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Overcôme Syngap1 : faire sortir de l’ombre une maladie invisible

Derrière les troubles du développement et les diagnostics d’autisme, une cause trop souvent ignorée : la mutation du gène SYNGAP1. À Montréal, la Française Solenne Lafeytaud a fondé avec son mari Bruno et sa sœur Domitille une organisation internationale pour briser le silence, faire avancer la recherche et obtenir la reconnaissance officielle de cette pathologie.Son combat est scientifique, humain, et s’inscrit dans une volonté de faire changer le regard et les réponses institutionnelles face à cette maladie.

Côme et Solenne, sa mamanCôme et Solenne, sa maman
Côme et Solenne, sa maman - Photos Courtoisie
Écrit par Bertrand de Petigny
Publié le 2 juillet 2025, mis à jour le 24 septembre 2025

 

 

Une maladie génétique aussi discrète que dévastatrice

Les personnes atteintes de la mutation SYNGAP1 ne présentent aucun signe physique distinctif. Pourtant, leur développement cognitif est sévèrement entravé. Troubles de l’apprentissage, épilepsie, comportements répétitifs, sensibilité sensorielle exacerbée : les symptômes sont nombreux et souvent confondus avec ceux du spectre de l’autisme. « Mais ce n’est pas de l’autisme, c’est une atteinte biologique précise, due à un gène défaillant », explique Solenne Lafeytaud. 

Découvert en 2009, à Montréal, par le professeur Jacques Michaud et son équipe au CHU Sainte-Justine, ce gène est responsable de la production d’une protéine essentielle au bon fonctionnement des connexions cérébrales. Sa mutation empêche l’information de circuler correctement dans le cerveau, bloquant les mécanismes d’apprentissage et de régulation émotionnelle. 

Le Professeur Michaud est d’ailleurs celui par qui cette idée de fondation est née. Il a été le premier soutien à Overcôme, mais aussi à de nombreuses autres fondations crées aux États-Unis et en Europe.

 

La fondation Overcôme SynGAP1 a été créée le 29 mars 2016, à l’occasion des 8 ans de Côme, diagnostiqué quatre ans plus tôt comme porteur de cette mutation génétique rare.

 

 

Un simple test, un diagnostic possible… et pris en charge 

La bonne nouvelle, c’est que la mutation SYNGAP1 peut être identifiée par un test génétique, appelé « séquençage de l’exome ». Concrètement, il s’agit d’une simple prise de sang pour le patient et ses parents, analysée pour lire les séquences d’ADN associées aux gènes codants.

Au Canada, ce test est pris en charge par le système public de santé, dès lors qu’un professionnel de la santé le juge pertinent.

 

« Tout le monde peut faire ce test, pas seulement les enfants. Il est même crucial de sensibiliser les adultes présentant des troubles cognitifs non expliqués. »

Car si les cas sont détectés dès l’enfance, d’autres passent inaperçus pendant des décennies, classés à tort dans des catégories fourre-tout. 

 

 

Une reconnaissance nécessaire pour débloquer les ressources 

La mutation SYNGAP1 est aujourd’hui classée parmi les maladies très rares. Un statut qui, paradoxalement, empêche les avancées : tant qu’un seuil critique de cas recensés n’est pas atteint, aucun programme de soutien gouvernemental n’est déclenché.

Au Canada, les estimations suggèrent qu’entre 400 et 500 personnes seraient atteintes, mais à peine 40 cas sont aujourd’hui identifiés. « Nous avons besoin de faire reconnaître que cette maladie est plus fréquente qu’on ne le croit. Ce n’est qu’à cette condition que les budgets publics pourront être mobilisés. »

D’où l’appel lancé par la fondation Overcôme SynGAP1 : chaque test compte, chaque diagnostic rapproche d’un changement systémique. 

 

 

Solenne et son fils, Côme
Solenne et son fils, Côme.

 

 

Une fondation transfrontalière, une mobilisation familiale 

Face au manque d’informations, Solenne Lafeytaud a décidé d’agir. Avec son mari et sa sœur Domitille Lemoine installée à New York, ils fondent Overcôme Syngap1, qui compte aujourd’hui deux antennes : au Canada (où elle réside), et en France (pilotée par son frère Aymeric Marchal). De nombreuses fondations se montent en parallèle à travers le monde, sous la bannière Syngap Global Network : Le réseau s’étend vite, fédérant chercheurs, institutions et familles. « C’est devenu une cause familiale, mais aussi collective. Les familles et amis courent des marathons, organisent des concerts, mobilisent les écoles. »

La fondation soutient activement un projet majeur en France avec le Neurocampus de Bordeaux, et trois projets de recherche au Canada, dont un à l’Université McGill qui explore des médicaments déjà existants pour contrebalancer les effets de la mutation. « Si on peut réutiliser des molécules connues, on gagnera des années. » 

 

 

De la souffrance à l’action, pour les générations à venir 

Solenne ne cache rien de la réalité : le quotidien est difficile, les nuits courtes, les relations sociales fragiles. « Mais on a choisi de vivre, et de donner un sens à cette épreuve. Même si mon fils ne bénéficie pas directement des avancées, d’autres enfants, plus tard, y auront accès. » Overcôme est aussi un espace de soutien : un forum, une entraide, un réseau de parents désemparés mais unis.

 

« Quand le diagnostic est tombé, je n’avais personne à qui parler. Aujourd’hui, on a créé une communauté. » - Solenne Lafeytaud

 

Et si on commençait par une prise de sang ? 

SYNGAP1 n’est pas une fatalité. C’est une mutation qu’on peut détecter. C’est une maladie que la recherche commence à comprendre. Et c’est un combat que des familles comme celle de Solenne Lafeytaud ont décidé de porter. « Il suffit parfois d’une prise de sang pour ouvrir une nouvelle voie. Il suffit qu’un médecin pose la question. Et un enfant, un adulte, peut enfin obtenir un vrai diagnostic. »

Mais pour cela, il faut que la société écoute. Que les institutions reconnaissent. Et que les familles osent demander. La question reste posée : combien de temps encore laissera-t-on les mutations invisibles nous condamner à l’ignorance.

 

 

Pour plus d’informations ou soutenir cette fondation

 

 

 

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