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AMANCIO ORTEGA - A la recherche du fondateur de Zara et d'Inditex

Écrit par lepetitjournal.com Madrid
Publié le 1 janvier 1970, mis à jour le 15 mars 2013

 

Alors qu'Amancio Ortega vient de se hisser au troisième rang des fortunes mondiales classées par "Forbes", le journaliste franco-espagnol David Martinez publie ces jours-ci un ouvrage dédié à cet entrepreneur espagnol, qui a créé un véritable empire en partant de zéro. L'auteur revient sur l'aventure Zara, les clefs du succès d'Inditex et les prévisions pour l'avenir.

David Martinez, journaliste à la double nationalité franco-espagnole, basé à Barcelone, gère les services Économie et International du quotidien numérique La Vanguardia.com (10 millions d'usagers uniques mensuels). Il a suivi des études de Journalisme et de communication au CELSA (Paris IV-Université de la Sorbonne) et à l' Université Ramon Llull de Barcelone. Il a collaboré pour El País, Expansión, El Economista, ABC, La Vanguardia, La Razón, El Periódico à Barcelone et à Madrid et comme correspondant à Paris, Londres et Berlin pour Les Échos, Libération et Le Parisien. Il vient de publier un livre en espagnol à propos de l'histoire personnelle et professionnelle du fondateur de ZARA et de l'empire de mode Inditex, Amancio Ortega, troisième fortune mondiale.

lepetitjournal.com : Qu'est ce qui vous a poussé à vous intéresser à Amancio Ortega ?
David Martinez : Amancio Ortega vient de se hisser au troisième rang des fortunes mondiales classées par "Forbes". Père de la fast fashion et fondateur de Zara, il est aujourd'hui à la tête d'un véritable empire avec 6.009 magasins ouvert dans tout le monde avec les 8 enseignes du groupe de mode espagnol. J'ai toujours été attiré par les hommes qui sans aucune fortune à la base ont créé un véritable modèle d'entreprise, des entrepreneurs qui en ce moment de crise économique sont des véritables exemples pour des milliers d'entrepreneurs qui travaillent fort jour après jour pour mener à terme leur idée d'entreprise. Le but de mon livre: "Zara, visión y estrategia de Amancio Ortega (Ed. Conecta)" (Zara, Vision et stratégie d'Amancio Ortega) est l'histoire d'un homme qui devient entrepreneur. C'est une enquête journalistique qui constate les efforts et les difficultés pour créer Zara et le groupe Inditex. Je n'ai pas voulu parler de la fortune personnelle d'Ortega mais plutôt comment il a agit tout au long de sa vie pour rester toujours fidèle à ses valeurs lui ayant de créer l'empire Zara.

Comment s'est déroulée votre enquête ?
J'ai contacté pendant un an et demi des personnes qui travaillent avec Amancio Ortega, je me suis installé à Arteixo, petite ville de Galice où se trouve le siège d'Inditex, pour bien connaître les habitudes et le quotidien d'Amancio Ortega. C'est un homme qui ne veut pas apparaître dans les médias, qui protège son intimité mais que l'on peut trouver tous les jours au siège, entouré de jeunes passionnés de la mode, participant dans les débats sur nouvelles tendances. Pour écrire le livre j'ai eu des entretiens avec la plupart des cadres de l'entreprise, les employés, j'ai contacté des personnes qui ont partagé leur vie professionnelle et personnelle avec Amancio Ortega.

Pour Amancio Ortega, quand et comment l'aventure a-t-elle commencé ?
Tout commence le 28 mars 1936 à Busdongo de Arbas, un minuscule village de la province de Leon. Amancio Ortega, né le même jour que le célèbre écrivain Mario Vargas Llosa, vient au monde dans une famille humble, dont il est le quatrième et dernier enfant. Son père, employé des chemins de fer muté à Tolosa, puis à La Corogne en 1944, travaillait dur pour un salaire bien maigre. Si bien que les commerçants devaient faire souvent crédit à la famille Ortega.
Arrive un jour où l'un d'eux refuse d'allonger l'ardoise de sa mère. L'épisode, qui a eu un impact dévastateur sur le jeune garçon, est l'un des rares que Covadonga O'Shea parvient à tirer d'Amancio Ortega sur son enfance. "Cela m'a détruit", s'épanche-t-il auprès d'elle. Il prend alors une décision irrévocable, celle de "se mettre à travailler pour gagner de l'argent et aider sa famille". Pour sa biographe, c'est l'événement fondateur d'Ortega, celui qui lui donna cette rage de travailler que tous lui reconnaissent.

