Édition internationale

FEMEN – Le féminisme coup de poing débarque en Espagne

Écrit par lepetitjournal.com Madrid
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 27 mai 2013

Parti d'Ukraine en 2008, le mouvement de lutte pour les droits des femmes Femen continue son implantation à travers le monde. Depuis peu, l'Espagne a découvert le visage de celle qui incarne à présent l'anti-machisme sur le sol ibérique. Lara Alcázar, 21 ans et originaire de Gijón, compte rassembler autour d'elle des jeunes femmes motivées et bien décidées à en découdre avec toutes formes de discrimination. Lepetitjournal.com l'a contactée et vous en dit plus sur un phénomène qui divise l'opinion partout où il passe.

Un combat sur plusieurs fronts
En France, les Femen se sont fait connaître notamment grâce à leurs actions choc en marge des manifestations contre le mariage pour tous. Armées de slogans provocants tatoués sur leurs poitrines dénudées, elles étaient venues dénoncer à leur façon l'homophobie. En effet, ce mouvement ne limite pas son combat aux droits des femmes mais compte également parmi ses chevaux de bataille "la religion, les régimes dictatoriaux ou encore l'industrie du sexe". Il y a quelques jours, les Espagnols ont pu découvrir dans les médias le visage et les tétons de Lara Alcázar, jeune asturienne étudiante en histoire de l'art, et désormais lieutenante égérie de la branche Femen España. C'est grâce à un portrait dans El País et un reportage sur Telecinco que Lara s'est fait connaître du grand public. Après avoir pris contact par Internet avec les dirigeantes du mouvement installées à Paris, elle décide alors de franchir un cap dans l'activisme. "J'ai pris contact avec les Femen France pour savoir s'il existait un groupe en Espagne. Elles m'ont répondu que non mais que je pouvais le créer. Quelques jours plus tard, Inna Shevchenko (figure médiatique des Femen exilée en France) m'a écrit pour me dire qu'une autre personne de Cadix était intéressée pour monter un groupe en Espagne. Nous sommes entrées en relation et avons décidé de lancer la machine".
Le calvaire enduré par Amina Tyler, jeune Tunisienne séquestrée et menacée pour avoir publié une photo d'elle seins nus sur les réseaux sociaux, a servi de déclencheur à Lara dont la rage sommeillait depuis plusieurs années. Mais pas seulement. Le projet du gouvernement Rajoy de modifier le texte de loi sur l'avortement a aussi motivé sa décision, tout comme les inégalités salariales qui perdurent entre hommes et femmes dans le monde du travail. L'Espagne faisant d'ailleurs toujours partie des plus mauvais élèves de l'Union européenne en matière d'accès pour les femmes à des postes à hautes responsabilités.

Un activisme physique et psychologique
Nul doute que la tribune médiatique offerte à Lara fera naître des vocations. "Toutes celles qui le souhaitent peuvent se joindre au mouvement", nous dit-elle. Six autres femmes de différentes provinces seraient déjà intéressées pour venir gonfler les rangs de Femen España. Toutes étudiantes, âgées d'une vingtaine d'années et lassées de voir un machisme décomplexé gangréner la société espagnole. "Pour l'instant, nous sommes encore dans la phase de formation du groupe. Il nous reste beaucoup de travail à effectuer, notamment au niveau des entraînements".
Une première réunion devrait se tenir à Madrid le mois prochain. Un rassemblement visant à déterminer les actions à venir et organiser les entraînements physiques et psychologiques, car on n'adhère pas au groupe Femen comme on adhère à un club de tricot. Une force physique et mentale est nécessaire. Les forces de l'ordre ou les gardes du corps de personnalités visées par les Femen ont démontré à maintes reprises que l'activisme féministe de ce début de XXIe siècle n'est pas de tout repos. Comme les Suffragettes il y a cent ans, Lara ne fait pas de distinction entre féminisme et politique. "Le féminisme est un mouvement politique et philosophique visant à bousculer ce système patriarcal qui est la forme de soumission la plus puissante envers la femme. Par ses institutions et son mode de pensée, l'ordre établi place l'homme en leader et la femme en esclave".

Action directe
S'il est encore un peu tôt pour en parler, Lara compte bien faire avancer sa cause par des actions ciblées. L'effet de surprise et la pugnacité sont également des marques de fabrique des Femen. Car si la provocation topless est assurément un moyen d'être vues, elle ne sert à rien si les revendications des amazones ne sont pas entendues. Le féminisme 2.0 est souvent accusé de prôner la violence et le message transmis à la société est parfois mal interprété. A cela, Lara répond : "Les Femen ne font pas usage de la violence, mais nous reconnaissons une forme d'agressivité dans nos actions. Le caractère extrême de celles-ci est un moyen de détruire la vision patriarcale de la sexualité féminine. Nous agissons dans un but révolutionnaire. En opérant de la sorte, nous exprimons aussi le droit historique de la femme à protester n'importe où et n'importe quand, sans tenir compte du dogme patriarcal qui prétend maintenir l'ordre et la sécurité."
Les phallocrates espagnols sont prévenus, les Femen España peuvent désormais frapper à tout moment.

Portrait de Lara Alcázar par El País
Plus d'infos sur Femen España

Stéphane HODJA (www.lepetitjournal.com ? Espagne) Lundi 27 mai 2013
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Publié le 26 mai 2013, mis à jour le 27 mai 2013
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