L’annonce, par Donald Trump, le 19 septembre, d’un nouveau droit d’entrée de 100 000$ pour les visas H-1B a secoué le monde de la tech, en particulier en Californie. Asif Arif, avocat en immigration à Los Angeles, et auteur de l’ouvrage « Passeport vers le rêve Américain : les visas expliqués aux Français » (éditions Les Impliqués), décrypte les conséquences de cette mesure pour les entreprises et les expatriés aux États-Unis.


Vendredi 19 septembre, Donald Trump a annoncé que les entreprises américaines devraient dorénavant débourser 100 000$ pour sponsoriser les visas H-1B de leurs salariés immigrés. Une mesure qui ne s’applique qu’aux nouvelles demandes, a précisé l’administration américaine. Comment avez-vous réagi à cette annonce ?
C’était assez inattendu, et en même temps, qu’est ce qui est impossible avec le président Trump ? J’ai trouvé que cette mesure était contradictoire avec ce pourquoi il a été élu, lutter contre l’immigration illégale. Il s’attaque en effet à des personnes qui veulent entrer aux États-Unis légalement, avec un visa. Le visa H-1B s’adresse à des cadres, à ceux qui ont un certain niveau d’études. Ce sont des ingénieurs, des personnes qualifiées, souvent embauchées à un coût plus bas que la main-d’œuvre américaine. Il s’agit clairement d’une mesure de répression contre la main-d’œuvre indienne et chinoise. On assiste à la poursuite de la politique protectionniste américaine, à la suite de la politique très agressive de Donald Trump sur les tarifs douaniers. Pour lui, c’est : « les Américains, les Américains, et encore les Américains ».
Quelles vont être les conséquences pour les entreprises américaines et pour les candidats au visa H-1B ?
Les employeurs vont revoir leur politique de recrutement, et ça ne va pas aller dans le sens des candidats, mais en leur défaveur. Cela va réduire substantiellement le nombre d’employeurs qui vont soumettre des candidats à la loterie pour un visa H-1B. Seuls les profils très qualifiés, très spécialisés, continueront à être recherchés, dans le domaine de l’IA notamment. Mais pour tous les H1-B qui concernaient plutôt des postes de type admin tech, ou du back-office, où on recrutait de la main-d’œuvre indienne à un prix en-deçà du marché américain, ou en raison du peu de candidatures, les entreprises vont devoir recruter directement sur le marché américain.
Finalement, tout va dépendre de la manière dont les employeurs vont se positionner. Certaines sociétés auront-elles tendance à se relocaliser ? C’est une question que l’on peut légitimement se poser. Car cette barrière de 100 000$ va poser un problème de compétitivité des entreprises américaines. Je pense qu’à terme, cela va pousser la Chine à se développer davantage comme une économie de services. Cela ne se verra peut-être pas tout de suite, mais dans les années qui viennent, cela risque de ralentir l’économie américaine. Ceci dit, il faut rester prudent, car Donald Trump peut annoncer quelque chose puis faire le contraire. Derrière les grands effets d’annonce, on ne sait pas combien de temps ça va durer, ni comment cela va se passer.
Quels conseils donnez-vous à vos clients qui candidatent actuellement pour un visa H-1B aux États-Unis ?
Nous attendons encore des précisions avant de pouvoir dire à nos clients à quelle sauce ils vont être mangés. Nous leur disons : « Si vous êtes en voyage, il faut revenir, si vous êtes en cours de procédure pour l’obtention d’un visa H-1B, restez en discussion avec votre employeur. » Normalement, les H1-B en cours ne sont pas concernés, mais à ce stade il faut rester prudent. Il y a aussi cette fameuse exception aux frais de 100 000$, dont certains candidats pourront bénéficier s’ils démontrent que leur travail va dans l’intérêt national des États-Unis. Cela concerne les secteurs stratégiques, comme par exemple, celui des puces électroniques. Ce sera au cas par cas. En termes d’immigration, ces candidats pourraient aussi bien se qualifier pour un visa H-1B que pour une carte verte NIW. Avec Donald Trump, il faut mettre le paquet sur les aspects économiques du poste, en démontrant comment on va contribuer aux intérêts de l’économie américaine.
Depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, en janvier 2025, les expatriés français se détournent-ils des États-Unis ?
Il y a une légère diminution des demandes pour les différents types de visa concernant les Français qui viennent aux États-Unis. Mais surtout, il y a une augmentation massive du nombre d’Américains qui partent, notamment pour la France. On constate aussi une augmentation des « Request for evidence » lors des demandes de visas, c’est-à-dire, des demandes d’informations supplémentaires. Les dossiers sont devenus plus difficiles à faire approuver. Le degré d’appréciation est beaucoup plus approfondi. Les dossiers font l’objet de grosses demandes documentaires. Ça alourdit le processus pour les Français.
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