URBANISME - Le Rio Manzanares : un poumon vert au cœur de la ville

Depuis 2005, la mairie de Madrid a lancé un grand chantier sur les berges du Manzanares, qui doit se transformer en une réelle "coulée verte" liant la ville à la banlieue. Les travaux se superposent et se multiplient. Celui que Cervantes baptisait avec mépris la "rivière métaphysique" est maintenant l'axe central d'un projet qui vise à requalifier l'espace urbain et mettre en valeurs ses ressources naturelles

En surfant sur la vague de la démocratie participative et du partenariat public-privé, la municipalité a ouverte jusqu'au 20 avril 2010 une période "d'information et de consultation" des citoyens. Pourtant, cela fait bien six ans que les riverains du Manzanares observent et subissent les nombreux travaux. Les grues se sont associées aux ponts dans le paysage quotidien du cours d'eau. Le maire avait prévenu : "Ce projet ne se fera ni brièvement, ni de façon simultanée.". Mais alors que les plaintes commençaient à s'intensifier, le nouveau visage du rio commence lui à se dessiner.

La renaissance d'un fleuve oppressé par le tissu urbain
Voilà que l'on peut de nouveau le traverser par l'antique pont Toledo, une ?uvre datant du XVIIe siècle maintenant restaurée et illuminée la nuit. Jusqu'au pont de Prague, vous pouvez désormais continuer sur les pistes cyclables ou flâner sur de larges trottoirs, pensés pour améliorer la connectivité entre les quartiers. Si à la fin de cette année on attend 400.000 mètres carrés de zones vertes, les Madrilènes peuvent dès maintenant profiter du salon des Pins, soit l'ombre de 900 arbres et 1800 arbustes. Le projet terminé, l'ensemble de la zone constituera une zone verte de 113.446 mètres carrés : une bouffée d'oxygène bien méritée pour la capitale.
Moncloa-Aravaca, Centro, Arganzuela, Latina Carabanchel et Usera : voilà les quartiers qui encadrent la rivière. Leur potentiel social et économique est évident. Il a donc été décidé de rafraichir également les façades de quelques 1.848 bâtiments (29.727 logements et 3.104 entreprises) pour en faire une vitrine de la ville. Alberto Ruiz-Gallardón entend s'appuyer sur les financements de la municipalité (pour un tiers environ) mais aussi de la communauté de Madrid et du Ministère du Logement.

Un patrimoine revalorisé par les institutions

L'enterrement de la M-30, dont les deux bretelles défigurent la zone depuis les années 70, a été un des autres symboles forts du projet. A l'heure de l'urbanisation "durable", on réalise le rôle moteur du Manzanares, non seulement pour l'écosystème, mais aussi pour que ses riverains se réapproprient les berges. L'enjeu électoral est important. Le tissu social de la zone est en effet incroyablement varié : étudiants de Moncloa en collocation, travailleurs hospitaliers, retraités, familles?
Pour Sergio, éducateur sportif de 29 ans, le quartier de la Colonia de Manzanares est idéal. "Depuis que le centre commercial Principe Pio a été construit, le coin n?a plus rien à voir avec un début de banlieue. En plus, on bénéficie de la proximité du polideportivo et de la Casa de Campo, où on peut aller courir et s'oxygéner toute la semaine. Le projet de modernisation a déjà des conséquences positives, mais l'endroit garde une histoire.". Eh oui, ici les parcs ont vu des batailles de la guerre civile, les gens continuent de se réunir à la mythique Casa Mingo boire du cidre? Cette parcelle d'histoire, de nombreuses personnes âgées ne la quitterait pour rien au monde. José Cordobe, commercial à la retraite (qui insiste pour que l'on précise que ses cendres devront être jetées dans la rivière), aime se promener pour "écouter le bruit de l'eau plutôt que la ville".
Depuis janvier a commencé ce qui est un des chantiers les plus attendus : la construction de la plage de Arganzuela, qui s'étalera derrière la Casa del Reloj. Pas sûr que le coin reste tranquille pour le moment?

Sarah BOSQUET (www.lepetitjournal.com ? Espagne) jeudi 18 mars 2010

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