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La cheffe du Bilboquet ? Plus qu’une Superbabe, une badass !

Cheffe du BilboquetCheffe du Bilboquet
Camille Martin ©️ JC Agid
Écrit par Femmes Leaders - avec le soutien de Ortoli Rosenstadt LLP
Publié le 6 mars 2020, mis à jour le 6 mars 2020

Le Bilboquet, petit temple de la restauration new-yorkaise depuis 1985, fête ce dimanche la Journée internationale de la femme. Quelques surprises au menu : des mets délicats, un DJ et une musique en fond colorée et des macarons au symbole féminin préparés exprès pour l’occasion, un brunch tonitruant, joyeux, élevé comme le Bilboquet en a l’expérience.

 

Plus qu’en salle, c’est dans les cuisines que la femme est célébrée. Tout comme chez Benoit avec Laetitia Rouabah, Aquavit avec Emma Bengtsson, Cosme avec Daniela Soto-Innes ou encore La Mercerie avec Marie-Aude Rose, le chef des cuisines du Bilboquet est « une » cheffe.

À peine âgée de 27 ans, Camille Martin a parcouru le monde. “Je vis downtown ; je suis tatouée de partout ; et je suis la cheffe exécutive du Bilboquet à New York ” résume-t-elle tout en dégustant un cappuccino, attablée au Café Bilboquet qui, avec le restaurant éponyme, encadre l’entrée du French Institute Alliance Française sur la 60e rue de Manhattan.

La première à occuper la fonction prestigieuse de chef de cuisine du bistrot historique créé dans l’Upper East Side par Philippe Delgrange – et dont Éric Clapton, Ron Perelman et Steven Witkoff sont les partenaires - il était naturel que Camille Martin ait envie de mettre les femmes à l’honneur. Elle a même décidé d'ajouter un nouveau tatouage à sa collection, un mot sur son bras gauche en clin d’œil au héros new-yorkais Superman, un mot qui évoque la générosité de sa cuisine, son ambition, son courage aussi : « Superbabe ».

Superbabe, Camille Martin veut être source d’inspiration dans sa cuisine. « Nous l’avons promue car elle exprime déjà un talent et une vision rares dans ce métier », explique Philippe Delgrange.

Dès qu’elle le peut, la cheffe du Bilboquet part à la rencontre des habitués et des clients d’un jour. Elle essaye de deviner leurs goûts, suggère des plats, veut les surprendre, les amuser. Elle prend le même plaisir à parcourir les épiceries, fromageries, boucheries et poissonniers de la ville, à la recherche des meilleurs ingrédients qui viendront agrémenter ses recettes. Lorsqu’elle le peut, elle orchestre aussi des dîners de gala, comme celui des American Friends of Blérancourt le soir de la remise du Anne Morgan’s Women of Courage Award à la philanthrope Hélène David-Weill.

 

Le Bilboquet New York

Ceviché de noix de Saint Jacques. Diner du Gala 2019 des American Friends of Blérancourt. ©️Annie WATT

 

Mais en cuisine comme dans la vie, Camille Martin reste ferme, concentrée sur ses objectifs et ne se compromet pas facilement : une vraie badass qui a déjà le souci de partager son savoir et prodiguer ses conseils sous forme de mentoring à d’autres jeunes femmes dans la profession. « En ce moment, je coache une cheffe pleine de promesses, Solène Hérard, qui tout en ayant fait ses classes à Paris chez le chef étoilé Yannick Alléno et à Bordeaux dans le restaurant Moony, rêve à son tour d’exprimer son talent outre-Atlantique. »

Car Camille Martin sait l’importance des conseils de ses pairs et des opportunités qui lui ont été proposées.

Ses tatouages témoignent de ces personnes clés et des souvenirs qui jalonnent déjà sa jeune histoire dans le monde culinaire. En voici un qui décrit un oiseau à l'intérieur d'une lune. « Ce sont mon frère et ma sœur ». Un autre représente une fleur de Lys : « ma mère a un peu de sang bleu », ajoute-t-elle, amusée.

