouve le long de la rue ‘Witte de Withstraat’ à dix minutes à pied du Kunsthal. Cette rue devient particulièrement vibrante de nuit. Si la météo s’y prête, vous pouvez aussi déambuler dans Het Park, au bord de la Nouvelle Meuse.