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Mystérieuse disparition d’un Picasso entre Madrid et Grenade

Un petit tableau de Pablo Picasso a disparu début octobre quelque part entre Madrid et Grenade. "Nature morte à la guitare" (1919), une gouache estimée à 600.000 euros, devait rejoindre les cimaises du Centre culturel CajaGranada pour l’exposition "Bodegón. La eternidad de lo inerte". Dix jours plus tard, toujours aucune trace de l’œuvre.

Fragment de Naturaleza muerta con guitarra', 1919, de Pablo PicassoFragment de Naturaleza muerta con guitarra', 1919, de Pablo Picasso
Fragment de Naturaleza muerta con guitarra', 1919, de Pablo Picasso, DR.
Écrit par Paul Pierroux-Taranto
Publié le 16 octobre 2025

Un détour qui laisse place au mystère

Selon le Ideal de Granade, le tableau appartenait à un collectionneur privé resté anonyme. Parti de Madrid le 2 octobre avec 56 autres œuvres, le Picasso devait rejoindre Grenade à bord d’un fourgon d’une société de transport basée à Pinto. Le lendemain, à l’arrivée, il manquait à l’appel.

Un détail intrigue les enquêteurs : le trajet, d’ordinaire direct, a connu une pause inattendue. Les deux convoyeurs ont choisi de passer la nuit à Deifontes, un village tranquille à 25 kilomètres de la destination finale. D’après la police, ils assurent s’être relayés pour veiller sur le véhicule. Rien d’anormal, jurent-ils. Pourtant, au matin, le chef-d’œuvre s’est volatilisé.

 

Le Picasso disparu, sous l’œil aveugle des caméras

Le 3 octobre, à dix heures tapantes, le fourgon se gare devant le Centre culturel CajaGranada. Sous l’œil des caméras, les caisses sont déchargées, empilées dans l’ascenseur, puis hissées jusqu’à la salle d’exposition. Rien d’anormal, a priori.

Sauf qu’un détail interpelle : les colis ne sont pas tous numérotés. Impossible, donc, de vérifier précisément si chaque œuvre annoncée est bien là, sans ouvrir les caisses. Les transporteurs signent les bons, repartent. Les œuvres, elles, passent le week-end sous vidéosurveillance.

Ce n’est que le lundi matin, lors du déballage, que la commissaire de l’exposition et le responsable des collections remarquent le manque. Le petit gouache de Picasso — Nature morte à la guitare, 12,7 sur 9,8 centimètres, une guitare posée sur une table — a disparu. Et les caméras n’ont rien vu passer.

 

De Madrid à Grenade, la police cherche toujours

La Fondation CajaGranada, organisatrice de l’exposition, a déposé plainte le 10 octobre, quatre jours après avoir constaté la disparition. Elle assure collaborer sans réserve avec les enquêteurs. Le service des vols d’œuvres d’art de la Police nationale cherche à déterminer à quel moment du trajet — entre Madrid, Deifontes et Grenade — la pièce a pu disparaître.

Petit format mais grande signature : Nature morte à la guitare avait été vendue il y a quelques années autour de 60.000 euros, selon la galerie Ledor Fine Art. Pour l’assurance, elle en vaut dix fois plus, soit 600.000 euros. 

Aucune piste n’est écartée : erreur d’inventaire, vol improvisé ou disparition savamment organisée. Ce qui est certain, c’est que le Picasso n’a jamais franchi la porte de la salle d’exposition. À vingt-cinq minutes de son point d’arrivée, le mystère reste entier — aussi opaque qu’un tableau sans lumière…

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