C'est en famille que sa carrière a commencé. Née en Normandie, Camille Martin grandit dans le Languedoc Roussillon. Elle est à peine âgée de huit ans lorsqu'elle s’installe derrière les fourneaux. Son père, un représentant en commerce, ne retourne  au domicile familial que les vendredis. Il prend l’habitude ces soirs-là de ne cuisiner que pour lui et son épouse, une experte en vins. Camille et son frère dînent même souvent séparément de leurs parents et apprennent à se débrouiller seuls. Repas après repas, la jeune fille observe les gestes et l’énergie de son père, « le meilleur cuisinier que j’ai connu », dit-elle. Elle se nourrit de sa passion, s’en inspire pour améliorer ses dîners de fin de semaine et décide, adolescente, de rejoindre une école hôtelière. À sa sortie, Camille Martin trouve une place dans un des plus prestigieux restaurants français, Le Jardin des Sens des frères Pourcel à Montpellier.

Sur son torse, juste en dessous de son cou, on peut apercevoir un piment tatoué. « Les épices sont à la base de tout », explique-t-elle. « Cuisiner consiste à rassembler délicatement trois éléments : un produit, un peu de technique et un assaisonnement sans lequel aucune viande ni poisson ni légume ne pourrait être sublimé », ajoute-t-elle.

 

Le bilboquet New York

Camille Martin prépare un hors d'oeuvre avec du Caviar d'Aquitaine pour le diner du Gala 2019 des American Friends of Blérancourt. ©️Annie WATT

 

Son apprentissage chez les frères Pourcel se poursuit lorsqu’ils lui proposent de s’envoler pour le Sri Lanka où ils viennent d’ouvrir un restaurant aux tendances méditerranéennes. Un nouveau tatouage fait d'une fleur de Lotus, symbole des saveurs asiatiques, vient alors compléter sa collection.

À Colombo, un client français lui fait part de son rêve d'ouvrir un bistrot à New York. « Et si vous m’accompagniez dans cette aventure », lui propose-t-il. New York n'avait jamais fait partie de son imaginaire professionnel mais l'ambition de ce projet inattendu ne lui laisse aucune alternative. Camille Martin range ses couteaux et traverse à nouveau la planète. « J'ai eu trois semaines pour rencontrer mes nouveaux fournisseurs, m’acclimater aux produits locaux, construire une équipe et rédiger un menu ». Il aura suffi de quelques mois pour que ce bistrot de 38 places, Le Troquet, devienne une sensation à SoHo.

À présent bien installée aux États-Unis, Camille Martin s’inspire des influences de l'Équateur et du Mexique. Rien de surprenant à ce qu’elle se fasse alors tatouer le dessin d’un taco sur les côtes.

Relevant tous les défis, elle accepte l’invitation du chef exécutif du Bilboquet, Sylvain Portay, qui avait travaillé pour Alain Ducasse au Louis XV à Monaco et dans ses restaurants américains, et qui avait dirigé les brigades prestigieuses du Cirque à New York puis du Ritz-Carlton de San Francisco. La voilà ainsi à nouveau sous la direction d’un maître, prête à prendre sa relève le moment venu.

« La promouvoir était logique ; maintenant, il faut lui donner l’envie de rester et de se développer, en lui offrant la possibilité d’influencer les menus de nos autres restaurants à Sag Harbor, Denver, Atlanta et du Café Bilboquet à New York », ajoute Philippe Delgrange qui a placé à la direction de ses établissements une autre femme, Dobi Trendafilova.

En cuisine, la réputation de Camille Martin est celle d'être une cheffe déterminée. Si elle n’enlèvera jamais de la carte du Bilboquet son plat iconique - le Poulet Cajun - elle a déjà su imposer sa touche, reflet des épices et des souvenirs de celles et ceux qu’elle croise au hasard des voyages dont un tatouage, un de plus, se fait l’écho : une couronne de lauriers et une main de femme. « C’est l’équilibre entre la force, le savoir et la finesse, » dit-elle : « la féminité. »

 

Article rédigé par JC Agid

 

Le Bilboquet

20 East 60th Street

Ouvert tous les jours de midi à 23h

Instagram : @lebilboquetny

 

Café Bilboquet

26 East 60th Street

Ouvert tous les jours de 7h à 19h

Instagram : @cafebilboquet