Après les manifestations qui ont secoué l’Indonésie fin août 2025, le calme est revenu dans les rues de Jakarta et du reste du pays. Mais les revendications contre les inégalités sociales et les difficultés économiques persistent. Deux couleurs incarnent le souhait de réformes profondes et s’affichent sur les murs ou les réseaux sociaux: le rose et le vert. Un mouvement dénommé « Brave pink / Hero Green » qui se veut pacifique mais déterminé.


Des couleurs qui rendent hommage à deux symboles des manifestations
Au cœur des protestations indonésiennes déclenchées en août 2025 par le mécontentement populaire face aux inégalités économiques et aux privilèges des parlementaires, deux couleurs sont rapidement devenues des symboles : le rose et le vert.
Le rose fait référence à une femme, surnommée Ibu Ana, portant un hijab rose et faisant face, drapeau indonésien en main, à une haie de policiers devant le Parlement, siège de nombreuses manifestations. Les photos et les vidéos de cette passionaria sont depuis devenues virales.
Lors des manifestations de Jakarta et Surabaya, de nombreuses femmes, parfois accompagnées de leurs enfants, sont descendues dans la rue, brandissant non pas des pierres ni des banderoles agressives, mais des balais pour manifester leur mécontentement.
Déjà en 1998, lors des grandes manifestations contre Suharto, les mères des victimes jouaient un rôle symbolique fort. Dans la culture javanaise, la figure d’Ibu Pertiwi (Mère Patrie) est omniprésente, associant le féminin à la protection de la nation.
Le vert, quant à lui, est associé à la mémoire d’Affan Kurniawan, un jeune ojol (taxi-moto) de 21 ans écrasé mortellement par un véhicule blindé de la police à proximité du parlement. La couleur verte typique des conducteurs Gojek et Grab devenant un symbole de la lutte contre les violences policières dénoncées par les manifestants.
Ces couleurs sont apparues spontanément sur les réseaux sociaux, comme filtres de profils sur Instagram et WhatsApp ou sous forme de bannières. Mais aussi dans des graffitis peints sur les murs des villes comme « RESET SYSTEM ». Elles incarnent la solidarité, l’empathie et la détermination populaire à réclamer un changement profond.
Deux couleurs qui incarnent les revendications des citoyens
A la suite des manifestations, le gouvernement indonésien a décidé de supprimer l’allocation logement attribuée aux députés qui avait enflammé la rue. Des ministres ont été remerciés, une enquête approfondie sur la mort du moto-taxi a été promise et une commission sur la réforme de la police mise en place. Mais certains jugent que ces gestes sont insuffisants. Le mouvement « rose et vert » s’impose ainsi comme le marqueur des citoyens souhaitant l’adoption de réformes profondes pour réduire les inégalités, augmenter le pouvoir d’achat et protéger les libertés civiles.
Ces revendications s’incarnent dans le slogan 17+8 que l’on a vu fleurir sur les pancartes brandies par les manifestants souvent colorées de rose et de vert. « 17+8 Revendications du peuple », (abrégé en 17+8) est une plateforme de protestation qui liste dix-sept mesures à court terme que les citoyens mécontents veulent voir être mises en œuvre en une semaine et huit réformes à long terme à réaliser en un an. Des mesures et des réformes allant de la fin des privilèges accordés aux députés, des enquêtes sur les violences policières, le retour dans leurs casernes des militaires déployés dans les rues pendant les manifestations, une réforme fiscale…
Une nouvelle forme de contestation visuelle et non-violente
L’adoption de ces couleurs représente une nouvelle forme de manifestation pacifique, fusionnant le militantisme avec une esthétique visuelle. Nuurrianti Jalli, professeure assistante à la School of Media and Strategic Communications de l’Oklahoma State University et experte en médias et gouvernance numérique en Asie du Sud-Est, a déclaré au Jakarta Post que les symboles sont aussi importants que les slogans, car ils offrent une forme visuelle facilement adoptable par tous.
« Les 17+8 revendications et les couleurs vert et rose sont similaires aux parapluies noirs de Hong Kong ou au salut à trois doigts de la Thaïlande. Ce type de marqueur ne se contente pas de rendre un mouvement visible, il élargit aussi sa portée à travers les différents groupes démographiques et les géographies », a-t-elle expliqué.
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