Stéphane Becquart est installé à Jakarta depuis 2003. Un parcours d’ingénieur et une carrière dans les télécommunications l’ont conduit en 2020 à lancer en pleine pandémie la start-up Jagofon : une plateforme destinée à la revente de téléphones de seconde main. Le contrôle, le service, l’impact environnemental sont la base de cette entreprise qui emploie déjà 10 personnes.
Stéphane, quel est votre parcours ?
J’ai suivi une formation d’ingénieur spécialisé dans les télécommunications. Lors des stages que je devais réaliser, je me suis orienté vers l’étranger, d’abord l’Allemagne et pour mon deuxième stage, j'ai décroché un poste via le groupe Alcatel à Makassar en Indonésie. Ce fut une vraie découverte, j’ai dû très rapidement apprendre l’indonésien pour travailler et communiquer sur place. Après mon stage de fin d’étude aux États-Unis, j’ai souhaité revenir en Asie. En 2001, je m’installe à Singapour, je suis en charge de développer le bureau du groupe SAGEM. Les 18 mois de contrat prévus au départ se transformeront en 12 ans à développer les installations du groupe en Indonésie, en Thaïlande, Australie, Nouvelle-Calédonie, Pakistan…
Qu’est-ce qui explique que vous vous tournez vers le monde des start-up ?
En 2012, je fais un MBA à l’université nationale de Singapour. Je me retrouve exposé à de nouvelles idées, de nouveaux horizons. Je crée en 2013 une première start-up, une plateforme dédiée au golf qui déstocke les invendus sur le modèle de Vente Privée, une plateforme bien connue en France. Ce fut une expérience formatrice, nous nous sommes trouvés confrontés à des difficultés d’exécutions. Le marché singapourien était sans doute trop petit et pas encore mûr. Néanmoins, nous avons réussi à revendre la plateforme à un groupe indien.
En 2017, toujours à Singapour, j’ai créé avec des collaborateurs un fonds d’investissements basé sur des valeurs technologiques.
Comment est née la plateforme Jagofon ?
Comme beaucoup de monde durant le confinement, je me suis retrouvé bloqué à la maison et j’en ai profité pour réfléchir à de nouvelles idées de start-up. Père de famille, j’ai trois grands enfants, je sais que le budget téléphone peut être important. Nous avons acheté sur le marché très souvent des téléphones de seconde main, mais avons eu des désillusions. J’ai fait des recherches, et trouvé un business modèle qui correspondait à mon idée et qui marche en Europe. Fort de mes précédentes expériences dans le domaine de la création d’entreprises, je lance donc en 2020, en plein covid, la plateforme Jagofon. Une plateforme de vente de téléphones de seconde main, qui met en relation vendeurs et acheteurs.
Quels avantages Jagofon apportent aux consommateurs ?
Nous sélectionnons nos vendeurs, à travers une grille de critères. Grâce à un logiciel européen, tous les téléphones sont passés au crible, nous avons 90 points de contrôles comme les boutons, écran, capteur, batterie, écouteur, caméra, code IMEI, réseaux cellulaires… Si un seul de ces critères n’est pas bon, le téléphone est rejeté.
Ceci nous permet d’offrir à nos clients une garantie gratuite de base de 30 jours sur ces téléphones de seconde main. C’est une vraie valeur ajoutée ! Les boutiques, elles, ne proposent que 7 jours.
Les téléphones que nous revendons ont en moyenne entre 12 et 18 mois. À travers notre plateforme, notre clientèle se répartit sur l’ensemble du territoire indonésien, de Aceh à la Papouasie.
Votre plateforme s’inscrit dans le développement durable
Nous nous insérons effectivement dans le développement durable. En Indonésie, nous estimons que 25 millions de téléphones atterrissent dans des décharges chaque année. C’est problématique, car les éléments chimiques contenus dans les téléphones comme le plomb, le nickel, le cadmium, et même l’arsenic vont ensuite passer dans les sols et les nappes phréatiques, et pourront revenir contaminer nos cellules, ce qui peut entraîner des mutations génétiques et des cancers.
La production d’un nouveau téléphone, c'est aussi 16 kg de CO2 ! Un téléphone de seconde main, c'est un téléphone de moins à produire et un produit à qui l’on redonne une seconde vie. Les téléphones sont programmés pour une durée de vie de 7 ans.
Qui sont vos collaborateurs ?
Jagofon c’est aujourd’hui 10 personnes. J’ai eu la chance de trouver un merveilleux informaticien sorti de Binus Université, un autre de mes collaborateurs sort de ESSEC Singapour, j’ai également des techniciens et des personnes en charge du marketing.
Des projets pour Jagofon ?
Nous sommes en phase d’accélération, ce qui montre la confiance de nos clients. Nous bénéficions de soutien de capital-risque et de business Angels. Nous travaillons à notre croissance actuellement, la rentabilité viendra ensuite, c'est le principe des start-up.
Nous concentrons nos activités sur Jakarta qui est déjà un marché énorme, mais nous vendons à travers notre plateforme sur toute l’Indonésie.
Nous travaillons sur une extension de garantie payante, et à la demande de nos clients, nous allons étendre notre gamme aux tablettes et aux accessoires.
Vous avez assisté à Bali au forum de la French Tech de novembre 2022, quels retours en faites-vous ?
J’ai rencontré de nombreux entrepreneurs et investisseurs. Nous avons beaucoup échangé, il y a une très bonne dynamique. Je sais que ce forum portera ses fruits et que la French Tech est appelée à se développer. C’est vraiment un plus pour la communauté entrepreneuriale en Indonésie.
Plus d'infos sur Jagofon ici