Pour reprendre les termes de la Vanguardia, "Comment est-il possible que les boutiques Zara poussent comme des champignons dans les principales villes d'Espagne et du monde ?"
Les bases de Zara consistent à répondre à la demande sans générer de stocks. Les collections sont produites puis envoyées aux magasins en moins de deux semaines, grâce à la proximité et à la gestion logistique des neufs plateformes basées en Espagne, pour Zara et les autres références du groupe de mode Inditex.
Mais dès ses débuts dans l'univers du prêt-à-porter, Amancio Ortega sait reconnaître un vêtement à la mode, qui plaît à toutes les femmes, tout en restant trop cher pour certaines. Il a passé du temps à trouver une solution pour imiter ce vêtement et le rendre accessible à toutes les bourses. De la copie, diront certains. Démocratisation de la mode, diront d'autres.
Ces valeurs acquises il y a presque 40 ans, avec l'ouverture de la première boutique en 1975, se maintiennent aujourd'hui dans la stratégie de croissance et d'entreprise pour développer ZARA : trouver les principaux axes commerciaux dans les plus grandes villes du monde pour ouvrir de nouveaux magasins, afin de capter les informations et les préférences des clients, qui donneront des informations très importantes pour créer de nouvelles références. Zara veut participer de la mode globale pour offrir ses tendances et non pas les imposer, comme le font les grandes marques en proposant deux collections par an. Le magasin et le client sont la base de la stratégie de ZARA et du groupe Inditex.

amancio ortega david martinez
Quels sont les principaux chiffres du succès d'Inditex ?
Amancio Ortega est actionnaire majoritaire d'Inditex, maison mère de Zara cotée à la Bourse de Madrid, Amancio Ortega est à la tête d'une fortune estimée à 57 milliards de dollars.
Entré dans une boutique de confection à l'âge de 13 ans, il ouvre sa première boutique Zara en 1975. L'empire en compte aujourd'hui 6.009 magasins dans 89 marchés et il emploit 120.000 personnes. Le huit plateformes logistiques sont basées en Espagne. Il a confié en 2011 les rênes du groupe à Pablo Isla, mais ne désespère pas de voir sa fille reprendre le flambeau.

Y a-t-il un modèle Zara répliquable en Espagne ? En France ?
Non. Mais des grands groupes comme Mango, Benetton et H&M essaye de copier le modèle de ZARA, surtout sa grande capacité pour fournir ses produits en un temps maximum de deux semaines dans tous ses magasins du monde.

Le succès de Zara profite-t-il à la société espagnole ? Est-il générateur d'emploi ?
La production principale du groupe Inditex se fait en Espagne, dans le Nord de l'Afrique et surtout en Europe. L'entreprise ne délocalise pas, les plateformes logistiques de ZARA sont basées en Espagne, le siège est aussi en Espagne et la plupart des emplois productifs sont en Espagne et en Europe. L'achat des tissus se fait en Inde, au Bangladesh et dans les pays émergents principalement.

Zara et la crise : connaît pas ?
Le numéro un mondial du textile, propriétaire de la marque Zara, réalise 65% de ses ventes en Europe, qui commencent à pâtir de la crise économique. Mais le groupe dispose d'importants relais de croissance dans les pays émergents. Le groupe a-t-il également la croissance perpétuelle ? Sa résistance à la crise économique, n'en finit pas d'étonner. Le marché va scruter la capacité d'Inditex de continuer à être plus performant que ses concurrents dans un contexte macro-économique de plus en plus difficile. De fait, l'impact de cette crise commence à se faire sentir. Les analystes de BPI pointent la décélération des ventes au quatrième trimestre (+12% contre +17% sur les neuf premiers mois de l'exercice), qui s'est d'ailleurs poursuivie début 2013 (+12% du 1er février au 11 mars). Pablo Isla, président du groupe Inditex et bras droit d'Amancio Ortega dans la gestion, a minimisé ce ralentissement, estimant qu'il faut plutôt se baser sur les évolutions annuelles ou semestrielles. Les ventes à surface comparable ne progresseront que de 4,8% en 2013. Cela sera compliqué de voir des taux de croissance comparable aussi forts qu'en 2012.
Il semble donc que la croissance d'Inditex sera désormais plus douce, ce qui ne veut pas dire qu'elle ne restera pas vigoureuse. Le groupe dispose encore d'importants relais de croissance dans les pays émergents. Inditex est présent dans plus de 80 pays et en excluant l'Espagne et ses autres principaux marchés, il n'a qu'une part de marché très réduite dans beaucoup de pays, ce qui laisse de la place pour de la croissance. Le groupe réoriente ainsi chaque fois plus ses ventes vers les pays asiatiques : selon BPI, ce continent devrait représenter 31% des ventes en 2015, contre 20% en 2012.

Et vous, vous habillez-vous chez Zara ?
Ça m'arrive d'acheter chez Zara mais aussi dans d'autres marques d'autres groupes de mode: la diversité fait le bon goût.

Propos recueillis par Vincent GARNIER (www.lepetitjournal.com - Espagne) Vendredi 15 mars 2013

"Zara, visión y estrategia de Amancio Ortega" (Editorial Conecta, 2012)
A lire, l'article de La Vanguardia : http://www.lavanguardia.com/economia/20121025/54353425267/libro-zara-amancio-ortega.html

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Publié le 15 mars 2013, mis à jour le 15 mars 2013
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