Plus de 600 morts, des centaines de disparus, des villages engloutis, des routes détruites et plus de 500 000 déplacés. L’île de Sumatra a été frappée ces derniers jours par des intempéries d’une rare intensité. Suite à cette tragédie le président Prabowo s’est rendu sur place pour constater les dégâts et réconforter les populations. La saison des pluies est en cours mais les raisons profondes de cette tragédie sont à chercher ailleurs. Episode cyclonique, urbanisation anarchique, déforestation et insuffisances structurelles… le tout sur fond de changement climatique qui accentue ces épisodes extrêmes.


Un phénomène cyclonique qui fait l’effet d’une bombe
Chaque année durant la saison des pluies, la presse indonésienne se fait l’écho presque quotidiennement d’inondations, de glissements de terrain, de destructions et de morts liés à des phénomènes pluvieux intenses. Mais ce qu’a vécu Sumatra, notamment le nord et l’ouest de l’île ainsi que Aceh, est sans commune mesure.
Les pluies commencées en fin de semaine dernière ont été décuplées par le phénomène cyclonique Senyar qui a déversé des quantités d’eau record provoquant la crue soudaine de multiples rivières et l’effondrement de berges déjà fragilisées. En quelques heures, des quartiers entiers ont été submergés, des villages de montagne ont été balayés par des coulées de boue, des familles ont été emportées alors qu’elles tentaient d’évacuer dans l’obscurité comme le montrent de nombreuses vidéos amateurs ou issues de caméras de sécurité.
Un bilan dramatique
C’est la catastrophe naturelle la plus meurtrière pour l’Indonésie depuis le séisme et le tsunami qui ont frappé les Célèbes en 2018. Le bilan humain, encore provisoire, dépassait ce lundi, les 600 morts, plusieurs centaines de disparus sont à dénombrer et 500 000 personnes ont dû fuir leur lieu d’habitation. Des opérations de secours complexes sont en cours pour retrouver d’éventuels survivants, dégager les routes et les lits des rivières alors que de nombreuses zones restent inaccessibles par voie terrestre et leurs télécommunications sont coupées. Dans certaines villes particulièrement touchées, des pillages de supermarchés ont été constatés avec la pénurie de vivres.
Face à cette tragédie, le président Prabowo a atterri lundi matin à Sumatra pour se rendre compte de l’étendue des dégâts, réconforter les familles touchées par le drame et rencontrer les secouristes. Il a déclaré que « la priorité du gouvernement était d’envoyer immédiatement l’aide nécessaire » et annoncé l’envoi de trois navires militaires pour distribuer des vivres ainsi que des hélicoptères pour atteindre les zones les plus isolées.
Une géographie propice aux glissements de terrain rendue encore plus fragile par la déforestation et le changement climatique
Sumatra est une terre de reliefs abrupts et de vallées encaissées. Lorsque les sols saturent sous la pluie, les flancs de montagne cèdent. C’est ce qui s’est produit dans de nombreuses localités rurales où des glissements de terrain ont enterré maisons, écoles et lieux de culte. Dans certains districts, des villages entiers ont disparu en quelques minutes, ont témoigné des rescapés dans la presse locale. La boue, mêlée à des rochers et à des arbres déracinés, a tout emporté sur son passage.
A cette géographie tortueuse s’ajoutent les conséquences de la déforestation. Lorsque des pans de forêts sont abattus le sol ne joue plus son rôle d’éponge et de régulateur de l’infiltration de l’eau. L’absence de racines d’arbres lorsqu’ils ont été coupés fragilise les sols et favorise les glissements de terrain.
Dans les zones urbaines, l’artificialisation des sols et l’accumulation de déchets dans le lit des rivières multiplient les risques d’inondations en cas d’intempéries violentes. L’installation d’habitations de façon non régulée dans des zones inondables ou au bord des rivières alourdit le bilan humain.
Ces facteurs de fragilité sont accentués par le changement climatique. Pour de nombreux climatologues, cette catastrophe illustre les effets d’un climat plus chaud, capable de générer des pluies plus intenses et des phénomènes tropicaux inhabituels dans la région.
Le président Prabowo a ainsi souligné que les effets du changement climatique, de plus en plus extrêmes, constituent un défi à long terme auquel les gouvernements national et régionaux doivent se préparer.
Une fois l’urgence passée, Sumatra devra affronter un immense chantier de reconstruction. Routes, ponts, habitations, réseaux électriques : tout est à rebâtir. Mais la véritable question sera de savoir comment reconstruire pour essayer de limiter les dégâts dans le futur.
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