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Les Indes orientales néerlandaises à la coupe du monde de 1938

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Écrit par Arnaud Amouroux
Publié le 17 novembre 2022, mis à jour le 7 décembre 2022

Il y a 84 ans, une équipe asiatique, les Indes orientales néerlandaises, participait pour la première fois à une coupe du monde de football. De Batavia à Rotterdam en passant par Reims, retour sur une épopée sportive aussi méconnue que rocambolesque. 

 

Une série de ‘premières’ pour les Indes Orientales

La troisième coupe du monde de football commence le 4 juin 1938 en France avec quinze équipes en lice. Elles devaient être seize mais le Japon, l’une des deux nations asiatiques annoncées, renonce juste avant le début de la compétition, faisant des Indes orientales néerlandaises la première nation asiatique de l’histoire à participer à une coupe du monde de football. Cette participation marque la fin d’un entre-soi entre équipes européennes et sud-américaines.

C’est dire la portée symbolique de la participation des joueurs de l’archipel qui prendra bientôt le nom d’Indonésie. 

 

Depuis 1937, les meilleurs joueurs indonésiens sont sélectionnables pour rejoindre l’équipe ‘nationale’ – grâce à une trêve actée entre les deux fédérations concurrentes de l'époque (la fédération indonésienne de football, Persatuan Sepakbola Seluruh Indonesia –PSSI d’une part, et la fédération de football des Indes orientales néerlandaises, Nederlandsch Indische Voetbal Unie – NIVU, d’autre part). 

L'équipe ainsi constituée est composée exclusivement de joueurs nés dans ce qui deviendra l'Indonésie : le onze de départ comprend trois ‘européens’, trois Javanais et Sumatranais (dont le capitaine, Achmad Nawir), deux Chinois et trois joueurs originaires des Moluques. 

 

C’est compte tenu de l’entregent de la NIVU, la seule fédération reconnue par la FIFA, que la future équipe indonésienne se voit invitée à prendre part aux qualifications pour la coupe du monde. Après le retrait du Japon, ce sont les États-Unis qui renoncent.

Faute d’adversaires, les Indes orientales néerlandaises se qualifient sans avoir disputé le moindre match. Il s’agit de leur premier exploit. Un autre record, celui-ci encore non battu à ce jour, tient au fait que l’équipe de l'archipel deviendra bientôt la seule équipe à n’avoir disputé qu’un seul match de coupe du monde.

 

timbrecoupemondefoot1938/indonesie

 

Le match des Indes Orientales devant 9.000 personnes 

L’équipe quitte Batavia le 18 mars 1938. A peine arrivés à Rotterdam, les joueurs entament une préparation sommaire marquée par deux matchs amicaux disputés contre des clubs néerlandais, dont l’un contre l’équipe de Haarlem gagné 5-3 le 31 mai 1938. 

Vu le peu d’équipes participantes, cette troisième coupe du monde de l’histoire commence dès la phase des huitièmes de finale avec élimination directe en cas de défaite. Les Indes orientales néerlandaises héritent d’un adversaire extrêmement coriace, la Hongrie, future finaliste de la compétition. Tout oppose ces deux équipes : d’abord les Hongrois comptent dans leurs rangs certains des rares joueurs professionnels à la fin des années 30, ensuite la moitié de l’équipe a déjà participé à la précédente édition de la coupe du monde en 1934 quand leurs adversaires indonésiens, privés de confrontations au plus haut niveau, ne comptent alors qu’une poignée de rencontres internationales honorées à l’occasion des Jeux de l‘Extrême-Orient en 1934. 

 

La rencontre a lieu au stade municipal de Reims le 5 juin 1938 devant 9.000 personnes. Les représentants de l’archipel arborent maillot orange, short blanc et bas bleu, illustrant s’il était besoin les liens de dépendance avec la puissance coloniale. 

Les Hongrois ouvrent le score dès la 13ème minute par l’intermédiaire de Vinos Kohut qui évolue alors à l’Olympique de Marseille. Cinq buts supplémentaires seront marqués, tous au crédit des Magyars, dont deux sont l’œuvre de Gyula Zsengellér, qui finira deuxième meilleur buteur de la compétition. 

À peine arrivée, il est déjà l’heure de repartir pour l’équipe indonésienne. Celle-ci aura néanmoins marqué les esprits, ne serait-ce qu’au travers de la présence d’une énigmatique poupée accrochée dans les filets du gardien de but indonésien, Tan Mo Heng. On dit que la poupée devait servir d’amulette, mais la magie n’opéra pas contre les assauts de l’attaque adverse. 

 

Après leur défaite, l’équipe retourne aux Pays-Bas pour disputer deux rencontres de gala. La première a lieu contre le Sparta Rotterdam (défaite 4-3). La seconde est censée constituer le sommet de ce périple européen : le 26 juin, les Indes orientales néerlandaises affrontent la puissance coloniale, les Pays-Bas, devant 50.000 spectateurs. Le résultat est sans appel : 9-2 pour les locaux. 

 

La nuit va bientôt tomber sur le monde et sa coupe. Il faudra attendre 1954 pour qu’un nouveau mondial ait lieu. Celui-ci verra deux nouvelles nations asiatiques participer, le Japon et la Corée du Sud, seize ans après les pionniers indonésiens. 

 

Le onze de départ de l’équipe des Indes orientales néerlandaises, premier représentant asiatique à la coupe du monde de football :

Tan Mo Heng - Hu Kon, Samuels - Nawir (capitaine), Meeng, Anwar - Tan Hong Djien, Soedarmadji, Zomers, Pattiwael, Taihuttu

 

Note : De nombreuses données historiques proviennent du ‘Rec. Sport Soccer Statistics Foundation’ (ou simplement RSSSF), organisation non lucrative destinée à la collecte de statistiques concernant le football.

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