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Enfants enlevés au Japon, le calvaire sans fin des parents français

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Écrit par Selma Djebbar
Publié le 17 octobre 2019, mis à jour le 25 octobre 2019

Chaque année, au Japon, 150 000 mineurs sont séparés par l'un des parents qui coupe tout contact. Le Sénateur Richard Yung a présenté une nouvelle résolution qui permettrait au parent lésé de conserver un lien avec ses enfants.

Le sénateur Richard Yung, représentant les Français établis hors de France, s'est réuni avec des avocats spécialistes du droit de la famille et du droit international et de parents victimes de l'enlèvement de leur enfant par un parent japonais, afin de présenter une proposition de résolution qui sera probablement discutée au Sénat en début d'année.

L'enlèvement admis par la loi japonaise

Suite à une proposition de Richard Yung en 2011, le Sénat s'était déjà emparé de la douloureuse question des enfants issus de couples franco-japonais. Préoccupé par le nombre toujours en hausse d'enfants binationaux enlevés, une résolution a été adoptée à l'unanimité à l'attention des autorités nippones sur la nécessité de reconnaître aux enfants le droit de conserver des liens avec chacun de leurs parents.

Ces situations trouvent leur origine dans le droit de la famille nippon, qui ne reconnaît ni le partage de l'autorité parentale, ni la garde alternée. Pire, les juges appliquent le principe non écrit de « continuité », qui attribue systématiquement l'enfant au parent ravisseur. Le droit de visite, quant à lui, est au bon vouloir du juge et du parent à qui a été attribuée l'autorité parentale.

Le Droit International comme levier

Le Japon a adhéré en 2014 à la Convention de La Haye sous la pression d'efforts diplomatiques de nombreux pays occidentaux. Elle vise à protéger les enfants, sur le plan international, contre les effets dévastateurs d'un déplacement ou d'un non-retour. Il s'agit de garantir le retour immédiat de l'enfant enlevé dans l’État de sa résidence habituelle.

La convention de La Haye est appliquée sur la base d'une loi japonaise spécifique, dont la mise en œuvre ne permet pas au Japon de respecter pleinement les obligations qui lui sont imposées. Les ordonnances ne sont pas exécutées et le droit de visite accordé au parent français, bafoué.

En complément de ce texte de loi non contraignant, vient s'ajouter l'action du Comité des droits de l'enfant des Nations unies, qui dans son dernier rapport daté du 1er février 2019, recommande aux autorités japonaises de : prévenir et de combattre les déplacements et non-retours illicites d'enfants, d'aligner la législation nationale sur la Convention de la Haye du 25 octobre 1950 et enfin de renforcer le dialogue et les consultations avec les pays concernés, prioritairement ceux avec qui a été signé un accord relatif au droit de garde et au droit de visite.

L'objectif à travers la pression diplomatique de la Communauté Internationale est de faire intégrer la garde alternée dans la législation japonaise et de dépénaliser l'action du parent exclu quand il tente de maintenir le contact avec son enfant.

Initiatives à venir

Après la ratification de la Convention de la Haye, suite à la première proposition en 2011, ce qui est souhaité avant tout aujourd’hui, c’est que le juge japonais puisse prononcer des décisions de garde alternée, accorder un droit de visite et surtout faire en sorte que ce droit de visite soit respecté.

Pour faciliter les démarches, Richard Yung a déclaré que : « la création d’un magistrat de liaison à l’Ambassade de France au Japon, comme ce fut le cas il y a quelques années, permettrait entre autres de tenir un registre des enlèvements d'enfants français. A ce jour, on ignore toujours combien ils sont exactement. »

Il est également question de remettre en activité le Comité consultatif franco-japonais pour le suivi des cas d'enfants dont un des parents est français et qui a été enlevé. Cette structure vise à promouvoir une coopération étroite entre les autorités françaises et japonaises et doit permettre de trouver des solutions concrètes contribuant à rétablir un lien entre l’enfant déplacé et le parent lésé. Ainsi, les échanges d’informations concernant la localisation d’un enfant, les transmissions de courriers et photographies ou encore la possibilité pour les agents consulaires de s’enquérir de la situation psychologique et matérielle du mineur doivent être améliorés.

Il apparaît indispensable que ce combat pour les droits fondamentaux des enfants franco-japonais soit mené en concertation avec la Communauté internationale, les parents lésés et les autorités japonaises, afin de sensibiliser le plus possible l'opinion publique internationale et japonaise et donner plus de visibilité à ce phénomène.

 

 
Paul-Georges Touja : « la sincérité du Japon est discutable »

« il s'agit d'un signal fort de la part de la France », rappelle Paul-Georges Touja, président de l'association Sauvons Nos Enfants Japon. « il faut se réjouir de toute avancée, toute annonce en restant pragmatique, si l'article 9 de la Convention internationale des Droits de l'Enfant  ratifiée en 1994 par le japon n'est pas respecté,  que dire de l'esprit de la Convention de la Haye ! »

Il précise cependant : « Je suis assez pessimiste. La sincérité du Japon est discutable », lâche Paul-Georges Touja. Des initiatives ont été mises en place, dont le groupe des 26 ambassadeurs occidentaux qui ont adressé un courrier à la Ministre de la Justice japonaise, sans succès. « Il a fallu près de 11 ans de pression pour arriver à obtenir l'accord du Japon pour la Convention de la Haye, dont de nombreux articles ne sont pas respectés. » 

 

Selma Djebbar Journaliste
Publié le 21 octobre 2019, mis à jour le 25 octobre 2019
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