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La petite histoire du chat

Mur décoré de chats dans le quartier FatihMur décoré de chats dans le quartier Fatih
Mur décoré dans le quartier Fatih
Écrit par Chantal et Jacques Périn
Publié le 17 février 2022, mis à jour le 17 février 2022

Bien avant qu’il devienne le compagnon câlin qui s’installe confortablement sur les meilleurs coussins de la maison, ce petit félidé, sous espèce du Felis silvestris catus originel est, depuis l’Antiquité, reconnu d’utilité publique.

Vers le IVème millénaire avant notre ère, on le trouve déjà chez les Égyptiens dont il préserve des rongeurs les réserves de grains. Bon chasseur et courageux, il protège la population des vipères à cornes, nombreuses dans la région.

 

chats divins

 

Divinisé sous la forme d’une chatte, il prend le nom de Bastet, déesse de la joie, du foyer, de la chaleur du soleil, de la maternité, protectrice des femmes enceintes et des enfants.

Protégé à l’extrême, il bénéficie d’une loi qui condamne à mort celui qui le tue, même par accident...

Chez les Perses, bien que respecté, il est moins vénéré que par les Égyptiens. Quant aux Grecs et aux Romains, beaucoup plus pragmatiques, ils utilisent ses capacités de chasseur pour protéger des rongeurs les réserves alimentaires sans toutefois lui attribuer des vertus divines.

Hélas, après avoir connu le meilleur au Moyen-Orient et dans le bassin méditerranéen, notre sympathique félin va connaître le pire en Europe du Nord et de l’Ouest.

Le Moyen-Âge est la période la plus dramatique pour ceux dont le pelage noir est apparenté aux maléfices démoniaques.

Victimes expiatoires de superstitions religieuses, associés au diable, les chats noirs accusés de jeter des mauvais sorts ou d’être les émissaires de Satan sont jugés, torturés, condamnés à être brûlés vifs, cloués sur les portes des granges ou noyés par sacs entiers.

Lors des fêtes de la Saint-Jean le 24 juin, au milieu du XVème siècle, le Roi Louis XI alluma lui-même des tas de fagots où étaient jetés des chats enfermés dans les sacs, façon délicate et originale s’il en est, de fêter le solstice d’été !!

 

chats istanbul paris noirs
Chats noirs jetés au feu à Paris au Moyen-Âge

 

Un siècle plus tard, le chat n’est pas encore réhabilité d’autant que le célèbre anatomiste et chirurgien Ambroise Paré, qui avait en horreur l’animal, disait de lui : "Les chats n’infectent pas seulement par leur cervelle, mais aussi par leur poil, leur haleine, leur regard."

Malgré cette aversion, le chat n’en demeure pas moins utilisé pour chasser rats et souris et pour servir, à l’occasion, de nourriture en période de famine – sa chair ayant, dit-on, le goût de celle du lapin…

Bien qu’il reçoive les éloges du grand Maître Léonard de Vinci qui le qualifie de chef-d’œuvre, le chat ne retrouve grâce qu’au XVIIème siècle, avec l’arrivée en Europe du chat persan, première race féline à poil long qui séduit la Cour royale, les aristocrates et les bourgeois.

À son tour Jean de la Fontaine, célèbre fabuliste, consacre au moins douze fables à notre ami félin dont il en fait le héros.

Enfin, l’horizon s’annonce sous de meilleurs auspices et notre ami chat d’Europe va-t-il pouvoir enfin dormir tranquille, durant les seize heures journalières dont il a besoin pour rester en forme.

Quel était le sort des chats en terre d’Islam ?

C’est lors du déluge, dans l’arche de Noé, que le chat serait apparu pour la première fois.

Très vite, la vie sur le navire, infesté par les rats, devint impossible et il fut urgent de trouver un moyen d’éliminer les rongeurs.

Noé trouva la solution en passant délicatement la main sur le museau d’un lion qui éternua sous la caresse, expulsant par les narines deux chats, mâle et femelle, qui eurent tôt fait de nettoyer la place en éliminant les indésirables.

Tout aurait pu se terminer dans la sérénité si les chats n’avaient pas pris la mauvaise habitude de faire leurs griffes sur le bois du bateau, endommageant les parois et les fragilisant.

Mécontent, Noé aurait contraint les félins à rester en permanence sur le pont, exposés aux intempéries, ce qui aurait généré la détestation de l’eau que présentent les chats en général.

           

chats Istanbul
Dans le jardin de thé de la petite Sainte-Sophie

 

Appréciés depuis l’Antiquité, les chats du Proche-Orient ont toujours bénéficié d’un statut privilégié, et plus particulièrement, dès la naissance de la religion musulmane.

Il est dit que le Prophète condamne la maltraitance, la persécution et le meurtre des chats.

La tradition islamique rapporte que Mahomet avait une chatte, Muezza, qu’il affectionnait particulièrement. Or, un jour, se préparant à assister à la prière, le Prophète s’aperçoit que sa protégée dort sur une des manches de sa robe de prière. Plutôt que de la réveiller, il sacrifie la manche en la coupant afin de laisser la chatte terminer tranquillement sa sieste.

Loin d’être méprisé comme peut l’être le chien, le chat bénéficie d’une aura quasi religieuse qui lui permet d’être chez lui jusque dans le calme des mosquées où il aime se distancier du bruit et de la frénésie de la ville.

Indépendant par nature, il choisit le lieu qui lui convient le mieux, et s’y installe sans inquiétude, sachant qu’il n’a que peu de risque de se voir chassé dès lors qu’il ne vole rien.

 

chats Istanbul
Chez un marchand de cordes et courroies du quartier de la mosquée Rüstem Pacha

 

Avoir un chat dans sa maison porterait bonheur et ses capacités de communiquer avec les esprits empêcheraient les malfaisants de s’approcher du foyer. Il annulerait les ondes négatives et aurait un pouvoir de guérison du stress et de l’angoisse…

Bref, notre petit félin aurait toutes les qualités. Mais c’est aussi oublier un peu vite ses défauts car il n’est, hélas, aucune créature qui soit parfaite.

Il marque facilement son territoire de manière très odorante, très réceptif à l’atmosphère ambiante, il a parfois des sautes d’humeur soudaines, ses griffes sont de redoutables armes dont la blessure s’infecte facilement et est longue à cicatriser et, jouisseur de la vie, il est capable de quitter la chaleur de votre foyer s’il trouve une autre maison plus à son goût…

Tout comme le chien, le chat des rues a investi Istanbul de manière très prolifique, il est impossible de ne pas en croiser, quel que soit le lieu où vous vous promenez.

Fort heureusement pour ceux qui n’ont pas trouvé de maison ou qui préfèrent l’indépendance de la vie en plein-air, nombreuses sont les bonnes âmes qui viennent leur distribuer nourriture et caresses, chacune ayant ses félins habitués qui ne manquent aucune distribution.

 

chats Istanbul
Dans le cimetière d’Eyüp

 

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